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Actualités - OPINION

Le retour aux sources de Grégoire Haddad

Avec l’affaire Grégoire Haddad qui a défrayé la chronique locale au cours des derniers jours, l’on a eu comme une vague impression d’avoir été entraîné par une machine à remonter le temps. Pour retourner au début de l’année 1974. Mgr Grégoire Haddad était alors archevêque grec-catholique de Beyrouth. À cette époque, il avait lancé, avec un groupe d’intellectuels chrétiens, la revue Afâq. Ses articles avaient provoqué des remous qui avaient eu pour conséquence son éviction de l’archevêché de Beyrouth. Pour placer l’incident de vendredi dernier ainsi que celui qui l’a précédé, une semaine plus tôt, dans leur véritable contexte, il serait utile de ressortir des oubliettes les textes écrits en 1974. Car les propos tenus par l’évêque melkite dans le cadre de ses émissions sur les ondes de Télé-Lumière s’inscrivent dans la logique et dans le prolongement des articles d’Afâq. Mgr Haddad se prononçait alors pour un retour aux sources, pour un débat profond sur les problèmes religieux chrétiens qui devraient être abordés, selon lui, en se fondant sur une « analyse et une recherche radicales ». En clair, la démarche suggérée devait englober toute question se rapportant à la religion chrétienne, et dans ce cadre aucun sujet ne serait considéré comme tabou. Mgr Haddad considère cependant que toute attitude à l’égard d’un quelconque problème religieux chrétien devrait avoir pour base deux critères absolus : le Christ (avec tout ce que représente Son message) et l’homme (dans toute sa dimension). Un tel postulat implique que seuls ces deux critères absolus comptent. Toute personne, toute institution (notamment l’institution de l’Église) ou toute conception qui ne s’inscriraient pas dans le sillage de ce double critère pourraient être remises en question. Cette démarche radicale pousse Mgr Haddad à avancer des idées particulièrement audacieuses et avant-gardistes non seulement au niveau de la religion chrétienne, mais également au plan politique et social. En 1974, déjà, les articles de l’évêque melkite avaient suscité des réactions passionnées. Le Vatican s’était alors saisi du dossier. Après un examen approfondi des écrits litigieux, le Saint-Siège avait affirmé, dans une communication officielle, que les thèses défendues par Mgr Haddad n’étaient en aucune façon contraires aux fondements de la foi et de la religion chrétiennes. Là où le bât blesse, c’est que cette remise en cause de tous les tabous se fait peut-être d’une manière trop abrupte et médiatisée (une télévision a un impact beaucoup plus important qu’une revue à diffusion limitée, comme Afâq), de sorte qu’il est parfaitement normal que cette analyse radicale perturbe profondément des jeunes dont le bagage intellectuel n’est pas suffisamment solide pour saisir toutes les nuances. Reste qu’il est inconcevable d’empêcher ou même d’entraver le débat. Surtout en faisant usage de ses poings. La raison d’être du Liban n’est-elle pas ce pluralisme culturel, cette liberté de pensée et ce respect de l’autre qui nous distinguent si avantageusement de notre environnement arabe ? Michel TOUMA
Avec l’affaire Grégoire Haddad qui a défrayé la chronique locale au cours des derniers jours, l’on a eu comme une vague impression d’avoir été entraîné par une machine à remonter le temps. Pour retourner au début de l’année 1974. Mgr Grégoire Haddad était alors archevêque grec-catholique de Beyrouth. À cette époque, il avait lancé, avec un groupe...