Rechercher
Rechercher

Actualités - CHRONOLOGIES

FESTIVAL AL-BUSTAN - I Fiamminghi : la liberté, de Prague à Buenos Aires

La musique de chambre n’est plus ce qu’elle était… À écouter les I Fiamminghi, en droite ligne des Flandres, les intonations sont toujours dans les tons feutrés, les passions tamisées, les colères esquivées, les fureurs domptées, les mélancolies masquées mais les audaces sont peut-être dans la programmation et le métissage de l’inspiration et des instruments de musique. Un monde sonore riche où la rigueur du classique se mêle aux éclats syncopés et sensuels de la modernité. Au menu fort concis (mais réservant d’agréables surprises de scène en dernière minute !) deux œuvres seulement : des pages de Dvorak et Piazzola (quelle conciliation) d’une grande éloquence musicale. Des partitions absolument différentes d’horizon, d’exécution, de rythmes et de narration, avec des compositeurs qui n’ont rien de commun si ce n’est la grande beauté et originalité de leur musique. Ouverture avec la quintette à cordes op 77 de l’un des plus illustres compositeurs tchèques, Anton Dvorak. Longue narration en quatre mouvements (allegro, scherzo, andante et finale) écrite en 1875 et publiée un an plus tard à Berlin. Lyrique et pittoresque quintette où tout est conduit naturellement avec des modulations simples sur un fond de certaines stridences maîtrisées. Comme son compatriote Smetana, ce Praguois, farouche défenseur des valeurs nationales, s’attache à créer un art traversé certes d’une sève enivrante mais surtout battant pavillon de la Bohême loin des influences allemandes et italiennes qui prévalaient à cette période. Après l’entracte, changement d’atmosphère et de paysage musical avec le… tango ! Tango pour quintette à cordes et bandonéon (placé en pleine lumière grâce à l’immense talent ici de Juan José Mosalini qui, comme avant goût, a offert d’abord au public un brillant solo) d’Astor Piazzolla. Musicien argentin génial (le mot n’est guère fort !), ayant vécu à New York, influencé par le jazz, il est celui qui a mis le soleil et le spleen de Buenos Aires et une certaine sensualité des nuits veloutées argentinoises dans les notes chargées d’un «strass» particulier des troublants «tango» transformés brusquement en authentiques morceaux d’anthologies des grandes et fatales «langueurs» des rives latino-américaines. On écoute ici justement ce «tango» d’une facture de pièce classique sanglé dans un habit neuf où, par-delà un doux métissage, les archets engagent un déconcertant dialogue avec un bandonéon volatilement volubile et singulièrement nostalgique dans ses souffles et soufflements avant de fusionner ensemble dans un délicieux discours où s’égrènent probablement des souvenirs baignés de moments heureux. À savourer comme un cocktail exotique, légèrement parfumé et corsé et à la fois tonique et rafraîchissant. Et surprise de l’inattendu, l’auditoire encore sous le charme de ce bandonéon aux modulations sinueuses comme un serpentin, a eu droit à une suite d’œuvres, tel un hommage à Piazzolla, intitulées Mélodia en la mineur, Tristesse en double A, un extrait d’opéra, Ovidium et pour conclure Liberté un des airs les plus célèbres de l’un des plus illustres élèves de Nadia Boulanger. De la rigueur classique à la sensualité latino-américaine, de l’esprit folklorique tchèque aux capricieuses fantaisies du jazz, de Prague à Buenos Aires, la liberté, telle la houle des mers, avait d’irrépressibles et impavides élans de conquête et de séduction.
La musique de chambre n’est plus ce qu’elle était… À écouter les I Fiamminghi, en droite ligne des Flandres, les intonations sont toujours dans les tons feutrés, les passions tamisées, les colères esquivées, les fureurs domptées, les mélancolies masquées mais les audaces sont peut-être dans la programmation et le métissage de l’inspiration et des instruments de...