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Nos Lecteurs ont la Parole

La Belgique : un exemple à suivre et un avenir incertain

Lors de l’indépendance de la Belgique en 1830, Talleyrand et la plupart des observateurs européens ne croyaient pas à la survie de cette nation. Force est de constater que la Belgique existe toujours et est même la capitale de l’Europe.

Beaucoup d’observateurs critiquent le fédéralisme belge avec ses crises politiques à répétition et ses réformes incessantes. En réalité, passer d’un État unitaire au fédéralisme n’est pas une chose aisée, cette évolution entraînant des revendications de chaque groupe social et par conséquent des conflits. Cette évolution est différente de celle de la Suisse qui a choisi dès le début le fédéralisme marqué par l’absence de conflits. Cependant, la Belgique reste un exemple pour l’humanité entière d’une société plurielle qui parvient à résoudre ses contradictions sans conflits armés et en respectant l’État de droit. Il y a eu des situations conflictuelles très tendues (la question royale, les marches flamandes à Bruxelles, l’affaire de Louvain, l’affaire des Fourons) mais les Belges ont toujours su trouver une solution pour éviter le pire. À titre de comparaison, le passage de l’Argentine et du Brésil d’un État unitaire au fédéralisme a été marqué par des guerres civiles.

Jean-Luc Dehaene, ancien Premier ministre belge, résume bien cette situation en disant : « Beaucoup d’observateurs étrangers citent régulièrement en exemple l’approche belge quand il s’agit de maîtriser une situation conflictuelle, même si chez nous des esprits railleurs se gaussent de ce « bricolage de plombier » ».

Bien évidemment, tout le monde se pose la question de savoir où va la Belgique, chaque réforme ayant grignoté sur les compétences de l’État fédéral et augmenté substantiellement les compétences des Régions. Le constitutionnaliste belge Francis Delpérée refuse de prévoir l’avenir en écrivant : « Qui serait assez fou, ou assez fort, pour garantir la pérennité à la Belgique, sous une forme ou sous une autre ? » La septième réforme prévue en 2024 pourrait être l’occasion de clarifier définitivement les positions des uns et des autres : les Belges souhaitent-ils une autonomie élargie ou une partition de la Belgique ? Les Flamands souhaitent-ils, à terme, l’indépendance ? Si oui, il serait nécessaire de mettre cartes sur table et que chacun prenne ses responsabilités devant l’histoire.

Par ailleurs, l’indépendance d’une région est non favorisée par l’Europe. En effet, personne ne veut ouvrir la boîte de Pandore : la Catalogne et le Pays basque en Espagne, la Corse en France, la Lombardie en Italie, l’Écosse en Grande-Bretagne…

De plus, pour obtenir l’indépendance de la Flandre, un référendum sera exigé par l’Europe qui doit montrer une majorité nette pour l’indépendance. Ceci n’est pas garanti aujourd’hui en Flandre : les sondages effectués depuis environ 15 ans montrent un pourcentage des indépendantistes entre 10 et 20 %. Très faible pour passer au niveau européen. Cependant, ceci peut évoluer en fonction de l’économie et de l’état de l’Europe. De même, le Rassemblement Wallonie-France (RW-F), un parti séparatiste et rattachiste, reste très minoritaire. Là aussi, un référendum pour l’indépendance en Wallonie ne passera pas.

La solution la plus réaliste à court et moyen terme, c’est une évolution du fédéralisme qui va plutôt vers plus de renforcement des compétences des Régions aux dépens de celles de l’État fédéral. Certaines voix s’élèvent pour réclamer une « refédéralisation » de certaines compétences des Régions, une revendication qui ne fait pas le consensus entre Flamands et Wallons, de même la demande d’une circonscription électorale fédérale.

En plus de l’avenir institutionnel de la Belgique, se pose le problème de l’immigration de populations de cultures différentes et de leur intégration. Un problème que partage tous les pays européens. Cette immigration poussera-t-elle la Flandre à prendre son indépendance dans un but de protection, à l’instar de la Grande-Bretagne avec le Brexit ? Dans un fédéralisme centrifuge et de confrontation, quel est l’impact de l’immigration sur l’avenir institutionnel de la Belgique ?

Dr Issam FRANGI

Chirurgien et diplômé en histoire, Belgo-Libanais

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Lors de l’indépendance de la Belgique en 1830, Talleyrand et la plupart des observateurs européens ne croyaient pas à la survie de cette nation. Force est de constater que la Belgique existe toujours et est même la capitale de l’Europe.Beaucoup d’observateurs critiquent le fédéralisme belge avec ses crises politiques à répétition et ses réformes incessantes. En réalité, passer...

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