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Actualités - OPINIONS

Équité fiscale et conscience nationale

À l’heure où les premières réactions au nouveau budget se manifestent, le Centre libanais d’études publie un ouvrage collectif consacré au rapport entre le budget général et la croissance sociale. Un budget n’est jamais neutre, souligne la présentation de couverture, «il reflète les choix politiques, économiques et sociaux de l’État. Il privilégie des secteurs aux dépens d’autres, il assigne aux différentes couches sociales leurs obligations fiscales». Préfacé par l’ancien ministre Georges Corm, l’ouvrage consacre trois chapitres aux rapports entre le budget et le développement rural, les dépenses de santé et les affaires sociales. Mais ce qui retient surtout l’attention des non-spécialistes, ce sont les pages qu’il consacre «aux possibilités d’une réforme de la structure des finances publiques au Liban, dans le but de renforcer la stabilité monétaire et l’équilibre social». L’une des idées centrales, sur ce plan, figure dans les pages de présentation de l’ouvrage. Responsable du financement de l’ouvrage, le directeur de la fondation Konrad Adenauer en Jordanie et au Liban souligne que «de nouvelles recettes sont nécessaires à l’État, en particulier après la baisse des rentrées douanières, une fois que le Liban aura signé l’accord de partenariat euro-méditerranéen et adhéré à l’Organisation mondiale du commerce. Parmi les solutions possibles – à long terme –, l’adoption de la taxe sur la valeur ajoutée et la mise sur pied d’un impôt sur le revenu juste et socialement équitable. Ces deux impôts constituent la source principale des recettes de l’État en Europe». Quelques pages plus loin, Georges Corm insiste sur le fait que «la modernisation du régime fiscal ne se limite pas à l’introduction de la taxe sur la TVA. La modernisation signifie aussi la réalisation de la justice dans la distribution du poids fiscal. Au Liban, il s’agit d’une question récurrente (...) la question de la justice fiscale et celle de l’évasion fiscale des classes favorisées au Liban sont des questions fondamentales (...) il existe en effet un rapport organique entre la réforme de l’État, la justice fiscale et l’efficience budgétaire». Tout est là. C’est une question d’accès à la modernité et même d’existence. Les classes favorisées, qui sont aussi, en général, des classes instruites, les élites financières, ne peuvent pas, à la fois, vouloir l’émergence d’un Liban moderne, d’un Liban citoyen et continuer à refuser l’instauration d’un impôt sur le revenu équitable ou à pratiquer l’évasion fiscale. Le budget en cours d’examen illustre, en partie, cette contradiction. Certes, le gouvernement peut chercher à assurer des rentrées rapides et faciles, en augmentant le prix de l’essence ou des taxes indirectes faciles à collecter. Mais s’y limiter, c’est continuer de végéter au stade infantile de la conscience nationale. Seule une prise de conscience fiscale des élites pourra permettre au Liban de se hisser au niveau de modernité qu’elles constatent dans les États européens et auquel elles aspirent. C’est aujourd’hui leur responsabilité de l’assumer. Tant que cette conscience sera absente, le Liban continuera d’être un simple corridor, un couloir de passage, une résidence secondaire, un centre de villégiature. Désespérés de l’anarchie qui les entoure, les Libanais choisiront comme toujours la solution de facilité et iront payer leurs impôts aux États-Unis, au Canada ou en France, faisant ainsi l’économie des efforts et des sacrifices indispensables pour avoir leur propre identité et leur propre patrie.
À l’heure où les premières réactions au nouveau budget se manifestent, le Centre libanais d’études publie un ouvrage collectif consacré au rapport entre le budget général et la croissance sociale. Un budget n’est jamais neutre, souligne la présentation de couverture, «il reflète les choix politiques, économiques et sociaux de l’État. Il privilégie des secteurs aux...