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Actualités - REPORTAGE

ARCHÉOLOGIE - Un programme international sur la chronologie de l’âge du bronze Le Liban est de nouveau dans le monde de la recherche (photos)

Établir une chronologie absolue de l’âge du bronze des sites du Levant et de l’Égypte à partir des données archéologiques est l’objectif que s’est fixé le programme de recherche Sciem 2000 (Synchronisation of Civilization in the Eastern Mediterranean). Ce projet innovateur, échelonné sur dix ans, a été monté par la mission de Tell Dabaa, en Égypte, et mis en place par l’Académie autrichienne, en collaboration avec l’Austrian Science Fund. «Ce programme de recherche international et interuniversitaire regroupe une dizaine de missions archéologiques fouillant des sites de l’âge du bronze, rattachées à différentes universités européennes ou levantines », explique M. Jean-Paul Thalmann, directeur des fouilles archéologiques de Arqa (Akkar) et membre de ce programme de recherche. « Il vise à la mise en commun des données des fouilles des sites de l’âge du bronze afin de permettre la comparaison du matériel et la synchronisation des chronologies. Pour atteindre ce but, le comité fondateur de ce programme organise, annuellement des congrès dans les pays membres de cette recherche », poursuit-il. Ces rencontres entre spécialistes sont à la base de ce programme. D’un côté, elles permettent aux chercheurs de voir et de comparer les différents matériels de fouille et, de l’autre, de doter le monde de la recherche de nouvelles données puisque les conférences sont publiées dans des revues scientifiques. L’âge du bronze, (3000-1200 av. J-C) est une période-clé de l’histoire du Moyen-Orient et de l’Égypte. C’est la fin de la préhistoire, les grands royaumes sont fondés, l’urbanisation s’accentue, les arts se manifestent d’une façon plus prononcée… et les échanges entre les peuples existent. Le matériel archéologique trouvé sur les sites lors des fouilles le prouve. Nombreux sont les objets en céramique d’origine chypriote ou mycénienne qui ont été trouvés en Égypte ou au Levant. Toutefois, la datation de ces objets varie d’un site à l’autre car chaque site adopte sa propre chronologie. Sciem 2000 se propose d’utiliser ces éléments communs aux différents sites pour synchroniser la chronologie de l’âge du bronze à l’est de la Méditerranée. Ce qui permet aux archéologues non seulement de comprendre le rôle, l’importance et l’évolution de leurs sites durant ces siècles, mais aussi de dater leur matériel sur une frise chronologique régionale. « Si la chronologie s’établit en premier lieu, suite à la comparaison des objets en céramique, elle se définit cependant à partir du carbone 14 et de la dendrochronologie, méthodes de datation irréfutables », explique Jean-Paul Thalmann. Pour atteindre l’objectif de ce programme de recherche, une sélection des sites occupés à l’âge du bronze a été faite par le comité fondateur. Le critère de base de cette sélection était la stratigraphie archéologique nette des sites. « Comprendre la succession des occupations du sol d’un site permet d’établir sa chronologie absolue, de dater son matériel et de le comparer, par conséquent, aux autres sites. Au Liban, un seul site répondait à ce critère : Arqa », indique M. Thalman. Fouillé depuis les années 70 par une équipe française, sa séquence de l’âge du bronze (ancien et moyen) est établie dans ses détails et le matériel daté dans son intégralité. Le choix de ce site du Akkar a permis au Liban de rejoindre le monde de la recherche scientifique spécialisée après des années d’absence, dues à la guerre. Ce retour a eu lieu lors du congrès « La Chronologie de l’âge du bronze au Liban » (voir L’Orient-Le Jour, lundi 17 juin) qui s’est tenu au Centre culturel français, avec la participation de quarante chercheurs et spécialistes du domaine. Le congrès était organisé par la mission de Tell Arqa et financé conjointement par elle, celle du Tell Dabaa en Égypte, l’Ifapo et le CCF. Pour une collaboration entre les missions archéologiques Ce congrès hautement spécialisé a revêtu, à l’échelle du Liban, une importance particulière. Car, d’une part, il a permis aux archéologues fouillant cette période d’échanger et de comparer leurs données et d’établir, d’autre part, une première chronologie des sites archéologiques fouillés au siècle dernier et dont les données sont perdues. Citons à titre d’exemple le site de Byblos. L’absence des données et des datations exactes des séquences historiques de ce site, où les fouilles n’ont pas été effectuées suivant des normes scientifiques, rend impossible la datation du matériel. Il s’agit donc de milliers de tessons de céramique et d’objets complets « hors contexte » historique. Pour les dater, il faut reprendre le matériel, l’étudier en détail, effectuer des datations au carbone 14 , si c’est possible, comparer le matériel à celui d’autres sites et proposer des datations en rapprochant les typologies de céramique. La comparaison du matériel, au Liban et ailleurs, est tout à fait réalisable suivant Sciem 2000. D’ailleurs, une première approche à ce sujet a été faite par M. Thalmann qui a proposé une datation de quelques objets en céramique de Byblos à partir d’une comparaison avec le matériel de Arqa. Si ce travail est effectué actuellement à l’échelle de deux sites, il peut, dans les années à venir, englober les quatre sites de l’âge du bronze fouillés actuellement au Liban. Établir une chronologie absolue du IIIe millénaire au Liban à partir du matériel de Arqa, Saïda, Kamed el-Loz et Hourié signifie comprendre la naissance, l’évolution et les rapports entre les villes du littoral, leurs relations avec celles de l’intérieur et l’échange qui s’effectue entre l’intérieur et la montagne libanaise. C’est connaître une phase de l’histoire de ce pays à partir des données réelles mises en rapport avec les textes historiques. Il est évident que les résultats de ce projet pilote, comme tout travail scientifique d’ailleurs, demandent des années de travail. Mais ne serait-il pas possible d’étendre ces études sur les autres périodes historiques afin de connaître la chronologie complète du pays du cèdre ? Certes, cela nécessite la création de projets de recherche similaires à Sciem 2000 et la collaboration des archéologues travaillant sur les sites, mais si les projets actuels de recherche visent à établir la chronologie de toute une région, ne serait-il pas possible de monter un projet pareil à l’échelle d’un pays ? Joanne FARCHAKH
Établir une chronologie absolue de l’âge du bronze des sites du Levant et de l’Égypte à partir des données archéologiques est l’objectif que s’est fixé le programme de recherche Sciem 2000 (Synchronisation of Civilization in the Eastern Mediterranean). Ce projet innovateur, échelonné sur dix ans, a été monté par la mission de Tell Dabaa, en Égypte, et mis en place par...