Établie à Chypre, la société Sfeir Bancorp Limited fondée en 2011 par le président de l’Association des banques au Liban (ABL) Sélim Sfeir et actionnaire minoritaire de la Bank of Beirut (à hauteur de 4,68 %) , dont M. Sfeir est le PDG, aurait vu les actifs de ce dernier augmenter de près de 21 % entre fin 2019 et fin 2020. C’est en tout cas ce que révèle un pan de l’enquête « Cyprus Confidential » du Consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ) – au sein duquel plus de 250 journalistes de 69 médias dans 55 pays, qui revient sur l’utilisation de l’île européenne comme refuge financier à certains hommes d’affaires et hommes politiques internationaux.
Selon le média libanais Daraj, qui a publié l'article, les documents repris dans l’enquête révèlent que la hausse des actifs de Sélim Sfeir a commencé en 2016 – année de mise en place des fameuses ingénieries financières par l'ancien gouverneur de la Banque centrale (BDL) Riad Salamé – mais qu’elle s’est « considérablement accentuée » après le déclenchement de la crise économique et financière au Liban fin août 2019. Ainsi, les actifs chypriotes du président de l’ABL seraient passés « de 37,2 millions à 45,5 millions de dollars durant la seule année 2019, et jusqu’à 55 millions de dollars à fin 2020 ».
Les documents consultés par Daraj révèlent également qu’en avril 2019, Sélim Sfeir aurait vendu « pour le compte de Bank of Beirut 500 000 actions » pour une valeur totale de 8 millions de dollars à… Sélim Sfeir, « en sa qualité de directeur de Sfeir Bancorp Limited », dont il serait également l’unique actionnaire. À la fin de l'année 2020, la société chypriote était endettée auprès de ce dernier pour plus de 55 millions de dollars (contre environ 37 millions en 2016) , selon les documents consultés par le consortium. « Les documents ne précisent pas si cet argent a été transféré en espèces à Chypre ou s'il s'agit d'un jeu d'écriture », note Daraj. Dans le premier cas, cela « constituerait une violation des contrôles illégaux des capitaux imposés par les banques », poursuit l'article ; tandis que dans la deuxième hypothèse, il pourrait s'agir d'une tentative de s'assurer une créance de ce montant vis-à-vis de la Bank of Beirut, qu'il pourrait réclamer en cas de « faillite de cette dernière par exemple », poursuit le consortium qui n'a pas été été en mesure d'obtenir des réponses de Sélim Sfeir sur tous ces points.
En parallèle, l'enquête révèle par ailleurs que Bank of Beirut a bénéficié d'un prêt de la BDL à hauteur de « 428 millions de dollars le 25 janvier 2020 » et que Bank of Beirut a transféré « 466 millions de dollars » en dehors du Liban (sans spécifier la destination ni le destinataire) après le déclenchement de la crise et l'imposition des restrictions informelles sur les transferts en devises.
« De nombreuses questions subsistent sur les manœuvres financières », concède Daraj, qui n'a pas pu déterminer si ces dernières pouvaient constituer des infractions légales, et indique avoir remis « ces documents et conclusions entre les mains de la justice libanaise car il est nécessaire de demander des comptes à ceux qui ont pu préserver leur patrimoine au détriment de l'épargne des petits et moyens déposants ».
Droit de réponse (le 7 mars 2024)
Suite à la publication de cet article dans lequel nous faisions état des informations contenues dans une enquête de nos confrères du site libanais et du Consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ), nous avons reçu cette demande de droit de réponse de son conseil, Me Akram Azoury :
« Je vous prie de publier le droit de réponse du Dr Salim Sfeir en ses qualités personnelles de PDG de Bank of Beirut et président de l’association des banques libanaises que je vous adresse en ma qualité de son avocat conseil.
L’article susmentionné a initialement été publié par Daraj, comme vous le citez dans votre publication, sous les titres suivants : « Cyprus confidential : a safe haven for Salim Sfeir, the Head of the Association of Lebanese Banks and the Obstructionist of Lebanon’s Recovery Plan ». Les articles de Daraj et les parties que vous reprenez de ces articles contiennent principalement des informations publiques sur les structures légales et transparentes et qui se limitent à Sfeir Bancorp Limited, entité constituée en 2011 et soumise au droit chypriote et qui a pour unique investissement des actions dans la banque libanaise Bank of Beirut.
En 2019, Sfeir Bancorp a acquis des actions supplémentaires de la Bank of Beirut. En 2020, Bank of Beirut a augmenté son capital en application de la circulaire 1542020 de la banque centrale et Sfeir Bancorp en tant qu’actionnaire à la Bank of Beirut a payé sa part. C’est ce qui explique l’augmentation de l’actif uniquement libanais de cette entité intitulée pompeusement et dans un but malicieux « patrimoine chypriote du président de l’ABL », tandis que l’article indique : « les actifs de Salim Sfeir seraient passés de 37,2 millions à 45,5 millions de dollars durant la seule année 2019, et jusqu’à 55 millions de dollars à fin 2020. »
Cette explication est publiée à la page 22 du rapport des commissaires aux comptes 2020. C’est la source de l’information publique que l’article a occultée pour la présenter sous la forme d’une interrogation dans le but de créer un doute artificiel dans l’esprit du lecteur.
De plus, et contrairement à ce qui est insinué, les augmentations des actifs de Sfeir Bancorp de 2019 et de 2020 ont été entièrement investies au Liban et le demeurent et ne constituent aucune prétendue fuite du capital.
De même, tous les transferts effectués par Bank of Beirut ont été en exécution d’engagements échus aux institutions financières non libanaises.
Les informations exactes contenues dans cet article, quoique parfaitement légales et publiques, sont présentées selon un narratif suspicieux comme étant découvertes par des enquêteurs spécialisés pour soulever la suspicion sur leur régularité afin de semer le doute dans l’esprit du lecteur sur la conformité de cette structure juridique et des transactions avec la loi sans toutefois prendre une position claire ni dans un sens ni dans un autre. »
commentaires (15)
il serait temp que l'europe sevisse et ferme toutes ces boutiques eparpilee en europe. Si c'etait les USA, les combines auraient cesse depuis tres longtemps
Elementaire
08 h 37, le 26 février 2024