
Cette photo prise le 11 octobre 2023 montre une vue aérienne des bâtiments détruits par des frappes aériennes israéliennes dans le camp de Jabalia, dans la ville de Gaza. AFP/ YAHYA HASSOUNA.
Si la guerre s'arrêtait maintenant, le bilan à Gaza pourrait dépasser les 186 000 victimes palestiniennes, comme le calcule un article de la revue médicale britannique The Lancet. Ce bref rapport, publié le 5 juillet, base son estimation sur le bilan officiel publié quotidiennement par le ministère de la Santé à Gaza, et explique que, même si le conflit s'achève, de nombreux habitants de l'enclave palestinienne continueront de mourir en raison de causes « indirectes » liées à la guerre.
« Les conflits armés ont des implications sanitaires indirectes, explique l'article du Lancet. Même si le conflit se termine immédiatement, il continuera d'y avoir de nombreuses morts indirectes dans les mois et années à venir, en raison de maladies reproductives, transmissibles ou non ». Ce bilan « indirect » risque d'être élevé en raison de « l'intensité du conflit, qui a détruit les infrastructures médicales, des pénuries sévères de nourriture, d'eau et du manque d'abris, de l'incapacité de la population à fuir vers des endroits sûrs et de la suspension du financement de l'Unrwa, une des seules organisations humanitaires encore présentes » à Gaza.
Les « morts indirectes » du conflit
La revue scientifique explique que, dans le cas de récents conflits, ce taux de « morts indirectes » est allé du triple du bilan officiel de décès directement liés aux violences, à quinze fois ce chiffre. Elle souligne donc qu'en appliquant une estimation « conservatrice » de quatre morts indirectes par décès direct, et en se basant sur le chiffre de 37 396 morts rapporté le 19 juin pour son calcul, « il n'est pas invraisemblable d'estimer à 186 000, voire plus, le nombre de morts imputable au conflit actuel ». Cela représente, selon le Lancet, 7,9 % de la population du petit territoire palestinien, si l'on prend en considération le nombre total d'habitants de près de 2,4 millions d'habitants calculé en 2022.
Le bilan quotidien du ministère en date du 9 juillet s'élève à 38 243 morts depuis le début de la guerre, ainsi que 88 033 blessés.
Le journal rappelle en outre que, même s'il est de plus en plus difficile pour le ministère gazaoui de la Santé de collecter les données lui permettant d'établir ses bilans quotidiens, en raison de la destruction des infrastructures de l'enclave, et qu'ils sont contestés par Israël, ceux-ci restent considérés comme crédibles par de nombreuses organisations, y compris les services de renseignement israéliens, l'ONU et l'Organisation mondiale de la Santé.
« Sous-estimation » probable du bilan à Gaza
L'article argumente encore que les chiffres officiels émanant de Gaza sont même probablement « sous-estimés » par rapport à la réalité des faits, notamment le fait que, selon l'ONG Airwars, qui fait des rapports « détaillés » des frappes israéliennes, « tous les noms des victimes identifiables ne sont pas inclus dans la liste du ministère », et que l'étendue des destructions laisse penser que le nombre de corps encore sous les décombres est « probablement considérable », avec des « estimations dépassant les 10 000 » dépouilles encore disparues. Se basant sur des images satellites, l'ONU avait estimé le 31 mai 2024, dans son dernier rapport du genre, que 55 % « des infrastructures totales de Gaza » ont été endommagées, soit 135 142 logements, parmi lesquels 36 591 sont entièrement détruits.
Dans ce contexte, le Lancet a appelé à un « cessez-le-feu immédiat et urgent, accompagné d'une distribution de vivres et d'autres ressources fondamentales » à Gaza. Les données du ministère de la Santé à Gaza, seule autorité à faire le décompte des victimes de l'offensive israélienne, seront « cruciales pour l'après-guerre », conclut le Lancet, notamment en ce qui concerne « la restauration des infrastructures et la planification de l'aide humanitaire ».
Cet article me semble pour le moins... fragile. 1-D'abord, le chiffre de 37 396 morts, donné par le Hamas, est invérifiable. Malgré cela, les auteurs l'utilisent pour faire une projection en se basant sur une étude qui aurait montré que le nombre de morts indirectes suite à un conflit est 4 fois plus important que celui des morts directes. Or, le rapport qu'ils citent pour étayer ce ratio ne dit rien de la sorte.
20 h 57, le 09 juillet 2024