L’indice des directeurs d’achat libanais (PMI), baromètre de l’état d’esprit des entreprises au Liban, a poursuivi sa chute en octobre, sur fond d’intensification des affrontements spectaculaires entre le Hezbollah et Israël, qui ont débuté le 8 octobre 2023.
Avec 45 points, cet indicateur publié par BlomInvest a atteint son plus bas niveau en 44 mois, soit près de quatre ans. À l’époque, le Liban était plongé dans une crise économique et financière qui avait commencé fin 2019, tandis que les restrictions liées à la pandémie de Covid-19 étaient encore très présentes. La situation s’est dégradée davantage en octobre, avec les affrontements qui ont dégénéré en guerre totale, poussant plus de 1,2 million de personnes à fuir les bombardements israéliens, qui ont provoqué la mort de plus de 3 000 personnes en un peu plus d’un an. L’activité économique est quasiment à l’arrêt dans les régions bombardées, tandis que les autres zones résistent un peu mieux, profitant de l’afflux de déplacés venus des zones à risque.
« Le BLOM Lebanon PMI est tombé à 45,0 en octobre 2024, contre 47,0 en septembre, atteignant son plus bas niveau depuis 44 mois, suite à l’escalade de la guerre entre le Hezbollah et Israël », a confirmé Fady Osseirane, directeur général de BlomInvest, dans un commentaire publié en marge du rapport contenant le PMI actualisé.
Dans un communiqué publié lundi, le Mouvement international des chefs d’entreprise libanais (Midel), qui regroupe des entrepreneurs locaux et de la diaspora, a déploré les effets dévastateurs de cette guerre sur les PME, qui constituent l’essentiel du tissu entrepreneurial libanais. « Les PME ont perdu leurs liquidités, une grande partie de leurs travailleurs, leur marché local s’est détérioré et elles ont perdu la confiance de leurs clients internationaux. Elles ne peuvent pas survivre plus de quelques mois, et si elles s’effondrent, ce sera un coup fatal pour l’économie libanaise », a souligné son président Fouad Zmokhol, cité dans le communiqué publié à l’issue d’une réunion des membres du Midel.
Le groupe a également appelé les autorités à signer un contrat avec Starlink, le fournisseur d’accès à internet par satellite de SpaceX, et exhorté le Conseil des ministres et les ministres concernés à « accorder des facilités fiscales et douanières » aux PME pour les aider à passer le cap. Il a enfin demandé aux organisations qui envoient de l’aide au Liban de créer un fonds de soutien pour les PME libanaises.
Première baisse des stocks depuis mai
Le PMI est un indice de l’activité économique libanaise basé sur les résultats de sondages envoyés aux directeurs d’achat de 400 entreprises locale. Il reflète une baisse d’activité si sa valeur est inférieure à 50 points, et vice versa. Si la valeur de l’indice est inférieure à celle du mois précédent, cela signifie que la baisse s’est accélérée.
Fady Osseirane explique que « l’escalade de la guerre a entraîné une baisse significative des nouvelles commandes à l’exportation, ce qui a provoqué une baisse cruciale de l’activité de production des entreprises du secteur privé ». Le sous-indice du PMI mesurant la production est tombé à 41,5 points, tandis que celui mesurant les nouvelles commandes a chuté de 44,5 à 40,7, et celui des commandes à l’exportation a dégringolé de 44,3 à 31,2, une chute sans précédent.
Il ajoute que « la perturbation des chaînes d’approvisionnement » a également contribué à ralentir la production, poussant les entreprises du secteur privé à recourir à leurs stocks, qui ont diminué pour la première fois depuis le mois de mai. « En outre, les entreprises du secteur privé ont dû faire face à des prix d’achat plus élevés, les fournisseurs ayant augmenté leurs coûts », ce qui s’est répercuté sur les prix payés par les consommateurs finaux. Il souligne enfin que l’emploi n’a diminué que « de façon marginale, la majorité des entreprises ayant maintenu leurs effectifs inchangés ».
« Enfin, le pessimisme des entreprises du secteur est palpable, avec 84 % des membres du panel interrogés s’attendant à une baisse des niveaux d’activité au cours des 12 prochains mois », conclut Fady Osseirane. Le Midel souligne que la reconstruction du pays, si un cessez-le-feu est décrété, devra être subordonnée à la définition de « fondations solides » et d’une vision unifiée pour éviter un nouvel épisode de destruction.