
Le chef du législatif, Nabih Berry, prononçant un discours à Aïn el-Tiné en juillet. Photo tirée du compte Flickr du Parlement
Le président du Parlement, Nabih Berry, a affirmé lors d’un entretien accordé vendredi au quotidien Nidaa el-Watan que son initiative présidentielle, à savoir un dialogue de sept jours suivi d’une séance électorale ouverte à tours successifs, était suspendue du fait du niet des deux grands partis chrétiens. « Ceux dont je voulais l’approbation, à savoir les Forces libanaises et le Courant patriotique libre, ont rejeté mon initiative », s’est-il plaint, regrettant le « discours à charge » prononcé la semaine dernière par le chef du CPL, Gebran Bassil, et l’accusant de faire de la surenchère.
« Mettre Le Drian de côté »
« Samir Geagea (le leader des FL, NDLR) a le mérite d’être clair dans son refus », reconnaît auprès de L’Orient-Le Jour un proche du président de la Chambre. Et d’accuser : « Quant à Gebran Bassil, il se dit parfois ouvert au dialogue, puis contre. Ensuite, il conditionne sa participation… bref, même ses partisans n’y comprennent plus rien. » Le chef du CPL maintient le flou sur sa position concernant cette proposition afin de ne pas être accusé de bloquer la présidentielle ni de devoir faire de concessions à son ennemi juré Nabih Berry. Il n’a d’ailleurs pas tardé à réagir aux propos du chef du législatif. « Comment le fait de veiller à ce que le dialogue puisse aboutir à une élection devient une opposition au dialogue ? Toute démarche doit remplir certaines conditions pour aboutir, a-t-il écrit sur son compte X. Quand nous exigeons un dialogue sur les grandes lignes du programme du prochain président, cela veut-il dire que nous nous opposons à cette démarche ou que nous veillons plutôt à ce que le nouveau mandat réussisse ? »
Mais si M. Bassil finit par céder, ce dernier convoquera-t-il au dialogue sans la frange la plus intransigeante de l’opposition, composée des FL et leurs alliés ? « Dès qu’une majorité très large des députés se montre prête à dialoguer, on pourra aller de l’avant, même si un bloc boycotte. Mais on n’en est pas encore là », dit-on à Aïn el-Tiné.
Face à l’impasse locale, les Libanais espèrent qu’une initiative venant de l’étranger pourra débloquer la crise. « Nous attendions un communiqué de la réunion du quintette à New York, mais elle s’est finalement terminée sur des désaccords », remarque Nabih Berry dans son interview, en référence à la réunion du groupe des Cinq (France, États-Unis, Arabie saoudite, Qatar et Égypte), mardi en marge de l’Assemblée générale des Nations unies, pour évoquer le dossier libanais. Aucun communiqué n’a été publié et cette table ronde aurait été le théâtre d’un désaccord entre les puissances participantes. Riyad et Washington auraient notamment réclamé que Paris fixe un calendrier pour son initiative au Liban, remettant sur la table la menace de sanctions contre les acteurs responsables du blocage. Si des sources diplomatiques françaises démentent toute divergence au sein du quintette, Nabih Berry ne semble pas très convaincu. « Nous allons finir pas devoir nous-mêmes les réconcilier ! » a-t-il ironisé. « Il semble clair désormais qu’il y a une volonté de mettre la France et son émissaire au Liban, Jean-Yves Le Drian, de côté », abonde le proche de M. Berry. Lors des trois visites du diplomate occidental, le président du Parlement veillait pourtant à parler d’une harmonie entre Paris et Aïn el-Tiné. Il ne s’attardait même pas sur les nuances linguistiques, alors que lui prône un « dialogue » et M. Le Drian parle désormais de « concertations bilatérales » ou de « débats » pour ne pas froisser l’opposition… et surtout les Arabes.
Cinq noms sur la liste qatarie
Pour les milieux de Aïn el-Tiné, l’heure est-elle donc venue de laisser la place à Doha ? « Il y a une initiative qatarie, confirme le président du Parlement. Un envoyé du Qatar est arrivé au Liban, mais nous n’avons pas eu de contact jusqu’à présent. » L’OLJ a appris dans ce contexte qu’une figure sécuritaire qatarie a fait le déplacement à Beyrouth à deux reprises cette semaine pour mener des contacts préliminaires avec les acteurs libanais. Cet émissaire porte une liste de cinq figures pouvant faire l’objet d’un consensus : le commandant de l’armée Joseph Aoun, le député Neemat Frem, le directeur par intérim de la Sûreté générale Élias Baïssari, l’ancien ministre Ziyad Baroud et le général Georges Khoury, qui a dirigé le service de renseignements de l’armée entre 2005 et 2008. Les contacts qu’il mène sont censés préparer le terrain à une visite, début octobre, du ministre d’État qatari pour les Affaires étrangères, Mohammad ben Abdel Aziz al-Khulaïfi.
commentaires (14)
"… Berry : Nous allons finir par devoir nous-mêmes réconcilier le quintette …" - Et pourquoi pas plus simplement finir par élire notre président nous-mêmes? Seuls, comme des grands? Franchement, qu’est-ce l’avis du "quintette" devrait changer pour nous? Est-ce que le "quintette" nous demande notre avis? On a atteint le summum du ridicule. A mon avis si le "quintette" s’intéresse encore à nous c’est parce que quelque part on doit les faire rire…
Gros Gnon
07 h 23, le 26 septembre 2023