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Actualités - ANALYSE

Gouvernement - Le 8e Cabinet de l’après-Taëf à l’image des sept précédents Un savant dosage qui respecte la forme mais pas le fond

Le huitième gouvernement de l’après-Taëf diffère très peu des sept précédents Cabinets quant à son profil politique global. Comme cela a toujours été le cas après la fin du mandat du président Amine Gemayel, en 1988, la nouvelle équipe ministérielle annoncée hier soir se caractérise par une influence syrienne indéniable. D’une manière générale, tout porte à croire que l’ossature du quatrième Cabinet Hariri a été, comme il se doit, façonnée en étroite collaboration avec le «tuteur» syrien. Les grandes orientations de la politique de l’Exécutif ne devraient donc pas changer outre mesure par rapport aux dix dernières années. En examinant de près la composition de ce deuxième gouvernement du mandat Lahoud, il apparaît qu’au moins six des trente ministres représentent – plus que d’autres – la «part» de Damas. Il s’agit de MM. Negib Mikati, Sleiman Frangié, Karam Karam, Khalil Hraoui, Ali Kanso (PSNS) et Nazih Beydoun (Baas). Parallèlement, aucun des partis et courants du camp chrétien (Kataëb, PNL, Bloc national, Forces libanaises et aounistes) n’est présent au sein de la nouvelle équipe. L’exclusion des fractions de l’Est politique a d’ores et déjà été dénoncée hier soir par plusieurs pôles d’influence. Ce déséquilibre illustre le fait que les «décideurs» (libanais mais, surtout, syriens) n’ont pas encore la volonté d’engager le pays sur la voie d’un dialogue interne en vue d’une véritable réconciliation nationale. L’équilibre a, par contre, été (relativement) respecté dans le partage du gâteau entre les trois pôles du pouvoir. M. Rafic Hariri s’est évidemment réservé la part du lion avec huit ministres qui font partie de son équipe personnelle, en l’occurrence MM. Bahige Tabbarah, Fouad Siniora, Abdel Rahim Mrad, Samir Jisr (soit quatre sunnites sur six, en sus de M. Hariri), Bechara Merhej, Michel Pharaon, Ghassan Salamé et Bassel Fleyhane. Sept ministres sont proches du président Émile Lahoud. Il s’agit de MM. Georges Frem, Pierre Hélou, Jean Louis Cardahi (soit trois maronites sur six), Issam Farès, Elias Murr, Talal Arslane et, dans une moindre mesure, Sébouh Hovnanian. Quant à M. Nabih Berry, il peut compter sur le soutien de cinq ministres : MM. Mohammed Beydoun, Assaad Diab, Mahmoud Hammoud, Ali Abdallah et Michel Moussa. Enfin, M. Walid Joumblatt a obtenu satisfaction avec la désignation de l’un des députés maronites de son bloc parlementaire, Fouad el-Saad, en sus des deux ministres druzes Marwan Hamadé et Ghazi Aridi. L’équilibre confessionnel Quant à l’équilibre confessionnel, il a été respecté dans la forme, mais pas toujours au niveau de la répartition des portefeuilles. Les quatre ministères-clé, à savoir les Affaires étrangères, l’Intérieur, les Finances et la Défense, ont été répartis, comme c’est traditionnellement le cas, entre les quatre principales communautés. Fait sans précédent : le ministère des AE a été confié, pour la première fois depuis l’indépendance, à un chiite, en la personne de M. Mahmoud Hammoud, qui, tout en étant proche de M. Berry, entretient, dans le même temps, de bons rapports avec le président Lahoud et M. Hariri. La grande surprise aura été le retour aux Finances (en tant que ministre titulaire et non plus en tant que ministre d’Etat, comme ce fut le cas dans les trois précédents Cabinets Hariri) de M. Fouad Siniora (sunnite). Celui-ci se voit ainsi réhabilité alors qu’il était l’une des cibles du mouvement d’épuration initié par le nouveau régime au début du mandat du président Lahoud. L’attribution du portefeuille de l’Intérieur à M. Elias Michel Murr (grec-orthodoxe) n’a pas été, par contre, une surprise, tout comme la désignation de M. Khalil Hraoui (maronite) à la Défense. Au-delà de ces quatre portefeuilles- clé, des failles se manifestent au niveau de la représentation de certaines communautés. Les grecs-catholiques, à titre d’exemple, ne détiennent aucun ministère important. De surcroît, la ville de Zahlé, principale localité grecque-catholique non seulement au Liban mais également au Moyen Orient, est représentée par un ministre … maronite. La présence du député melkite de Beyrouth, Michel Pharaon, qui avait été exclu de la première formule des 24, compense quelque peu cette grave lacune. Quant au troisième ministre grec-catholique, Ghassan Salamé, il devrait être amené, par le biais du ministère de la Culture, à contribuer à une mission essentielle mais peu enviable : l’organisation du prochain sommet de la francophonie, en octobre 2001. Autre faille dans l’équilibre confessionnel : la communauté arménienne n’est représentée que par un seul ministre, Sebouh Hovnanian, qui détient, de surcroît, un portefeuille quelque peu «symbolique», celui de la Jeunesse et des Sports. Les Arméniens, qui obtiennent généralement deux ministères dans une formule de 30, ont été défavorisés par la désignation de M. Bassel Fleyhane (minorités), auquel tenait M. Hariri. L’Économie et l’Enseignement à Hariri La répartition des maroquins montre, d’autre part, que M. Hariri a la haute main sur les secteurs de l’Économie et de l’Enseignement. Il a réservé à ses proches les deux ministères-clé qui conditionnent la politique économique du gouvernement (les Finances, l’Économie et le Commerce), sans compter les portefeuilles non moins importants de la Justice et de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur, en sus de la Culture. Les ministres proches du président Lahoud détiennent de leur côté les portefeuilles de l’Industrie, des Télécommunications et de l’Intérieur. Quant à M. Berry, il contrôle les Ressources hydrauliques et les Affaires sociales, sans compter les Affaires étrangères. Ce dernier ministère a, certes, perdu quelque peu de son impact avec l’alignement du Liban sur la politique de la Syrie. Mais le chef du Législatif a sans doute voulu obtenir ce portefeuille pour élargir ses possibilités d’action au niveau de la diaspora libanaise. Toujours sur le plan de la répartition des maroquins, les deux ministères de services dont l’impact n’échappe à personne (la Santé et le Travail) sont détenus par des inconditionnels de Damas. Ce panorama politico-communautaire détermine, dans une certaine mesure, les limites de l’action du nouveau gouvernement. Dès l’annonce de la composition de son équipe ministérielle, M. Hariri a souligné qu’il avait mis sur pied un Cabinet «d’union et de développement économique». L’union, dans le sens large et exhaustif du terme, fait, à l’évidence, défaut avec l’exclusion des forces politiques de l’Est. Reste le développement économique. C’est essentiellement sur ce plan que les Libanais jugeront l’action des trente. Et d’ores et déjà, l’opinion publique attend de voir comment ce quatrième Cabinet Hariri pourra juguler et surmonter le marasme économique provoqué, dans une large mesure, par une crise de confiance (politique) et le gonflement exagéré de la dette publique. Michel TOUMA
Le huitième gouvernement de l’après-Taëf diffère très peu des sept précédents Cabinets quant à son profil politique global. Comme cela a toujours été le cas après la fin du mandat du président Amine Gemayel, en 1988, la nouvelle équipe ministérielle annoncée hier soir se caractérise par une influence syrienne indéniable. D’une manière générale, tout porte à...