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Actualités - REPORTAGES

Les laissés-pour-compte de la fête

Ni cadeaux, ni roses rouges, ni dîner aux chandelles, ni carte de vœux, ni e-mail... Rien. Les célibataires ce week-end resteront seuls sans être, pour autant, esseulés. L’amour, ils l’ont connu peut-être, les déboires amoureux aussi. Des Valentins et des Valentines, ils en ont trop vu. C’est donc sans aucun regret ou vague à l’âme qu’ils passeront, en célibataire, la soirée de la saint Valentin. Certes ils n’auront pas la meilleure table du restaurant ce soir, mais qu’importe. Ils peuvent aussi se contenter de rester devant la télévision et rêver devant les films à l’eau de rose. Ils peuvent tout se permettre... à condition de garder la forme. Myriam (27 ans) évoque les trois Saint-Valentin qu’elle a vécus en amoureuse. «Au cours de l’une de ces rares soirées, à minuit exactement, j’ai été prise par une poussée de fièvre», dit-elle. Ce n’était malheureusement pas la fièvre de l’amour mais bel et bien le début d’une infection rénale. Elle se rappelle également une soirée amoureuse au restaurant : «On devait sortir en tête à tête; arrivés à destination, nous avions une dizaine de nos amis à table», indique-t-elle. Rita, se souvient qu’un soir de la saint Valentin, son amoureux l’a invitée à l’un des restaurants les plus chics de la ville. «La carte arrivée, il a commencé à vanter les mérites d’une omelette, le plat le moins cher du menu», note-t-elle. Un célibataire raconte qu’un soir de fête, il lui a été impossible de trouver des roses rouges. «Le stock était épuisé chez plus de trois fleuristes». «Mais c’était un signe du ciel, il fallait que je la quitte», se hâte-t-il de souligner. Les signes du ciel ? Ces célibataires n’ont que ce recours. Ils savent que les miracles n’arrivent qu’aux autres. Pour eux, le destin réserve autre chose. Une célibataire évoque la soirée du 14 février 1989 (premiers accrochages entre l’armée du général Aoun et les Forces libanaises). «Les routes étaient bloquées à ma sortie d’un cinéma d’Achrafieh à minuit, et ce n’est que plusieurs heures plus tard que je suis parvenue à rentrer chez moi», dit-elle. Le premier cadeau de Myriam était un ballon en forme de cœur. «Dès que je l’ai tenu entre mes mains, il s’est dégonflé», déclare-t-elle. Léa, 26 ans, indique : «Il y a quelques années, l’un de mes amoureux, agressif par nature, s’est énervé le soir de la Saint-Valentin». Il a tout simplement déversé sa rage sur le bouquet de roses rouges qu’il venait de lui offrir. «Ces roses aux tiges cassées, et aux pétales éparpillés me porteront toujours malheur», dit-elle écœurée. En tout cas, la soirée de la Saint-Valentin est souvent cause de rupture. À force de penser à l’amour pur et dur, véhiculé par toutes les pubs créées spécialement pour la fête, beaucoup de jeunes (qui s’aiment peu ou qui ne s’aiment plus) se quittent. Une fois libres, c’est entre amis qu’ils passent la soirée. Joe, 27 ans, se souvient d’un dîner au restaurant. «Chaque table, formée certes de deux personnes, a eu droit à un cœur fluorescent», dit-il. «Nous étions cinq convives, et nous nous sommes disputés pour savoir qui emportera avec lui l’unique cœur, minus et en plastique mais mignon à croquer, que notre table avait reçu», raconte-t-il. Myriam, pour sa part, se rappelle qu’un restaurant distribuait des roses rouges à toutes les filles accompagnées de garçons. «Nous étions cinq filles, bien habillées, souriantes et seules et nous n’avons pas eu droit à une misérable fleur!». Joseph, bien que célibataire, attend chaque fête avec impatience. «J’essaie de savoir ce que feront mes amis qui sont en couple», explique-t-il. Pourquoi ? «C’est une manière d’avoir une certaine culture socio-amoureuse que je n’ai pas et de comprendre le phénomène Valentin» indique-t-il. La Saint-Valentin est effectivement un phénomène qui reste incompréhensible pour certains. Des personnes amoureuses il y en a toujours eu. Des personnes qui font semblant de s’aimer aussi. Pourquoi donc inventer une fête pour célébrer un état physique et mental, permanent ou provisoire ? «Pour des raisons purement commerciales», dira-t-on. Avis aux commerçants don: avec la Saint-Valentin, vous touchez certes une partie de la population mais vous passez totalement à côté d’une autre. «Des fêtes restent à exploiter», déclarent certains «incorruptibles» en citant en exemple : «saint Narcisse célébré le 29 octobre, ou saint Parfait fêté le 18 avril». À ce moment-là, c’est sûr, mariés, divorcés, veufs ou célibataires, tous «s’auto-offriront» des cadeaux, et plus personne ne se plaindra.
Ni cadeaux, ni roses rouges, ni dîner aux chandelles, ni carte de vœux, ni e-mail... Rien. Les célibataires ce week-end resteront seuls sans être, pour autant, esseulés. L’amour, ils l’ont connu peut-être, les déboires amoureux aussi. Des Valentins et des Valentines, ils en ont trop vu. C’est donc sans aucun regret ou vague à l’âme qu’ils passeront, en célibataire,...