La clé du déblocage de la présidentielle se trouverait-elle à Bkerké ? La question se pose au vu des appels à ce que le patriarche maronite, Béchara Raï, œuvre pour sortir cette échéance de la paralysie. C’est autour de cette idée que s’articule l’initiative proposée récemment par le « Mouvement du changement » d’Élie Mahfoud (avocat proche des Forces libanaises) au chef de l’Église maronite. Dans ses grandes lignes, la démarche invite le prélat à parrainer un dialogue entre les chefs de file politiques en vue de tenir le scrutin, 22 mois après la fin du mandat de Michel Aoun. Sauf que le patriarche maronite pourrait ne pas être des plus enthousiastes à cet égard.
Élie Mahfoud s’est rendu vendredi dernier à la tête d’une délégation de son mouvement politique à Dimane (siège estival du patriarcat maronite) pour discuter de son projet avec Béchara Raï. La proposition appelle à un dialogue sous la houlette du patriarche en présence du président de la Chambre, Nabih Berry, à la tête de représentants de son camp, notamment le Hezbollah et le Courant patriotique libre. Le texte précise que le chef du législatif n’est pas un acteur neutre, surtout en ce qui concerne la présidentielle, dans la mesure où il appuie, avec le Hezbollah, la candidature du chef des Marada, Sleiman Frangié. « Il ne peut donc pas présider un dialogue », souligne le texte, à l'heure où le maître du perchoir conditionne la convocation d'une séance électorale à la tenue d'un round de pourparlers sous sa houlette. L'initiative ajoute que le patriarche devrait en outre convier le chef des Forces libanaises, Samir Geagea, et celui des Kataëb, Samy Gemayel, à un tel dialogue, auquel participeraient aussi des députés de l’opposition (dont Achraf Rifi et Waddah Sadek, tous deux sunnites), ainsi que le mufti de la République, le président du Conseil supérieur chiite et le cheikh akl druze.
Jusqu'ici, cette démarche n'a pas recueilli l'approbation de Bkerké. « Le patriarche maronite n’a pas besoin des initiatives des uns et des autres pour se mobiliser en vue d’un déblocage », lance à L’Orient-le Jour un proche du prélat sous couvert d’anonymat. Il affirme que la position de Mgr Raï n’a pas bougé d’un iota : il rejette toute démarche à même de consacrer des coutumes constitutionnelles, « alors qu’il suffit de respecter le mécanisme de la Constitution, c’est-à-dire la convocation d'une séance électorale avec des tours de vote successifs. Le futur chef de l’État pourrait alors être élu en une journée », ajoute-t-il. Et le proche de Bkerké de rappeler que Mgr Raï « ne peut pas obliger qui que ce soit à participer » à un dialogue.
Certes, cette prise de position du patriarcat maronite a de quoi enterrer l’initiative du Mouvement du changement, qui n’est pas doté d’un grand poids populaire et politique. Il reste que cette position de Bkerké montre la volonté du patriarche maronite d’éviter une réédition d’anciens scénarios dont il a tiré les leçons. Retour dix ans en arrière : dans la foulée de la présidentielle de 2014 (pour l’élection d’un successeur à Michel Sleiman), Béchara Raï avait réuni les quatre « pôles » maronites (Michel Aoun, Samir Geagea, Amine Gemayel et Sleiman Frangié) en quête d’une entente autour de l’élection de l’un d’eux à la magistrature suprême. Sauf que la démarche n’avait pas porté ses fruits du fait de l'impossibilité de trouver un compromis entre ces rivaux. Plus récemment, en avril 2023, Mgr Raï s’est vu contraint d’user de son autorité morale et religieuse pour convier les députés chrétiens à une simple retraite spirituelle, en vue de paver la voie à un dialogue interchrétien autour de la présidentielle. Encore un pari perdu pour le chef de l’Église maronite. Même le numéro deux du Vatican, Pietro Parolin, n’a pas pu, lors de sa dernière visite au Liban (le 25 juin dernier), rassembler les leaders chrétiens, MM. Geagea et Gemayel ayant évoqué des « raisons de sécurité » pour justifier leur absence. Mais dix jours plus tard, Samir Geagea a lui-même dévoilé la vérité : « Une rencontre interchrétienne serait sans intérêt », a-t-il lancé dans une interview.
Deux mois plus tard, le CPL – qui a repris langue avec Nabih Berry dans le cadre de son recentrage politique – se montre disposé à répondre favorablement à toute initiative qui émanerait de Bkerké. « Nous n’avons jamais rejeté une invitation du patriarche, ni une initiative à même de permettre la tenue de la présidentielle. Nous avons avalisé l’appel de Nabih Berry et nous nous sommes montrés ouverts à l’initiative de l’opposition », commente pour L’OLJ la vice-présidente du CPL pour les affaires politiques, Martine Najm Koteily. Elle fait notamment référence à la feuille de route lancée le 9 juillet dernier par les anti-Hezbollah. Elle est axée sur deux scénarios : le premier prévoyant des concertations informelles avant une séance ouverte, et le second d’abord une séance ouverte, qui serait suspendue (mais non clôturée), pour tenir des concertations en cas de non-élection.
Le duel Berry-FL reprend de plus belle
Ces propositions se sont heurtées au veto du tandem chiite Amal-Hezbollah, qui n’a même pas voulu en discuter avec ses détracteurs, à commencer par les FL. Ces dernières continuent de rejeter tout dialogue avant la présidentielle. « L’Église maronite a déjà tenté, à travers les efforts déployés par (l’évêque maronite d’Antélias) Antoine Bou Najm de débloquer le scrutin. Mais cela n’a pas porté ses fruits parce que le Hezbollah et son camp bloquent l’élection pour imposer leur candidat », souligne le porte-parole du parti chrétien, Charles Jabbour, rappelant que sa formation est contre « la consécration du principe du dialogue avant la présidentielle ». Une position qui a transparu dans un communiqué publié lundi par le parti. « La Constitution n’évoque pas un dialogue avant l’élection présidentielle (…) mais stipule que le président devrait être élu lors d’une séance ouverte avec des tours de vote successifs », peut-on lire dans le texte, en réaction à des propos de M. Berry. Dans une déclaration au quotidien al-Joumhouriya, le président de la Chambre s’est dit prêt à convoquer « immédiatement » un dialogue qui précéderait le scrutin.
Trop d’initiatives tuent l’initiative principale qui consiste à ne pas dévier du sujet principal qui serait le désarmement de ce parti ou son extermination afin de reprendre notre indépendance et notre souveraineté. Seule l’armée libanaise serait légitime à préserver notre pays de toute invasion et non pas une milice qui œuvre pour la foire des mollahs en nous asservissant. On se réveille et on réclame une et une seule condition. Le désarment du HB ou la mort.
12 h 47, le 14 août 2024