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Actualités - CHRONOLOGIE

Réfugiés palestiniens - Le Cedroma examine les moyens de lutter contre l'implantation Une diplomatie active pour sortir de l'impasse

Avec le début des négociations israélo-palestiniennes sur le statut final des territoires, le projet d’implanter les Palestiniens au Liban est devenu une menace pressante. C’est d’ailleurs parce que les Libanais en sont conscients que, depuis quelques mois, ce thème est au cœur de l’actualité, sur fond de dissensions avec les arafatistes. Le directeur du Cedroma (Centre d’études des droits du monde arabe, rattaché à l’USJ), le Pr Fayez Hage-Chahine, a voulu provoquer une réflexion en profondeur en organisant un colloque sur les moyens juridiques, diplomatiques et médiatiques permettant de lutter contre l’implantation. Le président du Conseil Sélim Hoss a réaffirmé la position officielle du Liban alors que l’ancien président de la Chambre Hussein Husseini, mais aussi les anciens ministres Nasri Maalouf et Fouad Boutros et les professeurs Éric Canal-Forgues, Nassif Hitti, Farid Khazen, Salaheddine Dabbagh, Mohamed Majzoub et Jacques el-Hakim ont essayé de présenter des solutions concrètes. Conclusion : la situation est grave, mais non désespérée, à condition de savoir utiliser les textes juridiques et de mener une campagne diplomatique active. Le premier élément qui se dégage des multiples interventions hier, c’est que le rejet de l’implantation fait désormais l’unanimité au Liban. Et c’est le président du Conseil sunnite (alors que, pendant les années de guerre, cette communauté avait considéré les Palestiniens comme «son bras armé») qui l’a annoncé officiellement. Le Pr Farid Khazen a relevé que cette unité nationale renforce la position libanaise, même si elle insuffisante pour convaincre la communauté internationale. Le second élément est moins évident mais montre l’étendue du fossé actuel entre les Palestiniens et les Libanais. Les présidents des séances ont fait preuve de vigilance pour éviter que le débat ne se transforme en invectives réciproques… En termes clairs, le Dr Sélim Hoss a déclaré que le Liban rejette l’implantation dans son propre intérêt et dans celui des Palestiniens. S’il refuse de participer à la conférence multilatérale sur les réfugiés, c’est parce qu’elle ne s’occupe que des conditions humanitaires des réfugiés sans évoquer leur retour. Par contre, le Liban se sent concerné par les négociations entre l’Autorité palestinienne et Israël et il n’acceptera pas une solution contraire à ses principes. «Ce qui est à l’étude actuellement, c’est un compromis, non une paix, a déclaré le Dr Hoss. Celle-ci n’est possible que si elle assure la stabilité dans la région qui passe par le règlement du problème des réfugiés palestiniens.» Le président Hussein Husseini a insisté sur le fait que le rejet de l’implantation est prévu dans le préambule de la Constitution, au même titre que l’entente nationale. Dans son allocution, le Pr Jacques el-Hakim (de la Faculté de droit de Damas) a toutefois rappelé que la Constitution d’un pays n’engage que celui-ci et n’a pas une valeur impérative pour les autres États. Position nuancée par l’ancien ministre Fouad Boutros qui a précisé que la Constitution entraîne des obligations morales pour les autres pays, d’autant que la nouvelle Constitution a obtenu l’aval de la communauté arabe et internationale après Taëf. M. Husseini a rappelé que l’implantation signifie priver les Palestiniens de leur identité, de leur volonté et de leur droit légitime au retour sur leur sol. «Les garder au Liban n’est qu’une façon de déplacer le problème, tout en donnant l’illusion de le résoudre, conformément à la volonté israélienne». Le Pr Mohamed Majzoub a commencé son intervention en affirmant que le rejet de l’implantation vient un peu tard. Le Liban, selon lui, aurait dû l’évoquer lors de la conférence de Madrid, d’autant que, depuis, plusieurs milliers de Palestiniens ont été naturalisés. L’ancien vice-président du Conseil constitutionnel a émis la crainte que ce sujet ne devienne un produit pour la consommation interne libanaise alors qu’il résume l’essence du conflit israélo-arabe. Le Pr Jacques el-Hakim du barreau de Damas a exposé avec beaucoup de réalisme les intérêts qui dictent actuellement les décisions de la communauté internationale, où la loi du plus fort tient lieu de droit. Il a toutefois conclu sur une note optimiste en rappelant que la foi peut encore déplacer les montagnes et il a appelé les Libanais à s’accrocher à leur sol. En d’autres termes, il a émis le souhait que les Libanais cessent d’émigrer car, la nature détestant le vide, ils seront vite remplacés par ceux qui occupent les lieux… Me Salaheddine Dabbagh (libanais d’origine palestinienne) a déclaré que l’implantation n’est que l’aspect négatif du droit au retour des Palestiniens. Il a ajouté qu’Israël cherche à transposer le conflit entre les Arabes, comme si l’implantation est un problème entre les Libanais et les Palestiniens. Il a insisté sur la nécessité d’une coopération entre les Libanais et les Palestiniens, comme ce fut le cas lors de l’affaire Marj el-Zouhour, en 1992, lorsque Israël a été contraint à reprendre les Palestiniens qu’il avait expatriés vers le Liban. Le Pr Éric Canal-Forgues, de l’Université Paris V, a dressé un inventaire des décisions internationales qu’il s’agisse de chartes, de pactes, de résolutions ou de conventions reconnaissant le droit au retour des réfugiés sur leur sol, précisant toutefois que les résolutions 242 et 338, à travers lesquelles on aborde actuellement le problème des réfugiés, ne prévoient «qu’une obligation de négocier de bonne foi un accord permanent». De même, le traité de paix israélo-jordanien évoque «des négociations visant à résoudre le problème des réfugiés conformément au droit international», sans plus de précision. Est-ce à dire qu’il n’y a rien à faire et que l’implantation est une fatalité ? MM. Fouad Boutros, Nasri Maalouf, Nassif Hitti et Farid Khazen ont affirmé le contraire, prônant l’adoption d’une diplomatie active qui s’adresse à la fois à la communauté internationale et aux capitales arabes influentes, tout en maintenant une coordination étroite avec la Syrie, a précisé M. Boutros, car, dans un sujet aussi crucial, il ne faut pas être un acteur isolé. Boutros a suggéré la possibilité de trouver un terrain de communication avec l’Autorité palestinienne «afin d’éviter les accrochages» tout en reconnaissant que c’est difficile. M. Boutros a ensuite précisé, à travers quelques exemples, que la communauté internationale n’est pas très sensibilisée au problème que représente l’implantation des Palestiniens mais il a ajouté que le Liban ne peut s’accommoder d’une solution boiteuse qui mettrait en danger sa cohésion, voire son existence. Il doit donc mettre l’accent sur le fait que l’éclatement du Liban constitue une menace pour la stabilité de la région, d’autant que les réfugiés pourraient devenir difficilement contrôlables et constitueraient une bombe à retardement. M. Hitti a été encore plus loin, évoquant la nécessité de miser «sur la diplomatie populaire» qui fait appel à toutes les composantes de la société, notamment les ONG pour mobiliser la communauté internationale. Bref, rien ne doit être négligé pour tenter de faire pression sur «ceux qui cherchent à refaire la carte du monde». Car, de l’avis de tous les intervenants, il ne suffit plus d’invoquer un droit pour qu’il soit reconnu…
Avec le début des négociations israélo-palestiniennes sur le statut final des territoires, le projet d’implanter les Palestiniens au Liban est devenu une menace pressante. C’est d’ailleurs parce que les Libanais en sont conscients que, depuis quelques mois, ce thème est au cœur de l’actualité, sur fond de dissensions avec les arafatistes. Le directeur du Cedroma (Centre...