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Politique - Éclairage

Pourquoi le Hamas est revenu en force au Liban-Sud

La revendication, mercredi, par les Brigades al-Qassam du tir de 40 missiles Grad vers le nord d’Israël est porteuse de plusieurs messages.

Pourquoi le Hamas est revenu en force au Liban-Sud

Le chef du bureau politique du Hamas, Ismaïl Haniyé, adressant un message préenregistré et diffusé lors d’une conférence de presse à l’Institution internationale d’al-Qods, à Beyrouth, le 28 février 2024. Mohammad Azakir/Reuters

Le Hamas se manifeste de nouveau... au Liban. Mercredi, les Brigades Ezzedine al-Qassam, la branche militaire du mouvement islamiste palestinien, ont annoncé avoir lancé des dizaines de roquettes Grad sur deux sites militaires dans le nord d’Israël à partir du Liban-Sud, alors que les violences s’intensifiaient entre le Hezbollah et l’armée israélienne sur ce front. Un retour sur scène fracassant alors que le Hamas faisait, depuis un certain temps, profil bas. Du moins publiquement.

La raison officielle avancée pour justifier cette opération de grande envergure, c’est qu’elle a été effectuée « en riposte aux massacres sionistes contre les civils dans la bande de Gaza et à l’assassinat » du numéro deux du Hamas, Saleh el-Arouri, et de six de ses compagnons, visés en plein cœur de la banlieue sud de Beyrouth, le 2 janvier dernier, selon un communiqué du mouvement.

Monter les enchères
L’explication de cette opération pourrait cependant se trouver ailleurs. D’autant que la formation n’avait plus revendiqué d’opérations à partir du Liban depuis pratiquement novembre dernier.
Le contexte d’abord : alors que les négociations menées notamment par le Qatar pour parvenir à une trêve de plusieurs semaines à Gaza semblent s’enliser, la « réapparition » militaire du Hamas au Liban serait destinée à mettre la pression dans une tentative de conforter sa position sur la table des pourparlers en cours. Une manière de dire que le mouvement ne lâche rien et reste décidé à poursuivre ses opérations militaires. « Il semble que les négociations à Doha n’ont mené jusqu’ici nulle part. Le Hamas fait aujourd’hui monter les enchères », décrypte Karim Bitar, politologue.   

Une seconde raison à rechercher serait l’escalade récente à laquelle a recouru Israël en élargissant le périmètre de ses frappes au Liban. Lundi dernier, pour la première fois depuis la guerre de 2006, des raids israéliens ont visé la région de Baalbeck, dans la Békaa, ce fief chiite situé à environ 100 kilomètres de la frontière. Un développement qui aurait poussé le Hamas, en concertation avec le Hezbollah, à revendiquer le tir des 40 roquettes Grad. « Le Hamas n’agit que sous la houlette du Hezbollah. S’il s’est abstenu ces derniers temps de parrainer des opérations militaires, c’est probablement parce que le parti chiite faisait l’affaire. D’autant que les affrontements étaient plutôt confinés à une certaine ampleur », commente Souheil Natour, membre du comité central du Front démocratique pour la libération de la Palestine (FDLP).

D’ailleurs, l’on ne saura jamais exactement si c’est le Hamas qui a effectivement tiré ces missiles ou plutôt le Hezbollah, dans la mesure où les deux formations se partagent, depuis le début des opérations, un jeu de rôles. Sauf que cette fois-ci, le parti chiite a clairement voulu accorder le crédit au Hamas. De source proche du Hezbollah, on apprend ainsi que les roquettes tirées le 14 février dernier contre Safed, une base militaire au nord d’Israël, étaient « assurément l’œuvre du Hamas » et non du Hezb. Cette opération n’avait toutefois été revendiquée par aucune des deux formations pro-iraniennes.

À prendre également en compte le fait que la marge de manœuvre du Hamas n’est pas toujours aisée en présence notamment de l’armée libanaise, même si celle-ci n’est pas déployée en force à la frontière sud. « Si l’armée peut à la limite coordonner, dans une certaine mesure, son action avec le Hezb, elle ne peut le faire avec les Palestiniens qui sont prohibés de lancer des actions à partir du Liban », commente une source anonyme proche du parti de Hassan Nasrallah. Elle fait allusion aux déclarations ministérielles successives qui légitiment la « résistance » mais non l’action des factions palestiniennes présentes au Liban.

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Le retour sur scène du mouvement palestinien serait par ailleurs lié aux menaces proférées par l’État hébreu d’attaquer Rafah – zone limitrophe avec l’Égypte – où sont réfugiés un peu plus d’un million de Palestiniens ayant fui les bombardements à Gaza. Le chef du bureau politique du Hamas, Ismaïl Haniyé, a d’ailleurs donné le ton mercredi. Dans un message préenregistré et diffusé lors d’une conférence de presse à l’Institution internationale d’al-Qods à Beyrouth, il a appelé les pays arabes « à affronter l’ennemi et à freiner son élan en vue de le dissuader d’envahir Rafah ». 

« C’est l’aspect symbolique de l’opération, qui serait une sorte de rappel de la part du Hamas qu’il détient des missiles qu’il peut utiliser en temps voulu », estime M. Natour. Au-delà de la symbolique, ce serait plutôt une tactique porteuse de plusieurs messages.  Tout d’abord,  il s’agirait de rappeler que « si l’État hébreu devait prendre la décision d’élargir la guerre contre le Liban, le principe de “l’unité des fronts” est toujours de mise », souligne M. Bitar.

Israël sait désormais que le Hezbollah est réticent à élargir le front. Il sait également que son parrain iranien veut tout autant l’éviter, mais aussi les États-Unis qui déploient tout leur arsenal diplomatique pour empêcher un tel scénario. Des points de vulnérabilité que le parti chiite tenterait de camoufler. « Le Hezbollah est en train de répondre en démontrant qu’il a beaucoup de cartes en main. C’est une manière de dire que même si le Hamas est en train de prendre des coups à Gaza, il peut les rendre à partir du Liban », décrypte Michael Young, rédacteur en chef de Diwan.

Ce serait ainsi une manière de renflouer le Hamas, pour dire que les promesses proférées par l’État hébreu d’anéantir ce mouvement ne sont que des slogans creux, le mouvement ayant des tentacules et une marge de manœuvre ailleurs. « Plus le Hamas s’affaiblit à Gaza, plus il faut s’attendre à une manifestation de plus en plus musclée du mouvement au Liban-Sud », analyse Riyad Kahwaji, un expert militaire. « Lorsque la guerre à Gaza se terminera et une fois que l’infrastructure du mouvement islamiste sera complètement détruite, le Hezbollah va transposer la guerre au Liban-Sud », poursuit-il. 

Des prédictions d’autant plus inquiétantes selon les analystes qu’Israël semble disposé à en finir une fois pour toutes avec ce qu’il considère être « l’abcès » du Liban-Sud, par la force à défaut d’un règlement diplomatique qui tarde à venir. Karim Bitar craint dans ce cadre que les fortes pressions exercées sur le cabinet de guerre israélien pour attaquer le Liban ne finissent par aboutir. D’où la tentative de l’« axe de la résistance » de rétablir un certain équilibre des forces.

Le Hamas se manifeste de nouveau... au Liban. Mercredi, les Brigades Ezzedine al-Qassam, la branche militaire du mouvement islamiste palestinien, ont annoncé avoir lancé des dizaines de roquettes Grad sur deux sites militaires dans le nord d’Israël à partir du Liban-Sud, alors que les violences s’intensifiaient entre le Hezbollah et l’armée israélienne sur ce front. Un...

commentaires (11)

Ils sont revenus pour essayer surpasser l'OLP dans la destruction du Liban, certes avec la connivence de certains libanais, aujourd'hui les barbus.

Zeidan

19 h 17, le 01 mars 2024

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Commentaires (11)

  • Ils sont revenus pour essayer surpasser l'OLP dans la destruction du Liban, certes avec la connivence de certains libanais, aujourd'hui les barbus.

    Zeidan

    19 h 17, le 01 mars 2024

  • Les palestiniens ont détruit le Liban 1975 et ils continuent ils veulent une patrie et l’ont trouvé avec l’aide d’israël

    Eleni Caridopoulou

    18 h 34, le 01 mars 2024

  • Le Hamas n'a jamais quitté le Liban!Pour ceux qui ont la mémoire courte, il y a eu des combats sanglant entre le Hamas et le Fateh dans les camps palestiniens proches de Sidon!Une partie du pays est déjà divisé et sous occupation étrangère !Un gouvernement qui n'a aucun contrôle sur la situation.Le HB va nous sacrifier comme les bons moutons que nous sommes!Si Israël voulait occuper le Liban, en 20 ans qu'ils sont restés chez nous, ils auraient ANNEXER le Sud.Garder vos peurs de la propagande Iranienne dans les poubelles!

    Marwan Takchi

    16 h 11, le 01 mars 2024

  • Quelle humiliation! Des étrangers en guerre, qui viennent comme bon leur semble, attirer le malheur qui est le leur, sur notre pays et son peuple! Et tout ca, en face de l'armée libanaise qui est plus une décoration du champ de bataille, que comme protectrice des libanais! Les membres du HB se disent libanais eux aussi! Je suis venu à croire qu'Israël finalement, peut nous libérer des deux mouvements menaçants de notre pays! Ils me font plus peur qu'Israël!

    Michel M. Habib

    15 h 46, le 01 mars 2024

  • En bon entroreneur à la solde d'israël, voilà que le hamas contribue à lentreprise type sarl pour attirer israel et lui permettre de bien s'asseoir au sud tout comme il l'a fait à gaza... bon business

    Wlek Sanferlou

    14 h 29, le 01 mars 2024

  • C'est une évidence que le mouvement Hamas n'a rien compris des réaction du régime assassin à Israël, soit le mouvement s'en fout. et reste entêter à poursuivre ses opérations militaires coûte que coûte. Que ce soi en Palestine ou au Liban. Ou bien, ce mouvement et du coup ces alliés libanais font l'affaire de Natanyahu.

    Sarkis Dina

    12 h 48, le 01 mars 2024

  • Pourquoi ils sont revenus? Ils ne sont jamais partis. Ils sont là couverts par le HB qui leur donne l’ordre d’étendre la guerre au risque de faire de notre pays un deuxième gaza, soucieux de leur réputation et de leur lâcheté. 25.000 gazaouis ont été sacrifiés pendant que eux se cachaient dans les abris qui devaient accueillir plutôt les civils, et maintenant ils viennent s’en prendre à notre pays et à son peuple tout en s’abritant dans les tunnels conçus en amont pour les abriter en laissant les civils à découvert et sous les bombes destructrices pour leur pseudo cause. Non mille fois non.

    Sissi zayyat

    12 h 04, le 01 mars 2024

  • L'armée libanaise doit contrôler le sud mais n'a pas les moyens financiers et matériels pour le faire. Les États-Unis ne veulent pas l'aider de peur que le matériel fourni finisse dans les mains des groupes paramilitaires. Donc, on laisse l'armée s'affaiblir et les groupes armées grandir.. peut-être pour justifier conquête du sud?

    Fuzzy

    10 h 01, le 01 mars 2024

  • Et les libanais dans tout ceci? Et la république libanaise ? Et ce qu’en pensent les citoyens de ce pays? Non « les occupants » qui se croient en territoire conquis ? Et la soi disant opposition libanaise ? Et toutes ces belles paroles électorales de ces nouveaux députés soit disant du renouveau ? Et qu’en pensent les candidats à l’élection ( nomination) présidentielles ? Silence radio du côté de franjieh? Pour l’autre candidat , de l’opposition….n’en parlons pas… nous ne savons même pas s’il existe encore !!! ( d’ailleurs même son nom, je ne m’en souviens plus)

    LE FRANCOPHONE

    09 h 30, le 01 mars 2024

  • « Lorsque la guerre à Gaza se terminera et une fois que l’infrastructure du mouvement islamiste sera complètement détruite, le Hezbollah va transposer la guerre au Liban-Sud » J’ai toujours pensé que c’était là le vrai état final recherché, inavouable, de l’opération du 7 octobre. Par cet état final recherché, le grand Israël safavide veut achever sa prise de pouvoir sur le Croissant Fertile EN PRÉTENDANT que celle-ci est LE Jihad contre l’entité sioniste. Alors que donner le Liban au Hamas c’est tuer en premier le Liban et par concomitance la cause palestinienne.

    Citoyen libanais

    06 h 43, le 01 mars 2024

  • OU EST NOTRE ETAT FANTOME AU TRIO DE NOTRE MALHEUR ? MAIS OU EST NOTRE ARMEE NATIONALE... COMMENT LES HAMASSIS SONT PASSES CHEZ NOUS ET PRENNENT LA LIBERTE DE GUERROYER DE CHEZ NOUS ?

    LA LIBRE EXPRESSION

    00 h 39, le 01 mars 2024

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