
Jared Kushner lors d'une interview le 29 janvier 2020, à Washington. Drew Angerer/Getty Images/ AFP
Le gendre de Donald Trump et son ancien conseiller principal en politique étrangère, Jared Kushner, a loué le potentiel « très précieux » de la « propriété en bord de mer » de Gaza et suggéré qu'Israël devrait évacuer les civils pendant qu'il « nettoie » l'enclave, lors d'un entretien avec l'Université de Harvard. Les détails de l'interview, qui remonte au 15 février, ont été publiés par le quotidien britannique The Guardian et suscité de vives réactions en ligne.
Sous la présidence de M. Trump (2017-2021), M. Kushner a été chargé de préparer un plan de paix pour le Moyen-Orient, et bien qu'il ait déclaré ne pas faire partie de la campagne présidentielle de son beau-père en 2024, il semble y être impliqué en tant que conseiller informel.
« Les propriétés en bord de mer de Gaza pourraient être très précieuses si les gens se concentraient sur le développement des moyens de subsistance », a déclaré M. Kushner à son intervieweur, le professeur Tarek Masoud, président de la faculté Middle East Initiative de Harvard.
« C'est une situation un peu malheureuse, mais du point de vue d'Israël, je ferais de mon mieux pour faire partir les gens et nettoyer ensuite », a poursuivi M. Kushner. « Je ne pense pas qu'Israël ait déclaré qu'il ne voulait pas que les gens reviennent par la suite.
Certains hauts responsables du gouvernement israélien, comme le ministre de la Sécurité nationale Itamar Ben-Gvir, ont ouvertement appelé à un transfert massif de population.
M. Kushner a également affirmé qu'il serait possible d'évacuer les civils de la ville de Rafah vers l'Égypte « avec diplomatie », bien que Le Caire insiste qu'il n'acceptera pas des Palestiniens déplacés et qu'une opération militaire à Rafah mettrait en péril ses relations avec Israël.
« Mais en plus de cela, je ferai passer un bulldozer dans le Néguev (une zone désertique du sud d'Israël, ndlr). J'essaierai de déplacer des gens là-dedans, a ajouté M. Kushner. Je pense que c'est une meilleure option ».
Surpris par ces propos, son interlocuteur a demandé à M. Kushner de préciser s'il s'agissait de quelque chose qu'il avait entendu de la part d'Israéliens : « Les gens en Israël parlent-ils sérieusement de cette possibilité ? ». Il a répondu qu'il ne savait pas : « Je suis assis à Miami Beach en ce moment, je regarde la situation et je me dis : que ferais-je si j'étais là-bas ? ».
« Plus rien ne me choque »
L'interview de M. Kushner a suscité une tempête de réactions sur les réseaux sociaux.
« Ils n'essaient même plus de cacher leur colonialisme et leur racisme ! Plus rien ne me choque », a écrit sur X (ex-Twitter) le pasteur et théologien chrétien palestinien Munther Isaac.
Jared Kushner says Gaza’s "waterfront property could be very valuable... But from Israel’s perspective I would do my best to move the people out and then clean it up"
— Munther Isaac منذر اسحق (@MuntherIsaac) March 20, 2024
They are not even trying to hide their colonialism and racism anymore! Nothing shocks me anymore.…
Le journaliste de The Economist Gregg Carlstrom s'est également exprimé sur X, écrivant : « Kushner réalise ici un coup de chapeau (trois buts au cours d'une même partie, ndlr) avec des réflexions qui contrarieraient à la fois les Palestiniens (expulsons les Gazaouis pendant que nous construisons des appartements), les Égyptiens (peut-être que le président Sissi les prendra) et les Israéliens (peut-être que nous pouvons les envoyer dans le Néguev) ».
Kushner scores a hat trick here with musings that would upset Palestinians (let's expel Gazans while we build some condos), Egyptians (maybe Sisi will take them) and Israelis (maybe we can stick them in the Negev) all at the same time https://t.co/cSDU31Dyw9
— Gregg Carlstrom (@glcarlstrom) March 20, 2024
Pour tous ceux qui ont conclu un accord avec Kushner dans le passé, voici à qui vous avez eu affaire », a de son côté écrit Andreas Krieg, professeur associé au King's College.
M. Kushner a répondu aux réactions négatives en affirmant que certains avaient malhonnêtement sélectionné des parties de la discussion. « Pour ceux qui utilisent malhonnêtement des extraits de mes propos tenus il y a un mois à Harvard, pour faire du sensationnel, les voici dans leur intégralité... J'ai exprimé ma consternation devant le fait que le peuple palestinien a vu ses dirigeants gaspiller des décennies d'aide occidentale en tunnels et en armes plutôt qu'en amélioration de leurs conditions de vie ».
For those dishonestly using selected parts of my remarks from 1 month ago at Harvards @Kennedy_School to sensationalize, here they are in full….
— Jared Kushner (@jaredkushner) March 19, 2024
I expressed my dismay that the Palestinian people have watched their leaders squander decades of Western aid on tunnels and weapons… https://t.co/Job4eKaaOn
« Je m'en tiens à cela et je crois que la vie du peuple palestinien ne s'améliorera que lorsque la communauté internationale et les citoyens commenceront à demander des comptes à leurs dirigeants », a-t-il écrit sur X, en renvoyant à la vidéo complète de l'entretien.
Depuis les remarques de M. Kushner, M. Trump a critiqué à la fois Israël qui cherche à maintenir un soutien bipartisan aux États-Unis et les juifs américains qui votent pour les démocrates, estimant qu'ils détestent leur religion et devraient avoir honte d'eux-mêmes.
En décembre dernier, une société immobilière israélienne avait provoqué un scandale similaire après avoir fait de la publicité sur ses réseaux sociaux pour des projets de colonisation à Gaza. La compagnie Harey Zahav a par la suite indiqué que les annonces étaient censées être « satiriques », selon un article publié à l'époque par le quotidien Haaretz. « Nous ne construisons pas et nous n'avons pas l'intention de construire, a déclaré le PDG de la société, Zeev Epshtein, au journal israélien. Nous souhaitons que cela se produise, mais c'est la décision de l'État, sur laquelle nous n'avons aucune influence ».
Comme quoi les gendres, parfois, posent des problèmes…..
21 h 15, le 21 mars 2024