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Actualités - OPINIONS

Phoner français

Nous étions francophiles. Précédés par le Liban chrétien, les musulmans, alignés sur les pays arabes retournés par de Gaulle, surtout après la fin de la guerre d’Algérie, regardèrent vers cette puissance moyenne autrefois honnie qui devenait politiquement précieuse, culturellement féconde, économiquement intéressante. On connaît la question. La France aima les Arabes – d’un amour bien calculé –, les Arabes aimèrent la France – d’un amour antiaméricain. Bref, entre le deux continents, les deux cultures, ça baignait. Ça baigne encore mais... mais entre-temps, on nous a faits francophones. Francophones, c’est à dire... mais qu’est-ce à dire à la vérité ? Les pays francophones sont par définition ceux qui «phonent» le français, partiellement ou entièrement, selon les critères de l’institution aujourd’hui présidée par Boutros Boutros- Ghali. Qui donc le parlent, bien ou mal. 55 pays, dont la solidarité ne coule pas de source. ...Moi, par exemple, je préfère parler français qu’être francophone : ceci n’est absurde qu’en apparence. Ce n’est pas seulement parce que je n’ai pas le goût des «clubs», c’est parce que la francophonie officielle est une instance politique qui ne me regarde pas, et un méli-mélo culturel dont le niveau, jusqu’ici, n’échappe pas à une médiocrité dont un pays comme le Liban par exemple, a déjà son content. Je rêve parfois qu’une France mécène envoie des escouades à Beyrouth (ou à Hanoi, pour prendre un cas extrême) vouées à consolider et perfectionner la langue française, par pur goût de sa propre culture. Rêve idiot, mais, qui a son origine dans la contemplation d’une agence qui se veut culturelle (et technique) mais dont la vocation politique prend la forme d’une colonisation sans panache. Plutôt que de faire de la francophonie officielle l’instrument de sa politique étrangère, comme la France réussirait mieux dans un «bilatéralisme» bien entendu. Évidemment, elle n’est pas assez riche pour l’étendre à 55 pays. Alors tant pis. Nous resterons des partiellement francophones, dans un Liban où ceux qui enseignent la langue française et ceux qui l’apprennent rivalisent d’insuffisances. Alors, on me répondra qu’en y mettant le prix, on peut ventiler les petits dans les quatre ou cinq écoles élitaires que vous connaissez. Oui. Oui, je suis pour la France et contre la francophonie. Et si vous y voyez une contradiction, c’est qu’elle existe. Mais elle ne fait que refléter la nature des choses. Amal NACCACHE P.-S: Bien sûr, la présence de Boutros Boutros-Ghali à la tête de l’organisation francophone laisse espérer le changement. Mais la machine est bien lourde, bien rouillée...
Nous étions francophiles. Précédés par le Liban chrétien, les musulmans, alignés sur les pays arabes retournés par de Gaulle, surtout après la fin de la guerre d’Algérie, regardèrent vers cette puissance moyenne autrefois honnie qui devenait politiquement précieuse, culturellement féconde, économiquement intéressante. On connaît la question. La France aima les Arabes...