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Santé - Entretien express

Treize ans d’interdiction du tabac dans les lieux publics au Liban et toujours « un désordre total »

À l’occasion de la Journée mondiale sans tabac, « L’Orient-Le Jour » fait le point sur la situation au Liban avec le docteur Ghazi Zaatari, spécialiste du tabac auprès de l’OMS.  

Treize ans d’interdiction du tabac dans les lieux publics au Liban et toujours « un désordre total »

Une personne tient un cigare à Gemmayzé, à Beyrouth, en mai 2024. Mohammad Yassine/L’Orient-Le Jour

« Il est interdit de mettre à disposition des produits de tabac et accessoires dans les restaurants, discothèques et lieux clos. » Article 4 de la loi numéro 174, adoptée au Liban en août 2011 par le Parlement. Presque 13 ans plus tard, il est difficile de croire que cette loi est réellement appliquée aujourd’hui.

À l’occasion de la Journée mondiale sans tabac ce 31 mai, L’Orient-Le Jour fait le point sur la situation du tabagisme au Liban avec le docteur Ghazi Zaatari, président du Groupe d’études sur la régulation des produits du tabac lié à l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et membre du département de pathologie et de médecine de laboratoire à l’Université américaine de Beyrouth (AUB).

Pour mémoire

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Voilà bientôt 13 ans que la loi 174 a été adoptée. Où en est-on aujourd’hui au Liban ?

Ce texte a été partiellement appliqué pendant une courte période, jusqu’en 2013 à peu près. Mais l’État n’a depuis rien fait pour s’assurer du respect de cette loi. Comme toujours au Liban, la politique s’en est mêlée... Si bien qu’aujourd’hui, ce texte n’est plus du tout appliqué. Même au Parlement, les députés fument ! C’est totalement inacceptable, une loi qui a été promulguée doit être appliquée.

Pourquoi cette situation, selon vous ?

Parce que les ingérences de l’industrie du tabac avec les décideurs sont nombreuses. Le consommateur est doublement victime d’un lobby du tabac puissant et d’un État absent. En Occident, on a vu émerger des mesures comme le paquet neutre et l’augmentation du prix, ou encore l’interdiction de la publicité pour le tabac sur les réseaux sociaux... Ici, c’est le désordre total ! Vous entrez dans n’importe quel supermarché, vous voyez des cigarettes à l’étalage dès l’entrée, avec de nouveaux produits, des arômes de cigarette électronique. Vous vous asseyez dans de nombreux  restaurants ou cafés, on vous propose immédiatement un narguilé... Tout cela en violation totale de la loi 174.

Malheureusement, la population est habituée à ne pas respecter les lois, puisqu’il n’y a pas de sanction. D’un côté, on vote une loi, et d’un autre, on laisse la production locale et le trafic inonder le marché sans aucun contrôle.

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Avez-vous remarqué une hausse de la consommation ces dernières années ? Si oui, peut-on la lier aux crises qui frappent le Liban ?

Des études prouvent effectivement un lien entre la consommation de tabac et le fait de vivre dans un pays « sous tension ». Deux facteurs favorisent cette consommation : le stress psychologique et l’absence de lois, de régulation. Nous sommes malheureusement un des pires pays de la région en la matière... Actuellement au Liban, on estime que le tabagisme est responsable de quatre cancers sur six.

Un combat perdu d’avance ?

On n’a pas le choix, il faut continuer. J’ai 70 ans passés, je sais dans quel pays je vis, mais on ne peut pas se résigner, pour nos enfants et nos petits-enfants. En tant que médecin, ça me désole de voir passer devant moi six cas de cancer par jour...

Il y a près de deux mois, le Conseil constitutionnel a invalidé un article du budget qui prévoyait une forte hausse des prix du tabac. Le tabac devrait-il coûter plus cher ?

Des études ont prouvé que l’augmentation des prix est le moyen de dissuasion qui fonctionne le mieux. On estime que tout dollar ajouté au prix d’un paquet réduit la consommation de cigarettes de 6 à 7 %. Et dans tous les pays qui augmentent les prix du tabac, la consommation chute mécaniquement. Quand on touche à la poche des gens, ça marche...

« Il est interdit de mettre à disposition des produits de tabac et accessoires dans les restaurants, discothèques et lieux clos. » Article 4 de la loi numéro 174, adoptée au Liban en août 2011 par le Parlement. Presque 13 ans plus tard, il est difficile de croire que cette loi est réellement appliquée aujourd’hui.À l’occasion de la Journée mondiale sans tabac ce 31 mai, L’Orient-Le Jour fait le point sur la situation du tabagisme au Liban avec le docteur Ghazi Zaatari, président du Groupe d’études sur la régulation des produits du tabac lié à l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et membre du département de pathologie et de médecine de laboratoire à l’Université américaine de Beyrouth (AUB). Pour mémoire Lancement de la campagne de sensibilisation au tabagisme dans les écoles Voilà...
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