Vie politique - Entretien en tête à tête entre le chef de l'Etat et le député du Chouf Un rôle actif pour Joumblatt dans le règlement du dossier des déplacés(photos)

Une nouvelle page s’est ouverte dans les relations entre le régime et l’opposition que représente M. Walid Joumblatt, député du Chouf, à la faveur d’une réunion de franche explication entre le général Émile Lahoud et M. Joumblatt, hier à Baabdate. La volonté du président de la République de confier au leader druze un rôle substantiel dans le règlement du dossier des populations déplacées, selon des sources proches de M. Joumblatt, a d’ailleurs été interprétée comme le résultat direct de la nouvelle entente, souhaitée par Damas, entre le régime et M. Joumblatt. Elle n’impliquera pas pour autant une modification sensible du discours politique de l’opposition, représentée par le leader druze. De sources proches de M. Joumblatt, on a en effet indiqué que la politique suivie par le bloc de la lutte nationale à l’égard du Cabinet Hoss ne changera pas, tout en prenant soin d’établir une distinction entre le régime et le gouvernement. Accompagné des membres de son bloc parlementaire, M. Joumblatt a été reçu dans la matinée à Baabdate. L’entretien s’est déroulé en présence du directeur de la Sûreté générale, le général Jamil el-Sayyed, proche de Damas et qui a joué un rôle actif dans l’organisation de la rencontre Lahoud-Joumblatt. Le leader druze a eu d’abord un entretien de 30 minutes en tête à tête avec le général Lahoud. Les parlementaires et le général el-Sayyed se sont ensuite associés aux discussions qui ont essentiellement porté sur le dossier des déplacés, la crise socio-économique dans le pays et les efforts déployés en vue d’un déblocage du processus de paix. Un échange franc Selon des sources proches des personnes réunies, le tête-à-tête Lahoud-Joumblatt a donné lieu à un échange franc au sujet de diverses questions d’actualité, dont principalement le dossier des déplacés. Le bloc Joumblatt, rappelle-t-on, avait critiqué à maintes reprises, notamment durant les réunions parlementaires, la politique suivie par le gouvernement pour régler ce dossier. Il reproche principalement au Cabinet Hoss de ne pas tenir compte des considérations d’ordre social inhérentes à cette question. Selon des sources proches du député opposant, c’est le chef de l’État qui a proposé à M. Joumblatt de jouer un rôle actif dans le règlement du dossier des déplacés. Le général Lahoud, a-t-on noté, répondait ainsi indirectement aux propos que le chef du PSP avait tenus, il y a quelques semaines, lorsqu’il avait indiqué, en réponse à une question de la presse, que «personne n’avait sollicité son aide dans le dossier des déplacés». M. Joumblatt a réagi favorablement à la requête du chef de l’État, affirmant qu’il n’a pas d’inconvénient à contribuer à la clôture du dossier des déplacés, selon ces sources. M. Joumblatt doit notamment accélérer le processus de réconciliation en suspens dans certains villages. Les réconciliations auront lieu sous l’égide du chef de l’État, a-t-on indiqué de mêmes sources. Le mécanisme qui sera mis en place dans ce but n’a pas été encore défini. Il le sera ultérieurement. Il reste que le dossier des déplacés, qui doit coûter à l’État près d’un milliard de dollars, devrait être clos en l’espace de 3 ans, selon les mêmes sources qui ont précisé que des indemnités seront versées non seulement aux déplacés mais à leurs descendants également. Rappelons que le Cabinet Hoss avait suspendu ces indemnités. Une période transitoire Devant ses visiteurs, le chef de l’État s’est voulu rassurant en évoquant la crise socio-économique dans le pays. Il a espéré que la période actuelle, marquée par un marasme, sera seulement transitoire et s’est dit persuadé que l’instauration d’une paix régionale favorisera un développement économique au Liban. Le général Lahoud a aussi réaffirmé son attachement au secret bancaire, répondant ainsi aux appréhensions des membres du bloc Joumblatt qui redoutent que la loi sur l’enrichissement illicite ne pave la voie à la levée de ce secret. Toujours est-il que l’entretien s’est déroulé dans une atmosphère positive répercutée par diverses sources concordantes, qui ont précisé que la réunion Lahoud-Joumblatt sera suivie d’autres. Celles-ci seront commandées non seulement par le suivi du dossier des déplacés – confié d’ailleurs au général el-Sayyed – mais aussi par la volonté commune de poursuivre le dialogue sur d’autres sujets d’actualité. Le dossier de la loi électorale n’a pas été évoqué hier, mais de sources proches des personnes réunies, on a indiqué qu’il serait à l’ordre du jour du prochain entretien entre le chef de l’État et le leader druze. Bien que la Syrie ait joué un rôle pour favoriser un rapprochement entre MM. Lahoud et Joumblatt, il faut dire que c’est le règlement du contentieux concernant les Waqfs druzes qui a essentiellement contribué à donner une dimension nouvelle au dialogue entre les deux hommes, croit-on savoir de mêmes sources. MM. Lahoud et Joumblatt avaient tenu deux réunions avant celle d’hier dont le climat était toutefois meilleur que celui qui avait prévalu au cours des deux précédentes, selon les mêmes sources. M. Joumblatt a apprécié l’impartialité dont le président de la République a fait preuve dans le cadre du débat interdruze, autour de la loi sur la réorganisation des Waqfs druzes, selon ces mêmes sources, sachant que le président de la République aurait pu, s’il le voulait, profiter de l’ouverture de ce dossier pour incommoder M. Joumblatt. Le bloc parlementaire de ce dernier n’a pas manqué d’ailleurs de remercier le chef de l’État pour sa position et c’est le député Wadih Akl qui a été chargé de s’exprimer à cette fin au nom de ses collègues.