C’est à l’heure où tout semble indiquer que le dossier de la présidentielle libanaise pourrait être réactivé dans un proche avenir que le chef du Courant patriotique libre, Gebran Bassil, a soigneusement choisi le quotidien pro-Hezbollah, al-Akhbar, pour adresser des messages présidentiels à son (ancien) allié, le Hezbollah. Dans ses grandes lignes, la position du leader aouniste n'a pas changé : non au candidat du Hezbollah, Sleiman Frangié, et non au commandant en chef de l’armée, Joseph Aoun, bête noire du CPL, perçu comme une sérieuse figure de troisième voie.
Sauf que M. Bassil s’est montré disposé à mettre un peu d’eau dans son vin et avaliser les deux options s’il parvient à arracher le fonds fiduciaire et la décentralisation administrative élargie. « Je voterai pour les deux (MM. Aoun ou Frangié) s’ils (le Hezbollah) me donnent la décentralisation administrative et financière élargie, ainsi que le fonds fiduciaire et le programme du prochain mandat », a tonné Gebran Bassil, avant d’expliquer : « Le premier point m'est encore plus important que Sleiman Frangié et Joseph Aoun. Parce que dans le cas d’une adoption de cette loi, peu importe qui d’entre eux sera élu. » « Quand j’ai demandé la décentralisation administrative et financière élargie et le fonds fiduciaire, on m’a dit qu’il (le Hezbollah) ne s’y oppose pas. Mais leur mise en application fait face à des entraves », a toutefois reconnu le député de Batroun.
Pour que ses conditions soient acceptées, le chef du CPL aura besoin de l'accord d'un autre acteur pour parvenir à son objectif : son plus grand adversaire, le président du Parlement Nabih Berry. Autant dire que la tâche s'annonce difficile. Et pour cause : si le Hezbollah semble peu enclin à céder à ses demandes, le chef d'Amal a pour sa part toutes les raisons de s'y opposer. Le cœur de l'enjeu ? L'aspect financier. Dans l'esprit du CPL, la décentralisation financière doit permettre à chaque région de récolter directement une partie des taxes. Le fonds fiduciaire doit permettre pour sa part de gérer les actifs de l'État dans le cadre d'un conseil indépendant des pouvoirs politiques qui travaille en partenariat avec le secteur privé. Dans les deux cas, le clientélisme de Nabih Berry est directement visé.
Entre-temps, Gebran Bassil ne compte pas changer de position : « Je ne voterai ni Sleiman Frangié ni Joseph Aoun pour des raisons de principe qui me permettent de prédire comment sera le mandat de chacun d’eux », a-t-il lancé, avant d’adresser un message clair au Hezbollah : « Il ne faut pas miser sur la possibilité de me voir changer d’avis. »
Évoquant les rapports du CPL avec le Hezbollah, M. Bassil a affirmé qu’ils ne se sont pas détériorés après la prorogation du mandat de Joseph Aoun, une décision prise à la Chambre en dépit du veto catégorique des aounistes. Si la décision a été rendue possible grâce au feu quasi vert du parti chiite, les députés de cette formation s’étaient retirés de l’hémicycle au moment du vote. « Le Hezbollah ne m’avait pas promis ce qu’il n’a pas fait (s’opposer à la prorogation). Et les contacts ne sont pas rompus, sans pour autant être intenses », a précisé M. Bassil. « Pas de crispation au sujet de Joseph Aoun. Mais on ne peut pas dire la même chose pour ce qui est (du soutien du parti de Dieu à) Sleiman Frangié, a-t-il encore dit. « Le Hezb est très conscient que je ne voterai pas pour lui. »
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Il sait au moins faire une chose, surnager dans les eaux saumâtres, qui sentent l'égout à plein nez.
Zeidan
17 h 59, le 22 janvier 2024