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Santé - Femmes

Règles douloureuses : quelles réponses adaptées ?

Règles douloureuses : quelles réponses adaptées ?

« Aujourd’hui, les femmes ont compris que ce n’était pas normal d’avoir mal. » Photo d’illustration Bigstock

Suivre son cycle sur une application, diminuer le syndrome prémenstruel à l’aide de compléments alimentaires, recourir à des patches contre la douleur : la levée du tabou des règles s’est accompagnée de l’avènement d’un véritable marché dans un domaine longtemps délaissé par la science. À Paris, les centres de soins et boutiques dédiés au bien-être féminin ont fleuri, avec un concept : l’« empowerment », ou émancipation, pour ne plus subir son cycle menstruel. Laury Gaube, de l’association Règles élémentaires, qui milite contre la précarité menstruelle, y voit « le signe qu’il se passe enfin quelque chose », après des siècles de « désintérêt collectif autour des règles et de la santé des femmes ». La communauté créée par son association rassemble beaucoup de « personnes menstruées en souffrance, des jeunes filles notamment qui ne pensent qu’à ça, d’autant que ça revient tous les mois ».

Selon une étude menée par les autorités sanitaires françaises sur plus de 20 000 femmes, 90 % d’entre elles souffrent de dysménorrhée (douleurs menstruelles). Dans les cas les plus graves, c’est un véritable handicap « scolaire, social, familial », pointe Laury Gaube, qui rencontre des personnes « vraiment désespérées, prêtes à tout essayer ».

Quitte à beaucoup dépenser : certains centres dédiés ne proposent que des consultations non médicales, donc non remboursées, avec des naturopathes, magnétiseurs, ostéopathes. Mêlant conseils beauté, « sexo » et santé, ces boutiques vendent aussi des produits ciblant les douleurs de règles, aux allégations thérapeutiques non vérifiées.

« Élixir » contre le syndrome des ovaires polykystiques, gélules pour faciliter la digestion pendant les règles, patches au CBD à se coller sur le ventre... Une approche « très mercantile » que déplore Lucia Rugeri, hématologue à la tête d’une consultation dédiée aux règles abondantes à Lyon.

« Sur les tisanes ou les compléments alimentaires, il n’y a pas d’études publiées, et c’est extrêmement cher, remarque-t-elle. Dans l’exemple du traitement par le fer (pour les femmes anémiées par leurs règles, NDLR), les compléments vendus sont mieux tolérés mais contiennent quatre fois moins de fer que dans les gélules remboursées. » Ce qui la « gêne beaucoup », c’est quand ces sites ou praticiens ne renvoient pas les femmes vers un médecin. Cette tendance répond néanmoins à une vraie demande, reconnaît cette spécialiste, regrettant une prise en charge médicale insuffisante. Dans son service, des femmes viennent « de toute la France » pour des règles abondantes, « une problématique invisible (...) peu ou mal traitée », alors que des traitements adaptés sont disponibles. « Certaines femmes sont transfusées aux urgences à causes de règles hémorragiques et repartent chez elles sans rien ! » dénonce Lucia Rugeri, constatant le « peu de travaux sur cette question et peu d’études sur les mécanismes du dysfonctionnement hormonal ».

À l’hôpital de la Croix-Rousse, elle propose une prise en charge multidisciplinaire sur une demi-journée, comprenant une consultation avec un gynécologue, une échographie de l’utérus, un bilan sanguin puis une consultation avec la spécialiste.

La gynécologue médicale Catherine Fohet se félicite qu’« aujourd’hui, les femmes aient compris que ce n’était pas normal d’avoir mal ». Elle raconte que longtemps les patientes elles-mêmes n’abordaient pas le sujet en consultation, s’inscrivant dans une longue tradition de silence sur ces douleurs. Elle aussi juge indispensable de voir un médecin, car « des douleurs importantes peuvent être le signe d’une endométriose, mais aussi d’une infection pelvienne ou autre ».

Avec la pilule contraceptive, dans certains cas, ou des

anti-inflammatoires « pris au bon moment, c’est-à-dire avant que la douleur ne s’installe (...) on peut résoudre 80 % des problèmes de douleurs de règles », estime-t-elle. Prendre le problème à la racine est d’autant plus important, selon elle, « que si on laisse la douleur s’installer, elle devient chronique avec une hypersensibilité qui complique son traitement ».

La médecin n’est pas pour autant opposée à une approche globale, allant au-delà des traitements face à ces douleurs qui, par leur répétition, peuvent générer un stress important : « On sait aujourd’hui, grâce à des études, que le mouvement – marche, yoga ou autre – permet de mobiliser les tissus et donc de soulager la douleur. »

Julie PACOREL/AFP

Suivre son cycle sur une application, diminuer le syndrome prémenstruel à l’aide de compléments alimentaires, recourir à des patches contre la douleur : la levée du tabou des règles s’est accompagnée de l’avènement d’un véritable marché dans un domaine longtemps délaissé par la science. À Paris, les centres de soins et boutiques dédiés au bien-être féminin ont...

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