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Actualités - ANALYSE

L’Est réplique au pouvoir local en réclamant un dialogue national

Quand quelque chose, ou quelqu’un, l’agaçait, la reine Victoria avait coutume de lancer du haut de son nez pointu : «We are not amused». Les prélats de l’Est non plus, face à des propos, des positions et des propositions officielles dont la candeur peut faire sourire. Ainsi, sans perdre patience, une personnalité religieuse de l’Est entreprend de démolir un par un les arguments du pouvoir en place concernant la présence militaire syrienne. Ce dignitaire évoque d’abord le thème de «l’inopportunité» martelé par les dirigeants, qui soutiennent que le débat public rend «gratuitement» service à Israël. Il note qu’il est assez étrange «qu’en dix ans, depuis Taëf, l’on n’ait jamais trouvé une brèche de temps propice pour soulever la question. Si cela n’est pas faisable, maintenant qu’Israël s’est retiré, quand cela pourrait-il l’être ? Et après son évacuation, quel service Israël peut-il y trouver ?» Il relève en substance que «cet élément nécessite un dialogue. D’autant que maintenant le caractère dit provisoire de la présence militaire syrienne se trouve lié officiellement à la conclusion d’une paix globale dans la région. Pour une question aussi cruciale, il est impératif que toutes les composantes du pays se consultent et se mettent d’accord. Les autorités locales ne peuvent en trancher toutes seules. Leur devoir se limite à appliquer les pactes, traités ou accords conclus. À la rigueur, elles peuvent en demander la modification, ce qui induit, nous y revenons, une concertation générale, pour une décision véritablement nationale, prise à l’unanimité ou à une forte majorité». À bien comprendre ces propos, le Liban, pays composite, se fonde sur le consensus. Comme le camp qui réclame le redéploiement syrien se voit reprocher de vouloir imposer ses vues aux autres parties libanaises, le prélat répond qu’il ne s’agit pas du tout de cela. «Mais de faire appliquer les accords de Taëf. Ce sont ceux qui s’y refusent qui, à bien voir les choses, imposent arbitrairement leurs choix au pays». Et de rappeler qu’en quelque sorte le redéploiement puis le retrait avaient été payés d’avance. Par les concessions politiques faites à Taëf et l’abandon de prérogatives capitales, considérées comme des garanties de base. Un cadeau dispensé à seule fin de servir la cause d’un Liban souverain, indépendant, totalement maître de son territoire comme de ses destinées. D’où il ressort qu’il y a eu rupture abusive du contrat. – Allant au fond des choses, tout en mettant un peu d’eau dans son vin, le prélat estime que «c’est la Syrie elle-même qui devrait prendre l’initiative d’ouvrir un dialogue. Non pas avec les autorités locales, dont la position est connue, mais avec toutes les instances représentatives des fractions libanaises. Il faut espérer du reste que c’est un tel effort qui commence à être entrepris à travers les entretiens que les dirigeants syriens ont pu avoir récemment avec le président Élias Hraoui ainsi qu’avec M. Fouad Boutros ou encore avec M. Jean Obeid. Il serait bon de parvenir à une vision unifiée par rapport au maintien de la présence militaire syrienne, dans le contexte régional délicat d’aujourd’hui, marqué par les menaces israéliennes. On pourrait peut-être aboutir à une révision des textes de Taëf concernant les délais et les sites de la présence militaire syrienne. L’essentiel est qu’il n’y ait plus de confrontation entre deux parties, l’une réclamant le redéploiement et l’autre s’y opposant. Il est de l’intérêt même du pouvoir syrien de faire en sorte que tous les Libanais tombent d’accord. Ce régime en sortirait renforcé, ainsi d’ailleurs que le Liban. De plus, cela illustrerait concrètement la thèse qui affirme que la Syrie est présente pour empêcher les Libanais de se diviser, de les unifier et de veiller à ce que le Liban ne se disloque pas. Il n’est pas admissible que la présence syrienne continue à constituer un sujet de division intérieure, alors qu’elle est censée servir le dessein contraire». Abondant dans le sens des modérés, la personnalité religieuse admet que le maintien de la présence militaire syrienne peut se discuter «sous l’angle des impératifs sécuritaires, pour protéger les flancs de la Syrie face au pressant danger israélien. Autrement dit, on peut en débattre dans le cadre d’une stratégie commune, justifiée par l’unité de sort. Mais bien évidemment cela implique la nette définition des sites de stationnement techniquement valables, en regard des nécessités d’une défense d’ordre purement militaire. Tout comme c’est le cas pour les forces américaines présentes en Allemagne, en Turquie ou au Japon. Si un redéploiement devait s’effectuer sur cette base, et sur cette base uniquement, il n’y aurait plus de conflit». Émile KHOURY
Quand quelque chose, ou quelqu’un, l’agaçait, la reine Victoria avait coutume de lancer du haut de son nez pointu : «We are not amused». Les prélats de l’Est non plus, face à des propos, des positions et des propositions officielles dont la candeur peut faire sourire. Ainsi, sans perdre patience, une personnalité religieuse de l’Est entreprend de démolir un par un les...