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Actualités - ANALYSE

DÉBAT DE CONFIANCE - Le leader du PSP, après Moukheiber, surprend l’Assemblée. Le Hezbollah s’abstiendra de voter Jour II : les mêmes causes n’ont pas produit les mêmes effets

Hasard ou coïncidence – ou bien était-ce le fruit d’une quelconque volonté, il n’empêche, la deuxième journée du débat de confiance place de l’Étoile a commencé comme la première. Parce que jusqu’à nouvel ordre, les deux hommes à avoir débuté la série des interventions, c’est-à-dire Albert Moukheiber jeudi et Walid Joumblatt hier, sont les deux seuls députés à avoir abordé les relations syro-libanaises sous un angle particulièrement critique. Et tout comme lors de la première journée, la plupart des neuf discours qui ont suivi ont paru bien fades, bien sages, et à une ou deux exceptions près, avaient tous un air de déjà (souvent) entendu. «Il a trouvé qu’il avait du courage, un vrai courage, qu’il avait quelque chose dans le ventre. Et puis il a l’immunité, que lui confère son âge…». Ces mots, rapportés par une source parlementaire proche de Moukhtara, reflètent l’opinion du député du Chouf sur la prestation de son collègue de Beit-Méry. Et de courage, il n’en a pas manqué, Walid Joumblatt, même s’il est évident qu’il n’a pas été aussi loin qu’Albert Moukheiber. Parce que tandis que l’un exigeait purement et simplement du gouvernement qu’il réclame le retrait des forces de Damas, allant même jusqu’à dire que «la présence militaire syrienne nous mènera droit à la guerre», le second n’a appelé, même si clairement, qu’à une révision de certains points essentiels des relations bilatérales, à savoir le redéploiement militaire, ainsi que les rapports économiques et politiques. Les différences d’abord. «Je peux comprendre les impératifs de la sécurité nationale syrienne au Liban, mais je ne tolère pas les interventions biaisées, secondaires ou partielles, qui n’ont rien à voir avec les exigences sécuritaires de Damas». C’est la première fois que Walid Joumblatt, sous les lambris du Parlement, et tant dans la forme que dans le fond, explicite aussi nettement ce dossier, délicat et épineux s’il en est, des relations entre les deux voisins. Les corollaires Quant aux corollaires, ils sont d’importance. Bkerké d’abord. Le député du Chouf, relevant les illogismes de la déclaration ministérielle, a explicitement donné raison au patriarche maronite et au communiqué des évêques. Les arrestations arbitraires. Il a vivement exhorté l’État à dialoguer avec ceux qui s’opposent à lui, refusant d’entendre le mot «liberté», tant que durent ces pratiques. L’accord de Taëf ensuite. Ne comprenant absolument pas son absence de la déclaration ministérielle, il a demandé qu’on le clarifie, qu’on l’explicite et qu’on l’applique. Le droit d’asile également. Il a souhaité le voir accordé aux opposants de tout régime politique. Les prisonniers libanais en Syrie. Il a été le seul à en avoir parlé, il a même demandé aux autorités de faire le nécessaire, «si tant est qu’ils soient en Syrie…». Et puis maniant le sarcasme comme un escrimeur français médaillé d’or olympique le ferait avec son fleuret, il a touché – évoquant une des particularités de l’économie libanaise tout entière défaillante – là où ça fait mal : «Il faut retourner aux plantations interdites ou du moins, tant que les promesses de financement des cultures de substitution ne sont pas tenues». Dernier point et non des moindres, la confiance que Walid Joumblatt, qui parlait au nom de tout son bloc, accordera ou pas au quatrième gouvernement Hariri. Pas de oui ni de non, mais une conclusion comme seul lui sait en faire et qui montre bien les limites de l’alliance entre Moukhtara et Koraytem – ses limites et ses probables conséquences, à court comme à moyen terme : «Je souhaite au gouvernement le succès, du moins à une partie de celui-ci». Comprenne qui pourra. Comprenne qui devra surtout. D’autant plus que maintenant – chose que ne peut plus ignorer le nouveau gouvernement – l’appel à la révision des rapports libano-syriens ne se limite plus à la seule voix chrétienne. Il ne manque d’ailleurs, comme s’est plu à le souligner un des députés présents hier place de l’Étoile, qu’une voix mahométane pour que tout commence à basculer. Vivement cette heure… Il n’empêche, la grosse surprise – la grosse énigme de cette séance : les applaudissements spontanés de l’ensemble des parlementaires présents. Rappelons que la veille, aucun député n’a bronché à l’issue de l’intervention d’Albert Moukheiber. Plus encore, et chose rarissime, le chef du gouvernement, sur la demande du président de la Chambre, a immédiatement répondu au député du Metn. Pourquoi ? Certes, le leader du PSP, faut-il le répéter, n’a pas été aussi loin que son collègue. Albert Moukheiber serait-il victime d’un ostracisme de la part de ses collègues, parce que depuis longtemps trop catégorique, trop extrémiste ? A-t-on applaudi, en Walid Joumblatt – un des rares ténors, lui aussi, de la Chambre – le député qui a dit bien haut ce que tous pensent très bas ? Ou n’a-t-on salué, dans une réaction somme toute bien instinctive, que son courage ? Est-il «mieux vu» ou plutôt «politiquement plus correct» d’acclamer le chef du troisième bloc parlementaire que d’applaudir un député indépendant ? Bref, il n’en demeure pas moins qu’hier, et contrairement au postulat scientifique, les mêmes causes – il faut entendre par là les mêmes idéaux – n’ont pas produit les mêmes effets. On a cependant appris, toujours de source parlementaire, que Nabih Berry, par la voix d’un des parlementaires de son bloc, répondra très prochainement aux commentaires formulés par Joumblatt sur la présence syrienne. Jamais deux sans trois ? Et le reste ? Eh bien, le reste a été réduit à sa portion congrue. La différence d’avec hier, c’est qu’aucun député n’a annoncé qu’il voterait la défiance. Des neuf députés à avoir accédé hier, à la suite de Joumblatt, à la tribune parlementaire, seul Nehmetallah Abi Nasr d’une part et Ibrahim Bayan et Mohammed Raad de l’autre ont apporté quelque chose de nouveau. Le premier, un proche de Bkerké et surtout du chef de l’État, a stigmatisé, un iota moins fort que Joumblatt, les arrestations arbitraires, exhortant à la séparation de l’Exécutif et du judiciaire et martelant pendant de longues minutes son credo premier, à savoir son refus absolu de la naturalisation des réfugiés palestiniens. Quant aux deux députés Hezbollah – Mohammed Raad est le chef du bloc parlementaire du parti de Dieu –, ils ont annoncé, déjouant tous les pronostics qui penchaient en faveur de la défiance, qu’ils s’abstiendraient de voter à l’issue du débat. Conséquence somme toute compréhensible de ne remettre en cause ni leur alliance du moment avec le général Lahoud ni le rôle qu’ils se sont imparti, au lendemain du retrait israélien, au Liban-Sud en général, à la frontière en particulier. Demain samedi sera la dernière – ou l’avant-dernière – journée du débat de confiance. Et quand bien même la règle du «jamais deux sans trois» se verra vérifiée, et quand bien même les critiques, parfois pertinentes, ne manqueront pas, on entendra pendant longtemps l’écho du «oui» au deuxième gouvernement du mandat Lahoud – le quatrième en huit ans de Rafic Hariri. Ziyad MAKHOUL
Hasard ou coïncidence – ou bien était-ce le fruit d’une quelconque volonté, il n’empêche, la deuxième journée du débat de confiance place de l’Étoile a commencé comme la première. Parce que jusqu’à nouvel ordre, les deux hommes à avoir débuté la série des interventions, c’est-à-dire Albert Moukheiber jeudi et Walid Joumblatt hier, sont les deux seuls...