Rechercher
Rechercher

Actualités - CHRONOLOGIE

Cellulaire - La gestion du dossier au centre d’une vive polémique Graves échanges d’accusations entre Cardahi et le Conseil de la privatisation

Rien ne va plus entre le ministre des Télécommunications, Jean-Louis Cardahi, et l’équipe de travail du Premier ministre, Rafic Hariri. Les conditions dans lesquelles s’est fait le transfert de propriété des réseaux et des avoirs des sociétés FTML et LibanCell à l’État ont donné lieu à une très vive polémique entre M. Cardahi et le secrétaire général du Conseil supérieur de la privatisation (CSP), Ghazi Youssef (lequel est considéré comme l’un des plus proches collaborateurs de M. Hariri). Le quotidien al-Moustaqbal appartenant au chef du gouvernement s’est mis de la partie, accusant ouvertement, dans son édition de samedi, M. Cardahi d’avoir mal géré le dossier de la privatisation de la téléphonie mobile et d’avoir, par le fait même, affaibli la position de l’État sur ce plan. Un point de vue repris d’ailleurs par M. Youssef dans un communiqué publié durant le week-end. Le ministre des Télécommunications a retourné l’accusation contre l’équipe de M. Hariri, soulignant que le Premier ministre a fait obstruction lorsqu’il s’est agi de payer les avocats chargés de défendre l’État dans son litige avec les deux sociétés de téléphonie mobile. M. Cardahi a, d’autre part, affirmé qu’il avait fait l’objet de pressions afin de l’empêcher de prendre des mesures à l’encontre de FTML et de LibanCell en vue de préserver l’intérêt de l’État et du contribuable. Le ministre a indiqué, par ailleurs, que le conseiller juridique du Conseil supérieur de la privatisation a des relations d’affaires avec LibanCell. M. Cardahi souligne à ce sujet que le CSP a modifié les conditions de préqualification pour la participation à l’appel d’offres portant sur la privatisation du cellulaire afin qu’elles correspondent au profil de LibanCell. Ce à quoi le CSP a rétorqué en insinuant que M. Cardahi aurait peut-être poussé la banque britannique HSBC à définir les conditions de préqualification de façon à empêcher FTML et LibanCell à participer au prochain appel d’offres pour la privatisation du cellulaire. Cette polémique sans précédent tourne principalement autour de deux points essentiels : l’opportunité et les conditions de la suspension des mandats de recouvrement de 300 millions de dollars que l’État réclame à chacune des sociétés de téléphonie mobile, d’une part, et l’arbitrage du litige avec l’État auprès de tribunaux internationaux, d’autre part. Le mandat de recouvrement, rappelle-t-on, constitue le montant que l’État réclame à chacune des sociétés de téléphonie mobile pour compenser le fait que celles-ci ont outrepassé les termes du contrat BOT en vertu duquel elles exploitaient le réseau cellulaire. M. Cardahi souhaitait que la suspension de l’exécution des mandats de recouvrement soit assortie de garanties de paiement. Mais l’accord conclu entre le président Émile Lahoud et M. Hariri à ce propos – et avalisé par le Conseil des ministres au cours de sa réunion de jeudi dernier – ne prévoit pas de telles garanties. Quant à l’arbitrage, M. Cardahi y était opposé en ce qui concerne LibanCell, arguant du fait que cette société est libanaise et qu’elle devrait, de ce fait, se soumettre aux lois en vigueur au Liban. Quant à Cellis, M. Cardahi était favorable au principe de l’arbitrage du fait que Cellis est la filiale d’une société française (FranceTélécom) et qu’elle devrait, par conséquent, bénéficier des dispositions de l’accord franco-libanais sur la garantie des investissements. M. Cardahi a insisté, toutefois, pour que l’arbitrage ne se fasse pas auprès de la Chambre de commerce internationale de Paris, mais plutôt auprès d’une chambre d’arbitrage située à Genève et soumise aux règles UNCITRAL (relevant de l’Onu). M. Cardahi a obtenu satisfaction au sujet de Cellis, mais le gouvernement a, malgré tout, donné son aval à un arbitrage avec LibanCell qui se ferait à Beyrouth, la présidence de la chambre d’arbitrage devant être confiée à un non-Libanais. La modification des conditions de préqualification Pour en revenir à la polémique entre M. Cardahi et les proches de M. Hariri, elle a débuté lorsque le Conseil supérieur de la privatisation a affirmé, dans un communiqué vendredi soir, que le ministre des Télécommunications a souligné, lors de ses discussions avec le CSP, que l’État avait peu de chance d’obtenir gain de cause au niveau de l’arbitrage avec FTML et LibanCell. Le ministre des Télécommunications n’a pas tardé à réagir. Dans un communiqué, il a démenti l’allusion du CSP, soulignant qu’il n’a jamais exprimé la crainte que l’arbitrage se fasse au détriment du gouvernement « en raison du fait que l’État a des droits indiscutables dans son litige avec les sociétés de téléphonie mobile ». Et M. Cardahi d’ajouter que « dans le but de préserver l’intérêt de l’État et de sauvegarder les intérêts du Trésor, il aurait fallu prendre en considération toutes les observations » qu’il a formulées en ce qui concerne, notamment, les garanties relatives aux mandats de recouvrement et le respect de la décision du Conseil d’État refusant l’arbitrage auprès de la Chambre de commerce internationale de Paris. Dans un deuxième communiqué, M. Cardahi a reproché au Premier ministre d’avoir affaibli la position de l’État dans l’arbitrage avec FTML et LibanCell en qualifiant « d’hérésie », dans une interview à la NBN le 5 août 2001, la décision du Conseil d’État concernant le rejet de l’arbitrage auprès de la Chambre de commerce internationale de Paris. Affirmant que l’un des membres de l’équipe du secrétaire général du CSP a des relations d’affaires avec LibanCell, M. Cardahi a relevé que le CSP avait modifié (en nivellant par le bas) les conditions de préqualification des sociétés souhaitant participer à l’appel d’offres pour la privatisation du réseau cellulaire. Ces conditions de préqualification avaient été définies, pour le compte du gouvernement libanais, par la banque britannique HSBC. M. Cardahi souligne que le CSP a modifié ces conditions de préqualification afin qu’elles correspondent au profil de LibanCell. M. Cardahi précise, en outre, dans son communiqué, que la décision de suspendre l’exécution des mandats de recouvrement sans une quelconque garantie accordée à l’État risque de compromettre la possibilité pour le gouvernement d’encaisser le montant réclamé à FTML et de LibanCell (300 millions de dollars chacune) si l’une ou l’autre de ces sociétés venait à être dissoute. La réponse du CSP Dans la journée de samedi, le CSP a répondu aux accusations dirigées contre lui par le ministre des Télécommunications. Le CSP a d’abord affirmé que « le ministre Cardahi n’a pas géré d’une manière saine et sérieuse le dossier du litige avec les deux sociétés de téléphonie mobile, et sa négligence à suivre ce dossier aura pour conséquence de permettre à ces deux opérateurs de remporter d’une manière quasi certaine l’arbitrage » les opposant au gouvernement. Le CSP a, d’autre part, qualifié de « calomnieuses et diffamatoires » les accusations de M. Cardahi concernant le rôle du conseiller juridique du CSP et ses possibles relations d’affaires avec LibanCell. « Il reviendra à l’étude d’avocats Dewey Ballantine de répondre (à l’accusation de M. Cardahi) de la manière qu’il jugera adéquate », souligne le CSP. « Quant aux conditions de préqualification définies par la banque britannique HSBC, elles ont été discutées par le Conseil supérieur de la privatisation, en présence du ministre, précise le communiqué du CSP. Le ministre sait parfaitement que ces conditions de préqualification avaient été élaborées, peut-être à sa demande, afin d’empêcher les deux opérateurs actuels de participer à l’appel d’offres. Après discussion en présence du ministre, le Conseil supérieur de la privatisation a approuvé ces mêmes conditions de préqualification que le ministre critique actuellement. » « En ce qui concerne la question de la suspension des mandats de recouvrement sans l’octroi des garanties nécessaires (à l’État), elle a été discutée en Conseil des ministres, indique le CSP. Le gouvernement a rejeté le mécanisme que le ministre avait proposé à ce sujet. » Et le communiqué de conclure : « Depuis qu’il a pris en charge ses fonctions, le ministre n’a pas géré le dossier du litige avec les deux opérateurs de façon sérieuse et saine, en dépit des observations que lui ont faites régulièrement les responsables concernés. Du fait de son incapacité à gérer ce contentieux, le ministre a entrepris, il y a trois mois, de charger un bureau international de consultation de suivre le dossier. Ce bureau de consultation a présenté au Conseil supérieur de la privatisation des assurances dont il ressortait que l’État avait 75 % de chance de remporter l’arbitrage. Mais le bureau de consultation a dû abandonner sa mission lorsqu’il a pris conscience des lacunes dont se sont rendus coupables le ministre et son équipe de travail, M. Cardahi ayant réalisé sur ce plan que les deux opérateurs sont quasiment certains de remporter l’arbitrage du fait de ses erreurs de gestion. » La réponse de Cardahi En réponse aux attaques lancées ainsi par le CSP, M. Cardahi a d’abord déploré le fait que le secrétaire général du CSP (M. Ghazi Youssef) ait été nommé à ce poste « sans que le Conseil des ministres en soit informé et sans que le gouvernement approuve cette nomination ». Accusant M. Youssef de « déformer la réalité et de tromper l’opinion publique », M. Cardahi a relevé les points suivants : – Le ministère des Télécommunications est en possession des documents qui prouvent que le conseiller juridique du Conseil supérieur de la privatisation a des relations d’affaires avec LibanCell. – Il est déplorable que M. Ghazi Youssef s’emploie à déformer les réalités en ce qui concerne les conditions de préqualification définies par HSBC. Cette banque est l’une des plus grandes banques internationales et est soucieuse de sa crédibilité. Les conditions de préqualification qu’elle définit ne sauraient lui être imposées par une quelconque partie. Elles ont été élaborées après une étude approfondie du marché, sur base de critères internationaux visant à introduire sur le marché deux opérateurs internationaux, car le secteur de la téléphonie mobile au Liban est appelé à se développer. – La suspension des mandats de recouvrement sans l’octroi de garanties à l’État constitue une dilapidation de fonds publics, d’autant que rien ne pourrait garantir les droits de l’État si les deux sociétés venaient à être dissoutes. – Le dossier de la téléphonie mobile est ouvert depuis 1995. Il n’a jamais été traité d’une manière aussi sérieuse et professionnelle que ces deux dernières années. Au cours de cette période, le ministère des Télécommunications a réussi à contrôler les recettes de la téléphonie mobile et à dévoiler les irrégularités de manière à défendre les droits de l’État et du contribuable. – Quant au bureau international de consultation, l’État n’a pas été en mesure de lui verser les honoraires qu’il réclamait afin qu’il défende ses intérêts. Telle est la seule et unique raison qui a poussé l’État à cesser de traiter avec le bureau en question.
Rien ne va plus entre le ministre des Télécommunications, Jean-Louis Cardahi, et l’équipe de travail du Premier ministre, Rafic Hariri. Les conditions dans lesquelles s’est fait le transfert de propriété des réseaux et des avoirs des sociétés FTML et LibanCell à l’État ont donné lieu à une très vive polémique entre M. Cardahi et le secrétaire général du Conseil...