La famille palestinienne Al-Naji partage un repas d'iftar, lors de la rupture du jeûne, au milieu des ruines de leur maison familiale, le premier jour du mois de jeûne musulman du Ramadan, à Deir el-Balah dans le centre de la bande de Gaza, le 11 mars 2024, au milieu des batailles en cours entre Israël et le groupe militant du Hamas. Photo AFP
Les agences américaines de renseignement ont déclaré lundi dans un rapport que les Etats-Unis sont confrontés à un « ordre mondial de plus en plus fragile », mis à rude épreuve par la concurrence des grandes puissances, les défis transnationaux et les conflits régionaux, alors que les responsables de ces agences témoignaient devant le Congrès.
« Une Chine ambitieuse mais anxieuse, une Russie conflictuelle, certaines puissances régionales, comme l'Iran, et des acteurs non étatiques plus compétents remettent en question les règles de longue date du système international ainsi que la primauté des Etats-Unis au sein de celui-ci », ont déclaré les agences dans leur évaluation annuelle de la menace pour 2024.
Au sixième mois d’une attaque militaire de grande envergure menée par Israël contre le Hamas à Gaza, depuis les attaques du 7 octobre 2023, le rapport souligne les risques d'un élargissement du conflit.
Dans son témoignage devant la commission sénatoriale du renseignement, la directrice du renseignement national Avril Haines s'est dit préoccupée par le fait que le conflit à Gaza entre Israël et le Hamas pourrait propager l'insécurité à l'échelle mondiale. « La crise à Gaza est un exemple frappant de la façon dont les développements régionaux peuvent avoir des implications plus larges, voire mondiales », a déclaré Avril Haines.
Elle a relevé les attaques des milices houthies sur les navires et a déclaré que les groupes militants al-Qaïda et Etat islamique, « inspirés par le Hamas », ont donné l'ordre à leurs partisans de mener des attaques contre les intérêts israéliens et américains.
Selon le rapport des renseignements américains, l’Iran cherche à utiliser le conflit de Gaza pour « tenter de dissuader les autres États du Moyen-Orient de resserrer leurs liens avec Israël », tout en vantant son rôle en tant que champion de la cause palestinienne. Depuis des décennies, « l’Iran cultive des liens, fournit des soutiens, des financements, des armes et de la formation à ses partenaires et mandataires dans tout le Moyen-Orient, notamment au Hezbollah libanais, aux Houthis, aux milices soutenues par l'Iran en Irak et en Syrie », précise le document.
« L'Iran, tout en évitant un conflit direct avec Israël et les Etats-Unis, restera une menace pour Israël, les alliés et les intérêts des États-Unis dans la région bien après le conflit de Gaza », estime aussi le rapport qui prévoit que le pays des mollahs continuera probablement d’armer et d’aider ses alliés à menacer les États-Unis et à soutenir le Hamas et d'autres groupes qui cherchent à bloquer un accord de paix entre Israël et les Palestiniens. « Tout en évitant un conflit direct avec Israël ou les États-Unis, l’Iran a néanmoins permis à des dizaines de milices de lancer des roquettes, des missiles et des drones contre les forces américaines en Irak et en Syrie, a facilité les échanges de tirs entre le Hezbollah et Israël à la frontière nord du Liban, de même que les tirs de missiles et d'armes à feu par les houthis », lit-on dans ce document.
Après une interruption de l’audience par un manifestant qui appelait à protéger les civils à Gaza, le directeur de la Central Intelligence Agency (CIA), William Burns a été interrogé sur les enfants vivant dans l'enclave palestinienne. « La réalité, c'est qu'il y a des enfants qui meurent de faim. Ils souffrent de malnutrition parce que l'aide humanitaire ne peut pas leur parvenir. Il est très difficile de distribuer efficacement l'aide humanitaire en l'absence de cessez-le-feu », a-t-il déclaré.
Russie Ukraine Chine
Plus de deux ans après l'invasion de l'Ukraine par la Russie, le rapport se concentre par ailleurs sur les menaces de la Chine et de la Russie, les plus grands rivaux des États-Unis.
La Chine fournit une assistance économique et sécuritaire à la Russie qui mène la guerre en Ukraine, en soutenant la base industrielle de la Russie, selon le rapport qui avertit également que Pékin pourrait utiliser la technologie pour tenter d'influencer les élections américaines de cette année. « La Chine pourrait tenter d'influencer les élections américaines de 2024 à un certain niveau en raison de son désir de mettre à l'écart ses détracteurs et d'amplifier les divisions de la société américaine », indique le rapport.
Dans ce cadre, Avril Haines a exhorté les législateurs à approuver l'octroi d'une aide militaire supplémentaire à l'Ukraine. Il est « difficile d'imaginer comment l'Ukraine » pourrait tenir les territoires qu'elle a repris à la Russie sans une aide accrue de Washington, a-t-elle déclaré.
Le rapport sur les menaces a noté que le commerce entre la Chine et la Russie a augmenté depuis le début de la guerre en Ukraine, et que les exportations chinoises de biens à usage militaire potentiel ont été multipliées par plus de trois depuis 2022.
Le président républicain de la Chambre des représentants, Mike Johnson, un allié de l'ancien président Donald Trump, a jusqu'à présent refusé de convoquer un vote sur un projet de loi qui fournirait 60 milliards de dollars supplémentaires à l'Ukraine. La mesure a été adoptée par le Sénat, dirigé par les démocrates.
Liens mondiaux, risques mondiaux
William Burns, a déclaré, à l’instar d’Avril Haines, que le maintien du soutien à l'Ukraine enverrait un message à la Chine concernant une agression contre Taïwan ou en mer de Chine méridionale.
« Nous pensons que (le dirigeant chinois) Xi Jinping a été dégrisé, vous savez, par ce qui s'est passé. ... Il ne s'attendait pas à ce que l'Ukraine résiste avec le courage et la ténacité dont sa population fait preuve », a déclaré M. Burns.
L'émotion est montée d'un cran au cours de l'audition lorsque certains sénateurs ont abordé la question de l'immigration à la frontière entre les États-Unis et le Mexique, un sujet au coeur de la campagne de M. Trump pour battre le président démocrate Joe Biden lors des élections de novembre.
Le directeur du FBI, Christopher Wray, s'est dit préoccupé par les « implications terroristes d'un ciblage potentiel des vulnérabilités à la frontière », notant les menaces croissantes de la part d'Américains inspirés par des groupes islamistes et d'autres militants étrangers depuis l'attaque du Hamas contre Israël le 7 octobre. « La menace est passée à un tout autre niveau », a déclaré M. Wray.
Ce texte est une traduction d’un article initialement publié en anglais par l’agence Reuters.
commentaires (2)
La paix ne se fait qu'entre antagonistes , elle ne se fait pas entre les gentils du même bord . Que l'Occident comprenne enfin , que négocier avec l'Iran est essentiel , et arriver à un accord avec l'Iran est la seule solution pour épargner au monde entier plus de tragédies et de catastrophes douloureuses et inutiles . Chacun devrait avoir son dû et l'équité prévalera .
Chucri Abboud
14 h 57, le 12 mars 2024