« Nous n'avons pas été vaincus à cause de l'intelligence d'Israël, mais en raison de nos propres insuffisances » a lancé lundi soir à la chaîne pro-iranienne al-Mayadeen Nawaf Moussaoui, responsable du dossier des ressources et des frontières au sein du Hezbollah, et ancien membre du bureau politique du parti. 

M. Moussaoui avait remis sa démission du parti en juillet 2019 « à la demande » de la formation, pour « accumulation d'erreurs commises », notamment après un incident au cours duquel il avait tiré avec d'autres hommes armés en direction d'un commissariat de police. 

Dans un entretien dont le ton tranche sur le fond avec les discours du secrétaire général du parti, Naïm Kassem, et alimente l’idée de profondes scissions au sein du parti, Nawaf Moussaoui a longuement regretté les « erreurs et failles tactiques » du Hezbollah durant la guerre contre Israël. Au titre de ces erreurs tactiques ayant « vaincu » le Hezbollah, Nawaf Moussaoui compte l’explosion des appareils de communication, bipeurs et talkie-walkies - ayant fait au moins quarante morts, dont un enfant, et plus de 2 900 blessés les 17 et 18 septembre - ainsi que les assassinats de Hassan Nasrallah et de Hachem Safieddine, dans des bombardements d’une ampleur inédite sur la banlieue sud de Beyrouth respectivement le 27 septembre, et la nuit du 3 au 4 octobre.

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« Si je reçois une montre en cadeau, je la fais vérifier préventivement pour l’examiner. Comment est-il possible qu’un bipeur ait été utilisé sans avoir été ouvert et inspecté ? », s’est interrogé Nawaf Moussaoui, tandis qu’un ex-agent israélien a révélé le 24 décembre dernier que l'opération était préparée depuis dix ans. 

Nawaf Moussaoui accuse le parti de ne pas avoir su protéger l’ancien secrétaire du parti, Hassan Nasrallah. « J’ai été choqué d’apprendre que le Sayyed (Hassan Nasrallah) était encore dans la banlieue sud de Beyrouth et qu'il résidait à l’endroit même où il a été assassiné » a-t-il déclaré. Il explique ainsi que durant la guerre de 2006, « Imad Moghniyé (chef de la branche militaire du parti, assassiné en 2008, Ndlr) était en charge de sa sécurité et le déplaçait d’un endroit à l’autre », confiant avoir pensé « que cette précaution était également en place lors de la dernière guerre » pour empêcher qu'il ne soit localisé.

Avant de poursuivre : « La banlieue sud de Beyrouth est entièrement sous le radar américano-israélien, il n’existe aucun endroit qui ne soit pas surveillé et accessible. ». Il a émis des regrets similaires quant à Hachem Safieddine, qui n'aurait pas dû accepter de se mettre lui aussi dans un bunker à Haret Hreik. Feignant d'être à sa place, Nawaf Moussaoui a déclaré : « De mes propres yeux j’ai vu qu’ils avaient frappé l’endroit (où se trouvait Hassan Nasrallah), et je vais me mettre dans un lieu équivalent ? Sur quoi je mise ? Sur le fait que cet endroit est inconnu ? Mais il a déjà été dévoilé », regrette l’ancien député de Tyr. 

« Compense(r) les lacunes »

« C’est pour ça que je dis que de nombreuses réalisations israéliennes étaient dues à nos failles et lacunes et non à l’intelligence israélienne » affirme Nawaf Moussaoui, avant de lâcher : « Je ne sais pas ce qui nous est arrivé ». Il a notamment déclaré qu’après l’attaque des bipeurs, Hassan Nasrallah « avait compris qu’il y avait une erreur et une faille technique ».

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Le responsable a également expliqué que « le Hezbollah mène une enquête interne sur tous les événements qui se sont produits d’un point de vue sécuritaire et militaire », tout en assurant que le parti « est capable de porter des frappes à l’occupation israélienne s’il compense ses lacunes » et corrige à la fois les « failles techniques et humaines », qui sont « significatives ».

Nawaf Moussaoui a encore estimé qu'en dépit des « sérieux revers », il ne s'agit pas de « la fin du Hezbollah (ni) de l’axe de la Résistance » contre Israël. Malgré les reproches émis à l'encontre du Hezbollah, il a affirmé que le parti avait infligé des pertes significatives à l’occupation israélienne « au plus fort de la guerre » et avait obtenu des gains pendant celle-ci, citant en exemple la frappe de drone sur le domicile du premier ministre israélien Benjamin Netanyahu à Césarée. Il s’est également félicité de la présence de deux ministres, ceux de la Santé et du Travail, faisant partie de la quote-part du Hezbollah au sein du gouvernement Salam, malgré le « désir régional et international d’exclure le Hezbollah du gouvernement ».

Lundi soir, le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, a affirmé dans un discours devant la Knesset, à l’occasion d’une séance dédiée à la création d’une commission d’enquête d’État sur le 7 octobre, que « le monde a pu constater ces derniers mois la capacité d'Israël à tromper ses ennemis », ajoutant que sa « série d'immenses réalisations a changé le visage du Moyen-Orient tout entier ». Il a notamment loué le moment « idéal » de l'explosion des bipeurs estimant qu'il a constitué un « tournant décisif ayant contribué à la chute du régime d’Assad (le 8 décembre) ».