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Actualités - CHRONOLOGIES

CONCERT - Église Saint-Joseph – Achrafieh - Orchestre symphonique national libanais : - trémolos, pizziccati et vibratos

Entre les trémolos des violons, les chatoyances orchestrales et le vibrato vocal d’une soprano, l’Orchestre symphonique national libanais, placé sous la houlette de Harout Fazlian, termine en beauté la saison avant la ruée du public vers les festivals en dehors de la capitale. Salle archicomble, comme d’habitude mais dans une chaleur étouffante et où le public, un peu turbulent ce soir-là, s’éventait nerveusement avec les cartons d’invitation… Au programme, somptueux et dosé dans ses mélanges, des pages de Bizet, Sarasate, Saint-Saens, Bellini, Ciléa, Puccini, Giordano et Ravel. Ouverture, un peu courte, comme un hommage à la liberté, au grand air et à la sensualité de l’été, avec la suite n°1 de Carmen de Bizet. Signes avant-coureurs et annonciateurs d’un drame rouge sang. Sur fond de percussions, d’airs entrainants à l’espagnole et dans l’agitation grandiloquente et vive d’une musique en fanfare se déploie ce prélude ensoleillé. Changement d’atmosphère avec le Zigeunerweisen pour violon et orchestre du virtuose de la «boîte magique». De Pablo Sarasate donc avec le violon qu’on empoigne à bras le corps, cet instrument de l’errance, une œuvre aux trémolos déchirants, langoureusement «langsam» avec de superbes effets «czardas» pour finir dans une éblouissante volubilité doublée d’une infernale vélocité. À l’archet, pour cette œuvre incantatoire et habitée d’une vie brûlante et enflammée, Ondin Brezeanu. Toujours omniprésence du violon, avec cette fois aux commandes Cesar Iesanu, interprétant dans un registre plus doux et romantique, le célébre Introduction et rondo cappricioso de Camille Saint-Saens. L’ombre de Sarasate plane toujours sur ces pages où le rôle du violon est d’une capitale importance dramatique. Non seulement élégance suprême de la forme mais idées mélodiques claires et d’inspiration diverse régissent cette narration aux harmonies qui ne manquent ni d’ingéniosité, ni d’imprévu ni même souvent de piquant. Justesse d’une expression aux sentiments forts et interêt évident de l’orchestre pour cette œuvre toute en subtiles nuances de l’auteur de Samson et Dalila. Airs connus, à la fois chavirants et sautillants faisant face aux grandes vagues de colère d’un orchestre aux grands emportements surtout pour une finale en apothéose. Conclusion de la première partie du programme avec Navarra où les violons (Ondin Brezeanu et Cesar Iesanu s’harmonisent dans une authentique joute) et l’orchestre «ferraillent» sur une inspiration explosant de joie et de vitalité de Sarasate. Dans les tourbillons et les froufrous d’une valse viennoise se diluent les impétuosités d’une œuvre au souffle ravageur. Monde sonore «séraphique» après l’entracte avec Penny Pavlakis arborant une robe longue aux tons roux telle une héroïne verdienne. Farouche nationalisme, intermittences du cœur, imprécations et plaintes d’une amoureuse, craintes et angoisses de la solitude, éloge de l’art tel est le tableau sonore qu’offre (avec probablement un choix précis des thèmes chantés) Penny Pavlakis en appui à «la libération du sud». Cantatrice à la carrière euro-australienne et dont on a déjà applaudi les prestations aux métissages «épicés», Penny Pavlakis qui s’est entre-temps parfaitement «libanisée», donne là toute la rigueur et la discipline d’une performance belcantiste aux accents justes et sobres. Ferventes, vibrantes, douces comme un soupir qu’on exhale telle une prière sont les premières mesures de Casta Diva de la Norma de Bellini. Justement ardente prière à la chaste déesse par une grande prêtresse d’un temple druitique pour conjurer le malheur et sauvegarder une nation c’est ainsi que se présente cette superbe aria, une des plus admirés du repertoire soprano. Dévotion absolue à l’art et humilité d’Adrienne Lecouvreur (de Ciléa) dont le talent de comédienne ne cède pas à la vanité devant les compliments qui l’assaillent de la part d’un public enthousiaste et exalté. «Io son l’umile ancella», leitmotiv qui réapparaît tout au long de l’œuvre comme un thème – emblème d’Adrienne Lecouvreur qui déclare en toute modestie n’«être que la servante de l’art». Stridences et accents pucciniens audacieux avec une Manon Lescaut, seule, perdue et abandonnée aux confins de la Nouvelle-Orléans. L’héroïne de l’Abbé Prévost exprime avant de mourir, son angoisse et son désespoir dans une aria bouleversante. Pour terminer, encore du tragique sur fond de révolution française avec la mamma morta d’André Chenier de Giordano. Description détaillée de l’horrible mort de la mère de Madeleine, brûlée vive dans sa maison que la foule avait incendiée. Accents poignants et mélodie grave qui ont soulevé les applaudissements intempestifs du public. En bis, la cantatrice a offert à l’auditoire un passage teinté d’une grande émotion de La Tosca de Puccini. Retour à un flamboyant morceau orchestral, incendiaire et aux sortilèges multiples : le Boléro de Ravel. Battant inlassablement la mesure, insistant, coloré, incandescent, sensuel, faussement répétitif, incantatoire ce Boléro qui se déploie tel un paon faisant la roue, va en s’enflant, dans un étourdissant éclatement final, comme une deferlante à qui rien ne saurait résister… Joie explosive du public (et des musiciens !) pour une très longue «standing ovation».
Entre les trémolos des violons, les chatoyances orchestrales et le vibrato vocal d’une soprano, l’Orchestre symphonique national libanais, placé sous la houlette de Harout Fazlian, termine en beauté la saison avant la ruée du public vers les festivals en dehors de la capitale. Salle archicomble, comme d’habitude mais dans une chaleur étouffante et où le public, un peu...