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Actualités - COMMUNIQUES ET DECLARATIONS

Dialogue interne - Une trentaine d'universitaires et de personnalités signent un document commun Manifeste pour une entente sur les fondements de la nation libanaise

Un appel à un dialogue national pour une «entente sur les fondements» de la nation libanaise a été lancé par une trentaine d’hommes politiques, d’universitaires et de personnalités engagées dans l’action sociale et appartenant aux différentes communautés chrétiennes et musulmanes. Le document, rendu public hier, souligne que cet appel intervient «à un moment où les Libanais se trouvent confrontés à des problèmes majeurs dont dépend leur avenir» notamment en raison des «bouleversements qui commencent à intervenir dans la région et dans le monde». Le texte de l’appel pose, pour la première fois depuis l’arrêt des combats, le problème fondamental de la démocratie au Liban : comment concilier la notion de citoyenneté avec celle de pluralité communautaire ? Cette interrogation est précédée par une autre : «Comment bâtir un État unifié qui puisse, tout à la fois, maintenir la paix civile, assurer la bonne marche de la société, rendre au Liban son rôle dans la région et dans le monde et être, de surcroît, en harmonie avec sa société, comment donc bâtir un tel État sans répondre au préalable à la question : “Qui sommes-nous et que voulons-nous ?”. Or le problème des Libanais est le suivant : ils sont appelés à construire un État en fonction d’une société dont l’identité reste à définir : – Est-elle un agrégat d’individus reliés entre eux par des liens juridiques fondés sur leur appartenance commune à la nation libanaise ? – Est-elle une confédération de communautés religieuses liées entre elles par un pacte en vertu duquel elles acceptent de coexister dans le cadre d’un État unitaire ? – Est-elle une société arabe qui s’est trouvée historiquement séparée des autres sociétés arabes sœurs par les divisions engendrées par le colonialisme, et qui aspire à retrouver son unité originelle ? – Est-elle une société musulmane au sein de laquelle vivent des minorités chrétiennes ou est-elle une société chrétienne, «une part d’Occident en terre d’islam», menacée par le développement démographique des communautés musulmanes ? Le Pacte de 1943, relève le texte, a «contribué à faire du Liban, historiquement pays de refuge où coexistaient différentes minorités religieuses et ethniques, un lieu privilégié de convivialité. Le Liban a apporté dans ce domaine une contribution originale à la civilisation universelle dans sa recherche d’un meilleur environnement humain, donnant à la notion du compromis, qui sert de base à toute société humaine, une dimension rarement atteinte jusque-là et développant ainsi une qualité de vie qu’il n’était pas facile de retrouver ailleurs». Analysant les raisons de l’échec de l’expérience de 1943, dû notamment à la modification de l’environnement régional après la création de l’État d’Israël et à l’incapacité des dirigeants politiques à mettre sur pied un État de droit, le texte aborde l’accord de Taëf, qui lie dans un même texte la Constitution et le Pacte national puisqu’il estime que la «légitimité» de l’État est déterminée par sa capacité à préserver «le vouloir-vivre ensemble» des Libanais. À première vue, les Libanais auraient dû trouver leur compte dans cet accord. Mais tel n’a pas été le cas à cause précisément de la mauvaise application de Taëf sur laquelle le texte de l’appel s’étend longuement avant de définir une série de principes à partir desquels le dialogue doit s’instaurer entre les Libanais pour tenter de trouver une solution à la crise dans laquelle ils se débattent depuis la fin de la guerre. Parmi ces principes : 1- La reconnaissance des différences et l’acceptation d’une identité complexe : L’identité de l’individu n’est pas une donnée simple, mais une donnée complexe. Elle ne se limite pas à l’identité nationale, elle est la synthèse d’un grand nombre d’appartenances (familiale, linguistique, culturelle, sociale, régionale, professionnelle, religieuse, etc.). 2- La mise sur pied d’un État de gérer cette complexité : L’État libanais ne peut pas être un État ordinaire, régi par des mécanismes ordinaires. Jusque-là, les Libanais ont essayé de rendre simple une situation complexe, et tenté d’adapter leur société à l’État au lieu d’adapter l’État aux besoins de leur société. Or la diversité de la société libanaise nécessite la mise sur pied d’un État «hiérarchisé» où les «exceptions» – et elles sont très nombreuses – sont reconnues et disposent d’un champ propre d’expression. L’État est appelé à gérer non seulement des individus, mais également des communautés, des groupements humains, des régions, des cultures, etc. 3- La prise de conscience d’un destin commun La solidarité nationale nécessite la conscience d’un destin commun. Ce destin a, dans le cas libanais, un double aspect : – Un aspect de déchéance et de fragilité que la guerre a mis en évidence. – Un aspect d’ouverture et d’avenir : le style de civilisation que les Libanais avaient réussi à créer avant la guerre, le climat de liberté qui régnait au Liban alors que le monde arabe oscillait entre traditionalisme rétrograde et totalitarisme révolutionnaire, l’ouverture sur le monde et l’aptitude à intégrer le nouveau sans pour autant s’y perdre «font aujourd’hui de cette expérience historique un modèle qu’il convient de réhabiliter, un modèle pour le Liban, mais aussi pour l’ensemble du monde arabe en proie à des convulsions qui risquent de dégénérer en un cycle généralisé de violence». 4- Le recours au dialogue comme moteur de la démocratie libanaise L’accord de Taëf prévoit, sans jamais le formuler explicitement, l’adoption d’une démocratie de type consensuelle. Il lie en effet la légitimité des décisions que l’État est appelé à prendre au maintien du «vouloir-vivre en commun» des Libanais. Il précise également que le Conseil des ministres qui détient le pouvoir exécutif prend ses décisions par consensus et n’a recours au vote que si ce consensus est impossible à réaliser. Cette démocratie consensuelle ne peut fonctionner que si elle a recours au dialogue.
Un appel à un dialogue national pour une «entente sur les fondements» de la nation libanaise a été lancé par une trentaine d’hommes politiques, d’universitaires et de personnalités engagées dans l’action sociale et appartenant aux différentes communautés chrétiennes et musulmanes. Le document, rendu public hier, souligne que cet appel intervient «à un moment où les...