Comme si les attaques israéliennes au Liban-Sud et l’échange de tirs à la frontière syrienne ne suffisaient pas, la nuit de lundi à mardi a été agitée par des affrontements au Liban-Nord entre le camp de Beddaoui et la région de Wadi Nahlé. Même si chacune de ces zones a ses particularités, les Libanais se sont aussitôt demandé s’il y a un lien entre ces incidents quasi simultanés.
Certes, au sud du Litani, il n’y a pas d’affrontements à proprement parler, mais des raids israéliens presque continus, tantôt visant des villages et tantôt s’acharnant contre des personnes, soupçonnées par les Israéliens d’être des responsables du Hezbollah. Sans tenir compte des critiques, les Israéliens poursuivent leurs violations de l’accord de cessez-le-feu, et cela quand bien même l’armée libanaise continue d’augmenter ses effectifs sur place et détruit régulièrement des dépôts d’armes appartenant au Hezbollah. Au point que lors de sa dernière réunion, la commission de surveillance présidée par le général américain Jasper Jeffers a estimé, comme nous l’avons appris de source militaire libanaise, que le Liban était en train de remplir sa part de l’accord alors que la plupart des violations viennent des Israéliens.
Notons qu’au moment où des affrontements ont commencé entre « les réseaux de contrebandiers » et les forces armées syriennes, à la frontière libano-syrienne au niveau du Hermel, les Israéliens ont lancé plusieurs raids contre des positions présentées comme relevant du Hezbollah dans la Békaa. Ce développement n’a pas empêché les combats de se poursuivre, faisant des morts des deux côtés. L’armée libanaise s’est là aussi déployée. Dans la version syrienne, les combats opposent des éléments du Hezbollah aux forces syriennes alors que la formation chiite a publié un communiqué pour démentir toute implication dans ces affrontements.
Ceux qui adoptent cette version rappellent que dans ses contacts avec des personnalités libanaises, qu’il s’agisse du leader druze Walid Joumblatt ou de l’ancien Premier ministre Nagib Mikati, le président syrien Ahmad el-Chareh avait mentionné à plusieurs reprises le Hezbollah, posant des questions sur son influence à l’intérieur du pays et rappelant que pour beaucoup de Syriens, il avait aidé le régime Assad à les massacrer. Du côté libanais, que ce soit le Hezbollah ou les sources militaires, on déclare plutôt que ceux qui sont impliqués dans les combats sont les réseaux de contrebande qui fleurissent dans la région depuis des années et qui sont protégés par ce qu’on appelle « les clans familiaux ». Sauf qu’il est de notoriété publique que ces clans, tout en ayant une existence propre, sont liés au Hezbollah.
Les combats se sont poursuivis jusqu’à la conclusion d’un accord de cessez-le-feu entre les ministres de la Défense respectifs des deux pays. Mais les combats peuvent reprendre tant qu’aucun mécanisme de coordination entre les deux parties n’a été adopté. La surprise reste toutefois les combats qui ont éclaté lundi soir entre le camp palestinien de Beddaoui et les combattants de Wadi Nahlé au nord de Tripoli. Certes, depuis les incidents sanglants de Lattaquié et du littoral syrien, la tension est montée au nord, notamment entre les alaouites de Jabal Mohsen et les sunnites de Bab el-Tebbané. Mais l’armée a rapidement renforcé sa présence entre les deux et elle fait preuve d’une grande vigilance. Des incidents ont lieu régulièrement, mais ils sont rapidement circonscrits. Selon la version véhiculée par les habitants du camp de Beddaoui, les affrontements ont commencé après que des combattants de Wadi Nahlé ont décidé d’arrêter un camion transportant des aides envoyées par l’Iran aux Palestiniens du camp. Ils se sont poursuivis pendant plusieurs heures et l’armée a renforcé sa présence dans le secteur.
Dans ces trois incidents, on retrouve pratiquement les mêmes acteurs, ou plutôt la même cause : le Hezbollah et ses alliés face aux forces qui leur sont hostiles, ouvertement ou non. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle la question qui se pose reste celle de savoir s’il y a un lien entre ces incidents ou si leur concomitance est une simple coïncidence.
Selon certaines analyses, tous les dossiers sont liés. Mais c’est l’interprétation de ce lien qui varie d’un camp à l’autre. Le camp hostile au Hezbollah estime que ce dernier est derrière tous les incidents pour pouvoir se reconstituer et prouver que « la résistance armée » reste la seule option face aux défis sécuritaires. Selon cette logique, le Hezbollah voudrait montrer que l’armée libanaise n’est pas en mesure de protéger les frontières, et que par conséquent elle a besoin d’être épaulée par la résistance.
Du côté du Hezbollah, on estime au contraire que celui-ci ne veut absolument pas provoquer des troubles à l’heure actuelle. C’est d’ailleurs ce qu’a déclaré le cheikh Naïm Kassem dans un de ses discours en affirmant que la résistance continue mais avec de nouvelles méthodes et des moyens différents. Par conséquent, pour les proches du Hezbollah, tous ces incidents ont un même objectif : exercer des pressions sur le Liban pour le pousser à en finir totalement avec le Hezbollah et à se diriger vers une forme de normalisation de ses relations avec Israël. Au lieu de songer à offrir au Liban des alternatives et des appâts pour renoncer à la résistance et accepter l’idée d’une forme de normalisation, les Israéliens et même certaines figures de l’administration américaine veulent exercer des pressions sur le Liban officiel pour le pousser à en finir avec les armes du Hezbollah.
Entre ces deux versions, le Liban officiel tente d’empêcher les débordements, tout en cherchant à avancer prudemment, en évitant les pièges externes et internes.
Les armes du Hezb ont largement demontre leur inneficacite face a Israel. Quelle raison pour les garder ? A part pour des raisons interieures ?
13 h 05, le 19 mars 2025