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Actualités - OPINIONS

Tribune - CNSS : abus de pouvoir, abus de confiance, - un fardeau socio-économique lourd

Si l’Europe doit à Bismarck le concept de la «solidarité sociale», c’est aux Français que nous devons celui de Caisse nationale de Sécurité sociale. L’Europe occidentale, sous la pression de l’Union soviétique, a élaboré d’une manière remarquable des structures sociales dans le but de contrer l’approche marxiste, de protéger la productivité de son économie et de s’assurer une prospérité jamais égalée. L’aboutissement de cette politique a été une nouvelle définition de la citoyenneté. En effet, la citoyenneté en Europe est définie par le pouvoir de bénéficier de trois types de droits : droit politique (voter), droit civique (s’exprimer, commercer librement) et droit social (subvenir à ses besoins vitaux en cas de maladie, de chômage et surtout à l’âge de la retraite, qui recule de plus en plus du fait de la longévité croissante, et de l’appartenance à la CNSS). Certes, le concept de la Caisse nationale par répartition a eu ses avatars, à cause des changements démographiques contraires, notamment la longévité des vieux et la décroissance de jeunes. Mais les politiciens ont fait leur devoir. À travers des campagnes publiques et un travail inlassable et sérieux, ils ont dessiné une politique nouvelle et trouvé des solutions. Ces solutions se basent essentiellement sur un modèle à trois piliers (répartition obligatoire, capitalisation obligatoire et capitalisation facultative avec incitation fiscale). Au Liban, a-t-on jamais entendu un parti politique évoquer une justice sociale à travers une Caisse nationale de Sécurité sociale forte et équilibrée ? Cinq fois plus cher que la moyenne mondiale A-t-on entendu un ministre avancer un projet futuriste dans ce sens ? À l’exception de Michel Moussa et de Georges Corm, qui ont pu faire avancer le décret N° 4302 et 4302 sur la retraite (3 piliers) en date du 11/10/2000 et 4/10/2000, mais dont les décisions ont malheureusement été mises en veilleuse, qui a vu des députés se pencher sur ce problème majeur ? Depuis le président Chéhab, la CNSS n’a plus évolué. Cet organisme censé représenter le filet social du pays s’est transformé en fardeau qui empêche le bon fonctionnement de l’économie et le conduit vers le fond. Quelques chiffres indicatifs : • Les frais de gestion des prestations sont de l’ordre de 16 % contre une moyenne mondiale de 3 %, soit cinq fois plus cher ! • Des employés et des cadres qui travaillent un maximum de 30 heures/ semaine avec un coût salarial de 40 000 US$/an, soit le double du secteur bancaire, et 20 à 30 % plus cher qu’en Europe ! Un scandale en matière de rentabilité. • Des heures supplémentaires à 10$/heure contre 3.5/heure dans le secteur privé. • Une augmentation annuelle des salaires fixée à 5 % (pour combler l’inflation qui frôle depuis quelques années 0 à 1 %) en plus des 3 % de compensation. Et un bonus pour compenser un retard effroyable dans les formalités ! Une générosité que même les pays les plus riches ou les plus inconscients ne peuvent s’offrir ! • Un directeur général, qui pèse autant que les membres du conseil réunis et qui manipule une machine capable d’avancer des projets extraordinaires en quelques heures, pour les occulter en une fraction de minutes. (Le conseil de 26 membres est composé de 10 membres représentant les employés, 10 représentant les employeurs et 6 représentant l’État). En résumé, un modèle exaltant à la fois d’inefficacité et d’injustice. L’essentiel n’est jamais abordé Membres du conseil de cette Caisse depuis 2 ans, mes collègues et moi-même avons travaillé avec beaucoup de sérieux, mais nous n’avons pu avancer aucun projet de reforme visant à structurer ou à moderniser la Caisse. Oui, nous avons pu forcer la direction à nous donner quelques chiffres et à imposer des vérificateurs de comptes. Ces opérations sont la plupart du temps faites à la main, non auditées et souvent contestées par la commission technique de la Caisse. Quand nous faisons appel à une étude actuarielle pour leur donner une crédibilité, l’actuaire de la Caisse, un homme qui a beaucoup de mérite, âgé aujourd’hui de 75 ans, n’est pas en mesure de répondre qu’avec des lamentations. Beaucoup de débats, des tonnes de documents, une production monumentale de futilités et de dérobades. L’essentiel n’est jamais abordé et chaque fois qu’il l’est, c’est tellement douloureux qu’on finit par s’en lasser. Exemple : la nomination de 4 jeunes technocrates pour assister le directeur général. La décision a été entérinée par le conseil depuis plus d’un an. Des candidats ont eu confiance et ont présenté leur demande. Ils attendent toujours. La direction de la CNSS considère qu’elle a les compétences et la science nécessaires, et qu’elle n’a besoin de rien sauf évidemment de multiplier des missions de conseil coûteuses comme : – De signer un contrat de 700 000 dollars grâce un prêt koweïtien pour organiser la Caisse et son système informatique. Un travail déjà fait en grande partie en 1998/1999 par une délégation française et qui n’a jamais eu de suite. – De forcer le conseil à approuver un budget de 600 millions de livres pour transférer les informations des adhérents des cartes individuelles en cartons sur le système informatique. De plus, si ces mêmes cartes – dont les informations sont incomplètes à 40% – avaient été traitées par une société privée, elles auraient coûté moins que la moitié. – Une Caisse qui refuse l’assurance médicale aux employés quand ils atteignent l’âge de la retraite, mais accorde aux chauffeurs et propriétaires de taxi des avantages invraisemblables : leurs contributions mensuelles sont de l’ordre de 33 000 LL, mais ils bénéficient de prestations mensuelles de l’ordre de 220 000 LL, en moyenne, plus l’assurance médicale et l’allocation familiale sans limite d’âge ; soit une perte sèche de 38 millions de dollars par an. Une situation alarmante La situation est alarmante. Il est important que l’opinion publique, les hommes d’affaires, les employés et les ouvriers sachent l’ampleur des dégâts. Cette Caisse devait être l’initiateur de projets de retraite moderne ; elle pourrait donner un espoir à nos jeunes qui regardent parents, frères et sœurs, atteindre l’âge de la retraite dans la misère ; elle pourrait aussi être un réservoir énorme de capitaux susceptibles d’être investis dans l’infrastructure du pays. Affirmer que nos jeunes, toutes confessions confondues, cherchent à émigrer vers les pays qui leur offrent les avantages sociaux, introuvables localement, et imputer leur départ à la seule crise économique sont inexacts. L’incompétence et la médiocrité jouent également leur rôle à cet égard. La CNSS est devenue un fardeau, un danger pour la productivité, un modèle d’insouciance, de gaspillage et d’incompétence. Elle devient clairement un obstacle à l’emploi de par son coût exorbitant et ces prestations hypothétiques, qu’il faut souvent mendier pour obtenir. Mes amis et moi-même allons continuer à nous battre pour désamorcer cette bombe sociale à retardement et nous continuerons à œuvrer pour sa réforme. Mais j’implore nos politiciens, et surtout le président de la République, le chef du Législatif et le chef de l’Exécutif, le ministre du Travail, les patrons, les employés et les citoyens de regarder vers cet instrument fondamental pour la société moderne qu’est la CNSS, et d’œuvrer pour arrêter les dégâts énormes causés par cette médiocrité. Antoine WAKIM membre du conseil d’administration de la CNSS
Si l’Europe doit à Bismarck le concept de la «solidarité sociale», c’est aux Français que nous devons celui de Caisse nationale de Sécurité sociale. L’Europe occidentale, sous la pression de l’Union soviétique, a élaboré d’une manière remarquable des structures sociales dans le but de contrer l’approche marxiste, de protéger la productivité de son économie et...