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Actualités - REPORTAGES

Education - Un secteur qui totalise 7.02% de l'ensemble des élèves libanais L'enseignement technique reste le parent pauvre du système éducatif

Depuis plusieurs années, les responsables officiels semblent, enfin, avoir pris conscience de l’importance vitale de l’enseignement technique et professionnel. Au début des années 90, un ministère consacré à cet enseignement a même été créé. A l’heure où le pouvoir cherche à relancer l’activité économique à plus d’un niveau, où en est actuellement l’enseignement technique qui est censé être l’un des éléments moteurs du développement des secteurs productifs dans le pays ? Quel rôle jouent, respectivement, les enseignements privé et public sur ce plan ? «L’état des lieux» de cet enseignement technique correspond-il réellement aux besoins du pays et à des choix rationnels et bien réfléchis ? Autant de questions auxquelles nous tenterons d’apporter quelques éléments de réponse. Nombre des anciens artisans locaux, et non des moindres, sont des anciens de l’école technique des pères lazaristes, installés au Liban depuis la moitié du XIXe siècle. Au niveau étatique, la première école publique d’enseignement technique, appelée école des Arts et métiers de Beyrouth, a été fondée en 1904. Entre 1945 et 1956, les différents gouvernements qui se sont succédé ont pris l’initiative de créer de nouvelles écoles techniques notamment à Saïda, Tripoli, Zahlé et Deïr el-Kamar. Mais le vrai grand «boum» de l’enseignement technique et professionnel a eu lieu au cours des années soixante lorsqu’une quinzaine de grands établissements scolaires techniques, répartis sur l’ensemble du territoire libanais, ont été ouverts. Il y a eu surtout à cette époque la création de l’Institut pédagogique national de l’enseignement technique (Ipnet), chargé de la formation d’enseignants spécialisés pour satisfaire les besoins du marché. Cette réalisation s’est accompagnée d’une réforme des programmes qui a permis la création d’instituts destinés à la formation de techniciens supérieurs. Entre les 3 000 élèves que comptait l’enseignement technique en 1957 et les 66 340 élèves que compte actuellement ce secteur (totalisant 7,02 % de l’enseignement préuniversitaire), un long chemin a été parcouru. Il reste que le secteur privé dans ce domaine est de loin plus important que le secteur officiel, la proportion étant de 1 à 3 en termes de nombre d’élèves, ce qui devrait porter à réflexion. Pourquoi le secteur privé occupe-t-il ainsi une place plus importante que le secteur officiel sur le plan de l’enseignement technique ? Plusieurs facteurs sont à l’origine de ce déséquilibre : 1 – Le secteur privé offre deux filières de formation : il peut préparer ses élèves à l’obtention d’un diplôme d’État ou d’une simple attestation scolaire. Dans le premier cas, l’école privée est censée se conformer aux textes des programmes officiels, mais elle jouit, par contre, d’une liberté d’action totale dans le second cas, vu que ses élèves ne peuvent prétendre qu’à une simple attestation qui, souvent, résiste mal à l’épreuve du marché. 2 – L’enseignement technique privé s’est organisé de façon à répondre aux besoins et problèmes de ses «clients», notamment en matière de frais de scolarisation. Excepté les écoles appartenant à des associations à but non lucratif, les propriétaires des établissements privés multiplient les facilités pour amener les élèves à s’inscrire chez eux. Pour s’en convaincre il suffit d’entendre les spots télévisés ou radiodiffusés et de voir les calicots accrochés le long des grands axes routiers ainsi que dans les rues et ruelles, notamment dans la banlieue beyrouthine. On assiste sur ce plan à une véritable course au recrutement, ce qui laisse planer plus d’un point d’interrogation quant à la valeur de la formation dispensée. 3 – Se montrant peu soucieux des différentes contraintes sur le plan de la réglementation requise, certains établissements se permettent de réunir dans une même salle de cours des élèves d’âges et de niveaux différents. Ces élèves sont parfois soumis à un horaire des plus fantaisistes, notamment durant les cours du soir, car seule la rentabilité compte. 4 – Conséquence logique de ces préoccupations d’ordre financier, les écoles techniques du secteur privé ont toujours favorisé les formations essentiellement théoriques du fait qu’une telle option ne nécessite pas d’importants investissements. Ce choix aboutit à des spécialisations axées notamment sur le tertiaire. Force est de noter que rares sont les écoles qui ont choisi d’investir dans la formation destinée aux industries légères, notamment l’électronique. Le secteur officiel Nonobstant les difficultés issues de la guerre, le secteur officiel de l’enseignement professionnel et technique ploie depuis de longues années sous le poids d’un certain nombre de difficultés liées notamment à une lourdeur administrative qui empêche l’introduction de certaines réformes qui permettraient à ce secteur de rester performant. L’enseignement technique et professionnel officiel est chapeauté par le Conseil supérieur de l’enseignement technique présidé par le ministre de l’Enseignement technique et professionnel, et regroupant le directeur général du ministère ainsi que des représentants des syndicats (3 membres), des industriels (3), des ministères et administrations concernés (4), du secteur des services (4), de divers autres secteurs (2), des écoles privées (2), des écoles publiques (2), en sus d’un représentant du Conseil pour la recherche et le développement pédagogique (CRDP). Le Conseil supérieur de l’enseignement technique est censé définir les priorités du secteur technique pour le rendre conforme aux besoins du marché, mais il n’a pas été, jusqu’à présent, une référence en la matière. Pour rester performant, l’enseignement technique doit répondre aux besoins, toujours variables, du marché. Cela doit se traduire par une refonte permanente et rapide des programmes et par une formation continue du corps enseignant. Cette course permanente à la performance doit être le résultat d’un choix stratégique, mais elle est aussi tributaire du budget alloué à l’enseignement technique. Jusqu’à présent, ce budget est demeuré modeste. Exception faite de la parenthèse des années soixante, lorsque le boum industriel national a correspondu avec le grand démarrage de l’enseignement technique, on a toujours eu l’impression que le secteur technique est resté l’enfant pauvre du monde de l’éducation au Liban. Le choix des spécialisations enseignées dans les différentes écoles techniques publiques a souvent un côté irrationnel. Sur le plan du principe, ces écoles doivent répondre aux besoins du marché, notamment au niveau de leur environnement immédiat. Or, il ressort d’un guide publié par le CRDP pour l’année 1997-1998 que les écoles techniques de la Békaa (notamment à Zahlé, Hermel, Baalbeck, Bednayel, Machghara et Rachaya) ne décernent pas la moindre spécialisation agronomique. Le guide du CRDP montre, en outre, qu’une même spécialisation est assurée par plus d’une école dans cette même région. Si l’on envisage les choses sous l’angle de la gestion des moyens étatiques disponibles, cela constitue une dilapidation des deniers du contribuable. Avant l’année 1975, le ministère de l’Éducation avait pensé instaurer ce qui avait été appelé à l’époque le «regroupement scolaire» : il s’agissait de créer de grands centres scolaires regroupant les élèves de plusieurs localités voisines. La publication susmentionnée indique, à titre d’exemple, qu’à Sarafand, non loin de Saïda, l’école technique supérieure compte 323 élèves, répartis en trois spécialisations, le nombre d’enseignants étant de 78. Cet exemple, choisi au hasard, illustre à quel point certains choix éducatifs irrationnels se font au détriment de la rentabilité et de l’efficacité d’un service public dont la survie relève de l’intérêt national. Ce panorama rapide de l’enseignement technique et professionnel au Liban donne un aperçu des problèmes auxquels ce secteur est confronté, mais dans le même temps il illustre l’importance d’un type d’enseignement qui, s’il est bien géré, peut contribuer dans une large mesure au développement de l’économie nationale.
Depuis plusieurs années, les responsables officiels semblent, enfin, avoir pris conscience de l’importance vitale de l’enseignement technique et professionnel. Au début des années 90, un ministère consacré à cet enseignement a même été créé. A l’heure où le pouvoir cherche à relancer l’activité économique à plus d’un niveau, où en est actuellement l’enseignement...