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Actualités - ANALYSE

Réforme administrative- L'éruption n'est que la partie visible de l'iceberg La modernisation s'annonce comme un défi

Au fur et à mesure que l’on commet des erreurs, on s’aperçoit que le projet de réforme administrative est un vrai casse-tête, politique mais aussi social. L’opération ne se limite pas, en effet, à quelques coups de détergent, quelques permutations ou quelques nominations. Il faut encore dépoussiérer le circuit administratif, renforcer son efficacité et faciliter les formalités pour que les gens cessent de suer sang et eau quand ils veulent obtenir quelque chose ou régulariser leur situation. Cette modernisation est très difficile à réaliser, même avec l’aide de spécialistes étrangers, car le niveau de compétence des effectifs disponibles est proche du zéro absolu. Il est évident que les lenteurs de l’administration, son incurie patente, alliées à un esprit bureaucratique qui atteint des cimes d’absurdes vexations dont pâtit le public, représentent un lourd handicap économique pour le pays. Les affaires, ralenties, entravées, s’en ressentent souvent gravement et même le Trésor, à bien y regarder, y perd. L’enfer est pavé de bonnes intentions : paradoxalement, en se lançant à corps perdu dans une épuration à la machette aveugle, le présent gouvernement a aggravé le syndrome de l’hémiplégie administrative. En effet, pris de peur, les fonctionnaires, du plus petit au plus grand, ne veulent pratiquement plus rien signer et préfèrent être accusés d’impéritie que de se voir embastillé pour complicité dans des délits graveleux. Même certains ministres, dit-on, tournent et retournent leur plume dans l’encrier plusieurs fois, font faire mille enquêtes sur les dossiers qui leur sont soumis, avant de prendre une décision quelconque, par crainte de se faire piéger dans une combine louche et de se retrouver sous les barreaux comme quelques membres des équipes précédentes. Bref, la machine, déjà cacochyme, toussote et se traîne. D’autant que la délation anonyme, procédé totalitaire peu recommandable, y ajoute son grain de sel. On sait, en effet, que la justice a fait état il y a quelques semaines, pour justifier des poursuites qu’elle engageait (la fameuse affaire des fuites), d’informations livrées par de «bons citoyens». L’équivalent en somme du paraphe «un ami qui vous veut du bien» qui conclut les lettres de corbeau qu’on trouve dans les pièces policières classiques. Circonstance aggravante : il semble établi que les inculpations ont été rendues publiques avant toute investigation visant à vérifier le bien-fondé des délations et l’identité de leurs auteurs. C’est bien pourquoi le Parlement a réagi en nommant une commission chargée d’élaborer une législation précise qui interdise aux magistrats ou policiers de refiler des informations aux médias. Membre de ce comité, président de la commission parlementaire de l’Administration et de la Justice, Me Chaker Abousleiman est proprement écœuré par les pratiques susmentionnées. «Il est inadmissible, souligne-t-il, que l’on prenne en compte les indications fournies par les soi-disant «bons citoyens». D’ailleurs s’ils l’étaient vraiment, ils ne se cacheraient pas et feraient leurs déclarations au grand jour». M. Abousleiman laisse entendre qu’il prépare une proposition de loi imposant à la justice d’ignorer de telles sources, de les considérer comme illégales, irrecevables comme les bandes magnétiques le sont par exemple devant les tribunaux. De son côté, le président du Conseil a demandé aux organismes de contrôle de traiter le volet délation mais aussi celui de la psychose qui empêche les fonctionnaires de fonctionner, de trouver un moyen de les rassurer et de les réactiver. Ce qui, même en temps ordinaire, tient de la mission impossible…
Au fur et à mesure que l’on commet des erreurs, on s’aperçoit que le projet de réforme administrative est un vrai casse-tête, politique mais aussi social. L’opération ne se limite pas, en effet, à quelques coups de détergent, quelques permutations ou quelques nominations. Il faut encore dépoussiérer le circuit administratif, renforcer son efficacité et faciliter les...