Slim sermonne Joseph Aoun : Il a besoin de ma permission pour voyager

Le ministre sortant de la Défense, Maurice Slim (proche du Courant patriotique libre), s’en est pris jeudi au commandant de l’armée, Joseph Aoun, l’accusant de l’avoir contourné en se rendant la semaine dernière en Italie, où il a été invité à discuter des « moyens de soutenir » la troupe avec ses homologues occidentaux. « Si le chef de l’armée veut voyager, il a besoin de ma permission », a martelé M. Slim au micro de la chaîne al-Jadeed.

Une prise de position qui intervient à l’heure où le déplacement du général Aoun fait débat. Le numéro un de la troupe n’a, en effet, pas le droit de quitter le territoire tant que le poste de chef d’état-major – censé assurer l’intérim en son absence – reste vacant. Certes, le Conseil des ministres a nommé, le 8 février, le général Hassane Audi à ce poste, au grand dam du camp aouniste (qui considère que le gouvernement transgresse ses prérogatives d’expédition des affaires courantes). Toutefois, si le général Audi a d’ores et déjà assumé ses fonctions, les décrets de sa nomination n’ont pas encore été publiés dans le Journal officiel, ce qui pousse certains, notamment du côté du CPL, à considérer qu’elle est nulle et non avenue. Ce camp considère par conséquent que Hassane Audi n’est pas en mesure d’assurer l’intérim, et que le général Aoun n’a donc pas le droit de quitter le territoire. « Nous considérons effectivement que le poste de chef d’état-major est toujours vacant d’un point de vue légal, souligne un proche de M. Slim. De plus, même quand l’intérim peut être assuré normalement, le chef de l’armée doit informer le ministre de la Défense de son intention de quitter le pays. »

Les relations entre MM. Slim et Aoun sont loin d’être au beau fixe, le camp aouniste considérant le soldat en chef comme une menace politique. Le 15 décembre, le Parlement a retardé d’un an le départ à la retraite de Joseph Aoun, provoquant l’ire du CPL. La nomination, un mois plus tard, et conformément aux souhaits du général Aoun, de Hassane Audi a été vécue comme un nouveau revers par ce camp, qui menace de présenter un recours devant le Conseil d’État. « Avant la fin du mandat du président Michel Aoun, j’ai appelé le Premier ministre Nagib Mikati à nommer un chef d’état-major, en vain », a regretté M. Slim sur al-Jadeed. « Puis j’ai informé M. Mikati que notre gouvernement, désormais démissionnaire, ne pouvait plus procéder à cette démarche », a-t-il jouté. Mais le cabinet a fini par contourner le veto du ministre de la Défense, invoquant une situation exceptionnelle du fait de la guerre en cours au Liban-Sud et se basant sur une étude juridique menée par le secrétaire général du Conseil des ministres, Mahmoud Makkiyé. « Le Conseil des ministres a outrepassé les prérogatives de mon ministère, et cela est inacceptable », a martelé M. Slim dans son interview. Et de mettre en garde : « Dès lors, je ne vais pas reconnaître la décision (de nommer un chef d’état-major). Personne ne peut m’imposer quoi que ce soit, même le Premier ministre ! »