Message urgent des autorités célestes : « La tempête de l’Apocalypse a été reportée à une date ultérieure. »
Annoncée au son des trompettes et avec force coups de cymbales, la dépression « historique » s’est passablement effilochée, donnant lieu à des considérations piteuses sans même le bénéfice de la petite pluie-pluie qui pissoie pour casser la vague de froid. Pourtant, bien avant les premières bourrasques espérées, les réseaux asociaux nous promettaient les pires cataclysmes, certains disjonctés n’hésitant pas à nous annoncer le « déluge du millénaire » qui transformera le pays en fange nauséabonde. Ce qui ne nous aurait pas beaucoup changé de l’ordinaire…
Pourtant, le froid sans flotte, c’est barbant ! Pas d’ambiance Calcutta cette fois, avec les trombes d’eau noyant les routes et transformant les autos en énormes étrons flottants, pas de sacs-poubelle bouchant les filtres de nos centrales électriques branlantes et servant de prétexte à un surcroît de rationnement du jus. Seul le verglas créait un peu d’animation sur les hauteurs…
Petite parenthèse : si seulement il pouvait se trouver quelqu’un pour expliquer aux planqués qui pantouflent dans les stations météo que les tempêtes, contrairement aux cyclones, typhons et ouragans, ne portent pas de nom, qu’on ne peut pas les affubler à tout va et n’importe comment d’appellations puisées dans les patronymes du terroir, façon Alexa, Zeina, Madame Norma, Tante Latifé ou autres Adam, et que ces sobriquets farfelus sont déjà regroupés sous un nom plus commun qu’on appelle « l’hiver ». Petit rappel aussi à l’adresse des cassandres climatiques qui croyaient vivre des événements diaboliques : nous sommes en février…
Il reste que le frémissement du thermomètre, pensait-on, allait éclipser quelque peu les âneries proférées sur la scène politique. Loupé ! D’autres âneries sont aussitôt débitées sous couvert d’expertise scientifique. Avec toutefois cette variation épatante : si on gèle, c’est parce que la terre a très chaud. Donc, quand viendra l’été, faudra sans doute bien se couvrir pour bronzer au soleil et brouter à l’avance les brocolis bio du printemps d’après… Chassez le naturel libanais, il revient par la fenêtre !
Ce qui est sûr, en revanche, c’est qu’au plus fort de la vague de froid, l’onde de choc s’est propagée avec une fulgurance inouïe… dans le réseau cellulaire. Diable ! Faut bien se téléphoner pour s’instruire d’informations hautement pertinentes : un : savoir si l’interlocuteur grelotte, lui aussi ; deux : à quelle heure exactement il a commencé à glaglater des ratiches ; trois : que fait-il à cet instant précis, comme si la posture, ablutions intimes ou curetage de nez, faisait toute la différence.
Lorsqu’avec le printemps s’estompera ce fatras neurasthénique, il nous restera encore heureusement en réserve quelques calamités pires que ce bon vieux « Adam » : les élucubrations des résidus du Parti barbu, les jérémiades du Basileus devenu orphelin de la République et les mirages ratés de dépôts bancaires inaccessibles.
Ainsi se terminent les vacances d’hiver taillées à la mesure des esprits vacants.
gabynasr@lorientlejour.com
GENIAL.
19 h 02, le 28 février 2025