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Actualités - REPORTAGE

Édition - « Chronique d’une guerre d’Orient », de Gilles Kepel Ben Laden et l’accélération de la chute de l’islamisme

Dans son précédent ouvrage Jihad, expansion et déclin de l’islamisme (paru aux éditions Gallimard, puis Folio Actuel), qu’il avait lui-même présenté au Liban, Gilles Kepel annonçait la fin du fondamentalisme musulman. Professeur à l’Institut d’études politiques de Paris (où enseignait aussi le ministre Ghassan Salamé), Kepel connaît bien le Moyen-Orient, notamment l’Égypte, et a effectué plusieurs voyages en Iran. Fort de son savoir, il avait donc prédit que l’islamisme n’attirait plus les foules. Pourtant, les événements du 11 septembre ont démenti son analyse, montrant combien l’islamisme est ancré dans certaines sociétés de la région. Sa curiosité de politologue n’en a été que plus aiguisée et il a alors fait ce que tout chercheur honnête se doit de faire quand survient un phénomène imprévu : aller sur le terrain et essayer de comprendre. Sa Chronique d’une guerre d’Orient est un livre sans prétention, rédigé comme un carnet de voyage, sur un ton personnel. L’auteur y raconte ses périples en Égypte, en Syrie, au Liban, au Qatar et dans les Émirats arabes unis où il s’est rendu à l’automne 2001, tantôt pour donner des cours ou des conférences, tantôt et surtout pour essayer de déceler l’impact de Ben Laden sur les foules arabo-musulmanes. Des témoignages à chaud Au hasard de ses rencontres, le plus souvent avec des étudiants ou des chercheurs, il tente d’analyser les sentiments qu’inspirent les États-Unis dans le monde arabe. La recherche n’est pas suffisamment poussée pour permettre des conclusions décisives, mais les conversations échangées avec ses divers interlocuteurs lui permettent en quelque sorte de prendre le pouls des populations. Et comme Gilles Kepel n’aime visiblement pas avoir tort, il constate que malgré les événements du 11 septembre, qui constitueraient une sorte de baroud d’honneur, l’islamisme est bel et bien en déclin. Après avoir été au zénith, la popularité de Ben Laden serait ainsi retombée à la suite de la débâcle des talibans en Afghanistan. Selon lui, le leader d’el-Qaëda a su jouer un temps sur le sentiment de frustration au sein des populations arabes, mais il n’a pas réussi à les garder mobilisées. Son charisme a joué pour une période donnée auprès des jeunes femmes – qui, toujours selon l’auteur, le trouvaient séduisant –, mais l’engouement serait très vite retombé et les ulémas qu’il a rencontrés, notamment en Égypte et au Qatar, ont eu un jugement assez sévère à l’égard de celui qui voulait ramener la région au Moyen-Âge. Ce qui serait la preuve, selon l’auteur, que l’islamisme est bel et bien en déclin. En annexe, Kepel publie une brève chronique d’Israël et de Palestine parue en mai 2001, dans le quotidien Le Monde. La seconde intifada avait déjà commencé, mais rien ne laissait présager la catastrophe à venir, en tout cas, nul ne voulait croire que Sharon irait si loin. Là aussi, l’auteur essaie de comprendre les structures qui régissent les territoires autonomes et tente de deviner les tendances des populations. Mais il ne pousse pas bien loin l’analyse. D’ailleurs le titre de l’ouvrage fixe bien les limites de la recherche. Une chronique n’est en effet ni un essai, ni une étude, mais un simple récit truffé d’impressions personnelles où transparaît à chaque chapitre la fascination qu’éprouve l’auteur pour le phénomène de la chaîne d’informations al-Jazira. Des témoignages recueillis à chaud, l’auteur confirme ses précédentes conclusions, l’islamisme est en voie de disparition et Ben Laden a précipité sa chute. L’Occident attire de plus en plus les populations d’Orient et les jeunes ne pensent qu’à s’intégrer... Une conclusion qui satisfait le chercheur, pas toujours l’observateur. Scarlett HADDAD
Dans son précédent ouvrage Jihad, expansion et déclin de l’islamisme (paru aux éditions Gallimard, puis Folio Actuel), qu’il avait lui-même présenté au Liban, Gilles Kepel annonçait la fin du fondamentalisme musulman. Professeur à l’Institut d’études politiques de Paris (où enseignait aussi le ministre Ghassan Salamé), Kepel connaît bien le Moyen-Orient, notamment...