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Actualités - CHRONOLOGIE

Universités - Colloque Beyrouth-Lyon Quand la France s’adressait au Levant sans passer par la Sublime Porte

Lyon, de Fady NOUN C’est sur le rythme particulièrement intense de dix présentations quotidiennes que s’est déroulé à Lyon un colloque interuniversitaire USJ-Universités de Lyon d’une rare qualité. Un colloque organisé en partie grâce à des fonds avancés par le conseil central du Rhône et le gouvernement français au titre de la coopération, et qui a nécessité trois ans de préparation et de coordination. Il n’était pas facile en effet de mobiliser une trentaine de chercheurs et d’universitaires libanais et français sur un thème unifié (« France – Levant, de la fin du XVIIe siècle à la Première Guerre mondiale »), et de coordonner leurs recherches et leurs emplois du temps. Qu’on s’imagine seulement le nombre d’heures passées par une trentaine de sociologues et d’historiens, pour préparer leurs interventions. À raison d’une cinquantaine d’heures en moyenne par conférence, on était en présence de quelque mille cinq cents heures de travail et de réflexion, présentées en un peu moins de trois jours. Mais l’accumulation des données nécessaires à la connaissance du passé, et à l’élaboration de l’avenir, est à ce prix. De quoi s’agit-il ? Le colloque portait sur les rapports entre la France et le Levant, de la fin du XVIIe siècle à la Première Guerre mondiale, soit de l’époque où la France commence à s’adresser directement aux provinces ottomanes, sans passer par la Sublime Porte, au début des mandats français et anglais, qui constituent des séquences à part. Qu’est-ce que le Levant ? C’est à la définition de cet espace géographique, commercial, culturel et politique, que la première partie du colloque était consacrée. La notion est élastique et définit un espace d’influence française et d’interaction avec un empire commercial et politique. Elle a aujourd’hui un délicieux parfum de nostalgie coloniale, mais ses implications ont eu, un jour, des conséquences très concrètes. Très longtemps, tout navire venant du Levant, c’est-à-dire des côtes sud et ouest de la Méditerranée, était mis en quarantaine, avant de pouvoir accoster à Marseille. La deuxième partie du colloque « se proposait de s’intéresser aux politiques et aux ambitions des États, des institutions et des individus, en un mot aux rivalités dont le Levant est le théâtre, et dont un trait particulier résulte des multiples protections qui organisent les contacts entre États, minorités, pouvoirs locaux et puissances lointaines », soulignent les organisateurs. Le troisième axe faisait toute leur place aux échanges, aux transports, à la circulation des hommes, des marchandises, des idées, des cultures. Selon Bernard Delpal, l’un des principaux organisateurs du colloque, directeur de l’Institut d’histoire du christianisme à Lyon, « il paraissait nécessaire de s’interroger sur les résultats de ces échanges, en se gardant bien de leur conférer une dimension exclusive et convenue, entre un Occident porteur de civilisation et un Levant avide de la recevoir. » Cette partie du colloque « rassemblait les communications qui traitent d’école, d’enseignement, de rivalités qui naissent des concurrences en matière d’influence culturelle et religieuse, sachant que les apprentissages linguistiques constituent des enjeux majeurs, et que les affrontements entre tradition et modernité, entre fidélité au passé et tentation de la nouveauté peuvent être extrêmement forts », poursuit Bernard Delpal, qui note l’importance prise « à notre corps défendant », dit-il, par le facteur religieux. Il va sans dire que les rapports entre la France et le Levant ont souvent été à sens unique. Loin de tout jugement de valeur, ils ont joué dans certains cas un rôle central dans le développement des espaces investis, un rôle aussi irréversible que le phénomène de globalisation joue aujourd’hui sur la planète tout entière dans l’histoire comme prise de conscience d’une identité, faisant partie des phénomènes favorisés. Encore qu’en parlant d’influence, il faut préciser que celle-ci n’est jamais celle d’une seule présence, mais plutôt d’un ensemble de courants parfois conflictuels. Ainsi, au Levant, voit-on l’Église catholique de France, représentée par ses missions, se disputer l’espace culturel avec les francs-maçons, ou encore la puissance française rivaliser avec l’Allemagne ou la Grande-Bretagne. C’est donc tout cet espace qui était l’objet du colloque. Il s’agit, pour utiliser un mot à la mode, d’un choc de deux ou de plusieurs mondes, sans préjuger de la position dominante occupée par l’un d’eux. Dans ce domaine, les nuances s’imposent. L’accès à l’Occident compris comme accès à la civilisation a souvent pris l’aspect d’un accès à la sécularisation. Donc, aussi parfois, remise en question de la remise en question.
Lyon, de Fady NOUN C’est sur le rythme particulièrement intense de dix présentations quotidiennes que s’est déroulé à Lyon un colloque interuniversitaire USJ-Universités de Lyon d’une rare qualité. Un colloque organisé en partie grâce à des fonds avancés par le conseil central du Rhône et le gouvernement français au titre de la coopération, et qui a nécessité...