Le réveil aura été dur pour le Parti barbu et les accessoires politiques qui lui gravitent autour. Il aura fallu une déglinguée militaire historique, une rouste mémorable qui l’a laissé sur le carreau, sans patron, sans cadres, avec seulement quelques sous-fifres chargés d’assurer le minimum syndical de la survie aux derniers lambeaux qui soubresautent encore sur les réseaux.
Ceux qui pendant plus de quarante balais nous ont vendu leurs 100 000 spadassins aujourd’hui au chômage, leurs 400 000 missiles, dont il ne reste plus que quelques asperges flapies, entrent soudain en rogne dès qu’on évoque la mise à poil de leur quincaillerie. Que le sujet soit librement débattu au Parlement, à la télé ou dans les rassemblements publics les fait instantanément grimper aux rideaux. Les dernières barbes pelées sont aussitôt lâchées, les bouches édentées largement ouvertes, les doigts dégriffés grattent dans le vide. Diable ! Le pays est à terre, laminé, démantibulé... mais ses bourreaux exigent qu’on leur ménage l’amour-propre.
Aussi, pour ces appendices de mollahs, rien ne vaut les palabres discrètes loin des feux de la rampe, les chuchotis honteux des alcôves, les marchandages en tapinois aux allures de conspirateurs... La violence débridée devient alors pudeur de rosière et discrétion de violette !
Joseph 1er du Château et Tonton Nawaf l’ont bien compris, eux, et opté pour ce qu’on pourrait qualifier de « déculottée en douceur », une sorte de strip-tease au ralenti, sans même appréhender que cet effeuillage finira par dévoiler une plastique très peu comestible. Le premier ne parle d’ailleurs que du monopole d’État sur les armes sans évoquer le désarmement des loqueteux, le second les masse dans le sens du missile en espérant obtenir les clés de l’armurerie. Mais patience ! Balle après balle, douille après douille, un canif après l’autre, les deux compères exécutifs finiront bien par les dépouiller et épouiller. Sauf qu’à ce rythme, l’un aura terminé son mandat, l’autre aura déguerpi en se bouchant le nez retrouver sa toge à La Haye.
S’il y en a un qui doit en revanche savourer son bonheur, c’est bien le vieux kroumir de Aïn el-Tiné qui n’en finit pas de jouer les utilités en alignant les clignotants les plus farfelus. Après sa marotte de la circonscription unique et du rouleau compresseur aux mille barbes, le voilà qui vire soudain sa cuti et réussit un numéro de lèche hors pair à l’adresse du Aoun, deuxième du nom, assorti d’un rétablissement impeccable sur pattes. Sacré Istiz ! Il a certainement trouvé la formule magique de la jouvence politique éternelle. De toute façon, ses propos n’engagent que ceux qui y croient. Ce vestige indéboulonnable est d’autant plus prêt à toutes les promesses, qu’il sait qu’il appartiendra au Châtelain étoilé de Baabda de les tenir.
Liban, virgule attardée du Levant, cocon d’ennui et paradis des mutants bienheureux ! C’est bien le seul pays au monde où le soleil se lève deux fois : le matin... et après la sieste.
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À ce rythme, le premier aura terminé son mandat. Malheureuse c’est ce qui nous attend.
00 h 22, le 21 avril 2025