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Actualités - OPINION

Polémique Les ministres eux-mêmes pensent que c’en est trop

Affectivement sensibles au sort, incertain, de leurs anciens compagnons d’armes palestiniens, certains officiels se rongent les sangs en prenant acte des joutes de cirque marginales qui mettent aux prises deux de nos trois présidents. D’autres responsables se montrent bien moins nostalgiques du Fatehland. En bons Sudistes, ils se réjouissent au contraire de la double et successive libération de leur territoire. Ils n’en avouent pas moins craindre fortement que le Liban ne finisse par payer par ricochet les derniers avatars d’Abou Ammar. Ajoutant que les galipettes centrifuges des dirigeants affaiblissent dangereusement ce pays, à un moment visiblement crucial pour cette région agitée du monde, dont il reste le ventre mou. À leur avis, il est manifeste que Sharon ne se contente pas d’une stratégie d’obstruction comme un Shamir par exemple. L’envahisseur de 82 veut, à leur sens, non seulement torpiller Oslo, Madrid et compagnie, mais aussi balayer pour de bon les Palestiniens de 48, en sus de leurs compatriotes de Cisjordanie. Ce serait donc la version inversée de Choukeyri qui parlait au début des années soixante de «jeter les juifs à la mer». Un rêve que, par un effet de miroir, les radicaux islamistes d’aujourd’hui, dignes reflets de l’extrémisme sharonien, continuent d’ailleurs de nourrir, comme en font foi leurs déclarations. Ici, comme dans les territoires autonomes, et c’est là un sujet d’inquiétude supplémentaire pour les ministres cités. Pour tout dire, ces cadres redoutent que le Liban soit entraîné dans un processus irréversible d’escalade, via les prises de position incendiaires des fondamentalistes locaux. Un piège que Sharon continue inlassablement à tenter de mettre en place, sans jamais négliger d’exploiter le filon libanais. Qui lui sert régulièrement de trampoline pour rebondir dans la provocation, chaque fois que les Américains lui mettent la pression pour réfréner sa répression en Palestine. Ainsi, lors de la première mission Zinni, Sharon avait tourné ses moyens aériens vers le Liban, y multipliant les bangs sonores et les raids simulés. Puis récemment, il a trouvé moyen d’impliquer le Hezbollah dans la nouvelle affaire de cargaison d’armes saisie à bord d’un navire. En affirmant que le lot, cadeau de l’Iran selon ses dires, était destiné aussi bien à l’intifada qu’au parti de Dieu libanais et aux camps de réfugiés du Sud. Sharon cherche de la sorte, ajoutent ces ministres, à convaincre l’Europe d’inscrire à son tour le Hezb sur sa liste noire. Et à renoncer, dans ces conditions, à l’aide économique ou financière qu’elle projette d’apporter au Liban. Et pendant que le gouvernant sioniste tisse sa toile, les dirigeants libanais se chamaillent comme des chiffonniers, en se traitant de tous les noms d’oiseaux, pour le contrôle d’un poste de directeur général, se rebellent les ministres en question. Ils se proposent donc courageusement, si l’affaire de la CNSS et consorts n’est pas réglée aujourd’hui, de dénoncer publiquement l’inconscience des protagonistes. En leur rappelant au passage que leurs passes d’armes, mal dirigées, risquent de favoriser l’implantation des réfugiés palestiniens. Sans compter le danger d’une guerre régionale, israélo-syrienne, dont le Liban serait l’épicentre. Ces ministres ajoutent que les dirigeants ne semblent pas bien réaliser ce que le 11 septembre signifie. Dans ce sens que les donnes antérieures, auxquelles le Liban officiel se raccroche, n’ont plus cours. Ainsi, pour en revenir à l’implantation, les assurances du précédent ambassadeur américain, M. David Satterfield, qui promettait le rejet définitif de cette formule sont visiblement dépassées. Il faut bien, en effet, un début de solution et cette option ferait l’affaire de toutes les parties, sauf du Liban. Où elle a quand même des partisans honteux, qui n’osent pas l’avouer, mais qui rêvent du pactole que les indemnisations nécessaires apporteraient à notre Trésor. De plus, on ne peut ignorer que si jamais Sharon devait parvenir à ses fins, c’est-à-dire pousser à l’exode les Palestiniens de Cisjordanie, de Gaza et les Arabes d’Israël en prime, une bonne moitié d’entre eux se déverserait chez nous, le reste allant en Jordanie comme en 48 ou en 67. Il faudrait donc se mobiliser, concluent ces ministres, pour contrer un tel projet. Mais les dirigeants ont la tête ailleurs. Dans les sombres nuages des foudres qu’ils échangent. Philippe ABI-AKL
Affectivement sensibles au sort, incertain, de leurs anciens compagnons d’armes palestiniens, certains officiels se rongent les sangs en prenant acte des joutes de cirque marginales qui mettent aux prises deux de nos trois présidents. D’autres responsables se montrent bien moins nostalgiques du Fatehland. En bons Sudistes, ils se réjouissent au contraire de la double et...