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Actualités - ANALYSE

Vers une fiscalité alourdie Le pouvoir traduit en chiffres sa volonté de changement

Un ministre informé – ils ne le sont pas tous – révèle, qu’après réflexion, le gouvernement a décidé de traduire sa volonté en chiffres dès cette année. Initialement, il était prévu, en effet, de concocter rapidement un budget quelconque, en base des travaux préparatoires effectués sous le précédent régime par les services qualifiés, pour laisser les théories financières du pouvoir s’exprimer à partir de l’an 2000. Mais «l’évolution de la conjoncture», entendre sans doute le fiasco des premières tentatives de réforme administrative, oblige le camp loyaliste à se rabattre sur le budget pour reprendre l’initiative politique. Et pour prouver à l’opinion qu’il s’en tient fermement à ses plans d’assainissement général comme de redressement économique. Donc, comme le chef de l’État l’a confirmé, il y a quelques jours, il n’est plus question d’un budget de routine. Certains parlementaires partisans de l’équipe en place expliquent ce revirement par la nécessité de donner un coup de fouet à une économie nationale languissante. Une justification qui fait un peu sourire nombre d’économistes. «Ce n’est pas d’aujourd’hui, souligne l’un d’eux, que l’économie va mal et il n’a certainement pas fallu deux mois aux responsables pour s’en rendre compte. De plus, au stade actuel, aucune mesure budgétaire ne peut redonner de l’allant à une économie qui dépérit à cause, notamment, du trop lourd endettement du pays et de l’immobilisation de ses ressources financières magnétisées par les bons du Trésor». Le facteur temps Et d’ajouter que «le gouvernement fait très bien d’entamer dès maintenant la correction de trajectoire, qui prendra plusieurs années. On ne le lui reproche certainement pas. «Mais il ne doit pas laisser des politiciens loyalistes, mal éclairés, aller raconter partout que les innovations budgétaires vont remettre en branle dès cette année l’économie nationale». Cet expert veut bien «croire que des efforts vont être déployés pour réduire les dépenses improductives de l’État, juguler le gaspillage, la gabegie, la corruption et, en même temps, augmenter les recettes par divers moyens. «Mais il serait à la fois démagogique et contradictoire de soutenir qu’on va sérieusement mettre sur rails les projets de développement ou de réhabilitation des régions dites déshéritées, sous le double prétexte de leur venir en aide et de dynamiser l’économie nationale. «C’est là, en effet, une enveloppe si lourde que jamais l’État, malgré ses engagements formels dans ce sens, malgré les lois votées et les décrets promulgués, n’a jamais pu l’assumer. En outre, l’économie nationale étant grosso modo centralisée, un effort considérable dans les zones périphériques ne saurait la ranimer vraiment. «La crédibilité certaine, le capital de confiance dont bénéficie le nouveau pouvoir vont leur être utiles, enchaîne cette source. Il leur faudra en effet inévitablement annoncer des mesures qui font mal, qui seront impopulaires, pour essayer d’alléger le déficit budgétaire et freiner la hausse de la dette publique par de meilleures rentrées fiscales et douanières. En effet, l’amélioration de la perception, qu’on nous promet aussi, ne suffirait pas. D’ailleurs, on peut se demander si, malgré toute l’autorité dont il fait montre, le nouveau pouvoir peut réussir à mettre vraiment à contribution des régions ou des fractions qui ne paient ni l’eau ni l’électricité». L’essence De son côté, une personnalité proche du gouvernement indique que «le président Hoss, dont les convictions sociales restent fermes, aurait voulu, tout comme M. Nasser Saïdi, ministre de l’Économie, qu’on évite le recours à de nouveaux impôts et à des surtaxes. D’autant que cela affecterait également le mouvement d’investissements. Mais le ministre des Finances, M. Georges Corm, leur a présenté des arguments irréfutables prouvant qu’on ne pourra pas faire autrement que de demander des sacrifices aux Libanais, contribuables ou consommateurs. M. Corm a en effet étudié la situation financière du pays sous les moindres de ses aspects. Et il a trouvé qu’il est tout à fait nécessaire de mettre en place un système fiscal modernisé, c’est-à-dire alourdi, même si cela devait provoquer une grogne d’autant plus généralisée que la base de contribution sera élargie. C’est-à-dire que les nouveaux impôts toucheront encore plus de gens. Sur le plan des réalités socio-politiques, le gouvernement pense être en mesure de juguler le mécontentement, en raison du soutien de la présidence de la République dont le prestige contribuera à contenir l’opinion. De même, le Cabinet mise, pour réussir à faire passer ses mesures sans trop de remous au niveau de la rue, sur un fort appui de la Chambre. Ce qui ne serait peut-être pas le cas si on devait renvoyer ces dispositions fiscales à l’an prochain. Car on serait alors proche des législatives et les députés ne voudraient pas soutenir des mesures impopulaires qui affaibliraient leurs chances de se faire réélire». Il reste à savoir si vraiment les projets gouvernementaux vont être appliqués sans secousses, sans fortes réactions. Surtout qu’on laisse entendre de tout côté que, parmi les joyeusetés promises, les 20 litres d’essence seraient renchéris de 3 000 LL. Pour faire passer la pilule, les loyalistes soutiennent qu’on fait un cadeau aux Libanais car l’augmentation de l’essence aurait dû aller jusqu’à 5 000 LL. Ils ajoutent, en oubliant que toute surtaxe indirecte est socialement discriminatoire et injuste, que les consommateurs libanais peuvent assumer sans trop de mal cette différence de 3 000 LL. Et ils ajoutent qu’elle n’affectera pas d’une manière sensible le marché et ne provoquera pas de flambée des prix. Ce qui reste à voir. Même si, comme l’affirme ce loyaliste, «les Libanais veulent bien consentir des sacrifices, une fois qu’ils ont confiance, ce qui n’était pas le cas sous le précédent régime».
Un ministre informé – ils ne le sont pas tous – révèle, qu’après réflexion, le gouvernement a décidé de traduire sa volonté en chiffres dès cette année. Initialement, il était prévu, en effet, de concocter rapidement un budget quelconque, en base des travaux préparatoires effectués sous le précédent régime par les services qualifiés, pour laisser les théories...