Presse - Assises de l'UIJPLF à Moncton (Canada) Lahoud met dans le même sac l'arbitraire gouvernemental et la mainmise de groupes financiers

Hier, dimanche, ont été inaugurés à Moncton (province du Nouveau-Brunswick, Canada) les 31es assises de l’Union des journalistes et de la presse de langue française (UIJPLF). Une centaine de professionnels de l’information participent à cette manifestation organisée à la veille de la rencontre des chefs d’État et de gouvernement qui se déroulera les 3, 4 et 5 septembre prochain, toujours dans cette ville de l’est du Canada ; L’Orient-Le Jour est représenté à la conférence des journalistes francophones par son rédacteur en chef Issa Goraieb qui assurera d’ailleurs la couverture de ce sommet dont la prochaine édition, en l’an 2001, aura pour cadre Beyrouth. Tout au long de la semaine, les participants à ces assises de l’UIJPLF, placées sous le thème “Formation et Perfectionnement”, plancheront sur les diverses questions intéressant la profession : questions techniques, bien sûr – notamment celle du bouleversement de l’univers des médias opéré par les nouvelles technologies –, mais aussi éminemment philosophiques et même politiques, puisqu’elles ont trait à la déontologie, à l’indépendance des journalistes et à la liberté de la presse. Les débats sont dirigés par MM. Abdallah Stouky et Georges Gros, respectivement président international et secrétaire général international de l’UIJPLF ; l’accueil et l’organisation sont assurés par la section acadienne de l’Union. Les travaux se déroulent à l’hôtel Delta Beauséjour de Moncton, qui abritera également le sommet de la Francophonie. À la séance solennelle d’ouverture, dimanche matin, l’honorable Don Boudria, ministre d’État et leader parlementaire du gouvernement aux Communes, a chaleureusement souhaité la bienvenue aux congressistes, exprimant son profond regret pour l’absence d’une vingtaine de journalistes qui se sont vu refuser un visa canadien, car venant de pays – dont l’Algérie, l’Albanie et plusieurs États africains – dont les gouvernements ont mauvaise presse, c’est bien le cas de le dire, en matière de respect des droits de l’homme. Abdallah Stouky a exalté, pour sa part, la vocation bilingue du Nouveau-Brunswick, seule province canadienne officiellement bilingue et où, a-t-il dit, «les différences et la diversité sont vécues dans la tolérance». Au cours de cette séance inaugurale, ont été lus les messages adressés aux assises des journalistes francophones par un grand nombre de chefs d’État ou de gouvernement attendus la semaine prochaine à Moncton. Dans la missive, le président Émile Lahoud, après avoir affirmé que le 21e siècle sera celui de l’information, souligne la nécessité de défendre la liberté de presse contre les pressions politiques et l’arbitraire gouvernemental, s’empressant d’ajouter cependant, à ces périls classiques, celui de «la mainmise de certains groupes financiers» : phénomène d’autant plus dangereux, selon le président, que les victimes de telles pratiques «sont, hélas, parfois consentantes». Voici d’ailleurs le texte du message présidentiel : «Mesdames et messieurs les journalistes francophones, À l’occasion de vos 31es assises à Moncton, je vous adresse mon salut chaleureux et mes meilleurs vœux de succès. Vous savez que le Liban jouit d’une longue et solide tradition de liberté d’expression, corollaire de sa diversité culturelle qui est une richesse pour lui et pour toute sa région. Beyrouth abrite, entre maintes autres publications, une presse francophone en pleine expansion. Cette presse est d’ailleurs brillamment représentée dans vos assises par d’éminents journalistes libanais que je connais personnellement et que j’apprécie hautement. Je voudrais souligner ici l’importance du thème “Formation et perfectionnement” que vous avez adopté pour vos 31es assises. Le XXIe siècle qui s’ouvre dans quelques mois sera, grâce aux technologies nouvelles de la communication, le siècle de l’information. Votre profession est appelée à y jouer un rôle capital et à y assumer une lourde responsabilité. À ce rôle et à cette responsabilité, il est normal qu’elle se prépare par un effort continu de formation et de perfectionnement. Vos assises seront aussi, j’en suis sûr, l’occasion pour vous d’enrichir votre réflexion sur la liberté de la presse. Elle doit certes être défendue contre les pressions politiques et l’arbitraire gouvernemental. Mais elle doit l’être aussi contre la mainmise de certains groupes financiers, mainmise d’autant plus dangereuse qu’elle est indirecte, souvent même cachée, et dont les victimes au sein de la presse sont hélas parfois consentantes. En vous réitérant mes vœux de succès, je vous renouvelle, mesdames et messieurs, mon attachement personnel et celui du peuple libanais aux valeurs de culture et de liberté que vous représentez. Général Émile Lahoud Président de la République libanaise» Les assises de l’UIJPLF, qui se poursuivront jusqu’à vendredi, seront marquées par de nombreuses conférences magistrales et interventions, émaillées de déjeuners, réceptions et dîners offerts par les officiels néo-brunswickois et les édiles de Moncton, et même de fugues touristiques à Shédiac, dans l’Île-du-Prince Édouard et à Caraquet.