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Actualités - REPORTAGES

CONFÉRENCE - Onze pour cent des petits Libanais sont asthmatiques - Pollution de l’air : menace pesante sur la santé des enfants

Si la pollution de l’air nous affecte tous, sans exception, agissant sur notre santé et dégradant notre qualité de vie, elle fait des ravages particulièrement chez les populations les plus jeunes. Les derniers chiffres disponibles au Liban font état d’un nombre d’asthmatiques qui atteint les 11 % chez les enfants. Or ceux-ci sont particulièrement vulnérables à la pollution ambiante, qu’elle soit extérieure ou intérieure. Les infections se multiplient et s’éternisent. Ces informations, et bien d’autres, ont été données par le Dr Pierre Majdalani, spécialiste des maladies respiratoires de l’enfant à l’Hôpital Saint-Georges, lors d’une conférence qu’il a donnée à Ninar, espace culturel libanais. Le Dr Majdalani a traité des causes de la pollution, de sa gravité dans le Liban d’aujourd’hui, de son incidence sur les troubles respiratoires et de la conduite à tenir lorsque la pollution atteint des degrés insupportables. C’est un « tableau noir» de la pollution et de ses incidences sur la santé que dépeint le Dr Majdalani au cours de son intervention. Dans le monde, les victimes se comptent par millions. «La pollution est responsable d’affections graves, troubles respiratoires, asthme, affections pulmonaires obstructives chroniques, maladies cardio-vasculaires et cancers des poumons, principalement», indique-t-il. Il ajoute : «L’effet de la pollution de l’air dépend du niveau d’exposition et de la sensibilité de la population exposée. Les personnes qui souffrent de problèmes respiratoires tels que l’asthme, de même que les très jeunes enfants et les personnes âgées, sont particulièrement menacés». On estime à non moins de 3 millions les décès causés chaque année par la pollution atmosphérique, soit 5 % des 55 millions de décès annuels dans le monde (vu la marge d’incertitude, le nombre réel pourrait se situer entre 1,4 et 6 millions). «Les études mettant en valeur la corrélation entre taux de mortalité et concentration de particules de faible dimension dans l’air (celles qui trouvent leur chemin vers les poumons) sont nombreuses», poursuit le Dr Majdalani. «Quelque 30 à 40 % des cas d’asthme et 20 à 30 % des cas d’affections respiratoires peuvent être liés à la pollution atmosphérique dans certaines populations». Par ailleurs, la pollution peut être extérieure comme elle peut survenir à l’intérieur des locaux, avec un risque d’infections respiratoires accru (une des principales causes de mortalité infantile et juvénile dans les pays en développement, entre un demi-million et un million de décès excédentaires en Asie chaque année). Par ailleurs, «l’exposition à la fumée de tabac ambiante accroît de 20 à 30 % la mortalité des adultes non fumeurs par cancer de poumons». Que dire alors des enfants ? Pour en revenir à l’asthme chez les petits, il s’agit du trouble chronique le plus fréquent. Même aux Etats-Unis, il est en augmentation par rapport aux années 80, faisant 5 000 morts par an et causant 466 000 hospitalisations qui coûtent au pays 6 milliards de dollars. Au Liban, la proportion d’enfants asthmatiques est estimée à 11 %. «Ces troubles sont aggravés par la pollution, extérieure et intérieure, par une mauvaise prise en charge ou par un manque d’éducation ou d’informations, souligne le Dr Majdalani. Les études épidémiologiques à court terme ont montré que la pollution de l’air peut être responsable de symptômes tels que toux et sifflements chez les asthmatiques. Les effets à long terme sur la santé de l’exposition à des taux modérés de pollution restent mal connus». Plus encore que les crises d’asthme, ce sont les infections exacerbées par un environnement pollué qui font de grands dégâts. «Nous avons remarqué cette année un grand nombre d’infections de longue durée chez les patients», indique-t-il. Quant à une possible corrélation entre pollution et allergie, ce problème n’a pas encore été résolu. «On sait que les facteurs génétiques, c’est-à-dire congénitaux, sont des déterminants importants, mais que les facteurs de l’environnement jouent un rôle primordial dans la survenue et la sévérité des maladies allergiques», dit-il. Par ailleurs, il faut noter que la tendance à l’allergie demeure très fréquente (75 à 80 %) chez les jeunes asthmatiques. 580 millions pour limiter les dégâts ? L’intervention du Dr Majdalani n’a pas manqué de conseils sur le comportement à adopter face aux aggravations de problèmes sanitaires dues à la pollution atmosphérique. Il fait remarquer que «si la pollution ne crée pas de nouvelle maladie respiratoire, elle peut déclencher des poussées de bronchite chronique ou d’asthme chez les patients déjà malades». «La plupart des insuffisants respiratoires se sentent moins bien en hiver quand l’oxyde d’azote (NO2) augmente, et en été quand la proportion d’ozone dans l’air s’accroît», explique le spécialiste. «En cas de pollution estivale, il faut aérer les maisons la nuit, au petit matin ou le soir, garder les fenêtres fermées le jour, sortir le matin et en soirée, mais pas aux heures chaudes, éviter les efforts, marcher lentement, augmenter éventuellement le traitement de fond». Et en cas de pollution hivernale ? «C’est la pollution automobile qui constitue le plus grand risque», fait-il remarquer. «Il faut sortir aux heures creuses, ne pas fumer en automobile tout en aérant régulièrement le véhicule, puisque la pollution est surtout concentrée à l’intérieur des voitures. Il ne faut pas oublier que la fumée de tabac et la pollution de la maison sont les risques principaux à redouter chez l’asthmatique et l’insuffisant respiratoire». Parmi les irritants : le tabagisme passif, la pollution atmosphérique, les pulvérisateurs, les parfums, l’odeur de peinture… À éviter donc autour d’un asthmatique. Autre ennemi à abattre, les acariens, ces animaux microscopiques qui se multiplient à l’intérieur des maisons et dont on respire des milliers. Autre irritant pour les personnes sujettes aux allergies : le pollen, qui peut susciter des crises au printemps. «Dans ce cas, il faut augmenter le traitement de fond selon les indications de l’allergologue, faire attention au sport en plein air, à la tonte du gazon, aux promenades exposées», précise le Dr Majdalani. «Il faut aussi, dans tous les cas cités précédemment, assurer un suivi médical, exercer la prévention, mais aussi contrôler son environnement (si besoin en est, enlever la moquette, arrêter de fumer…)». En réponse à une question, il confirme qu’il existe une relation entre le déclenchement des crises d’asthme et certains sports, notamment la course de fond et l’équitation (le cheval pouvant causer des allergies). Il convient, de toute évidence, d’éviter les animaux domestiques en présence d’enfants asthmatiques. Au cours de la discussion qui a suivi la conférence, l’accent a été mis sur la gravité devenue intolérable des taux de pollution dans le pays, sans qu’une action efficace du gouvernement n’ait encore été déclenchée pour limiter les dégâts. Il faut dire que le Dr Majdalani a exposé des chiffres reflétant des estimations de ce que devrait coûter la réhabilitation écologique dans le pays, d’après ses recherches. Il a ainsi été estimé que 580 millions de dollars devraient être dépensés pour diminuer les effets de la pollution : 240 pour les zones côtières, 183 pour les ressources hydrauliques, 18 pour l’adaptation des industries, 6 pour le reboisement et 45 pour le traitement des sols. Les participants à la table ronde ont enfin convenu de l’intérêt de la mise en place d’un plan d’action pour des campagnes de sensibilisation auprès de la population, auprès des écoles notamment, et des compagnies d’assurances qui refusent encore de couvrir les frais de traitements aussi fréquents. L’idée d’un comité pluridisciplinaire a été lancée, qui aurait à charge de collecter les informations et les expertises et de faire pression sur les autorités.
Si la pollution de l’air nous affecte tous, sans exception, agissant sur notre santé et dégradant notre qualité de vie, elle fait des ravages particulièrement chez les populations les plus jeunes. Les derniers chiffres disponibles au Liban font état d’un nombre d’asthmatiques qui atteint les 11 % chez les enfants. Or ceux-ci sont particulièrement vulnérables à la...