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Bucolique Aïn el-Héloué


Indiscutablement, le camp palestinien de Aïn el-Héloué est à classer dans le patrimoine mondial de l’art de vivre. Plus de trois quarts de siècle que des dizaines de milliers de pauvres hères, estampillés « réfugiés », croupissent dans ce bidonville de non-droit où grenouillent à intervalles réguliers des patibulaires armés, qui s’allument les uns les autres entre les torchis. Un paysage bucolique façon Maison et Jardins, sauf qu’au lieu de l’arroser d’eau, les Palestiniens l’arrosent de roquettes et qu’à la place du gazon, il y pousse des barbes.


Sur les planches de ce théâtre tragique, on trouve deux spécimens d’individus à la plastique peu comestible : les spadassins du Fateh qui nous ramènent le bon vieux souvenir de ce roublard de Yasser Arafat et de ses agités du keffieh, et les illuminés du burnous ornés du logiciel islamiste dernier cri et de tous ses périphériques.


Les premiers – on ne se refait pas – sont revenus à leur vieux dada : titiller des électrons libres du camp qu’ils ont contribué peu ou prou à enfanter et qui ont fini par pourrir la cause palestinienne. En somme, une vraie machine à remonter le temps ! Un galonné du Fateh assassiné, et l’on replonge fissa dans la chienlit des années 70-80 : l’attardé mental qui tire, l’enturbanné qui le cache dans sa chemise de nuit, la noria des hirsutes en armes qui champignonnent… et les myriades de groupuscules, de dissidents de groupuscules, de mutins de dissidents, de réfractaires aux mutins et autres excités de la gâchette. Bref, un microcosme du futur État palestinien que les pays arabes tentent de fourguer depuis des décennies à la communauté internationale.


Flottant par-dessus cette bouillabaisse, un komintern d’islamistes on ne peut plus gore : des timbrés du bulbe en quête de paradis, qui sèment l’enfer parmi la population. Mais attention ! Les tamponnés en question sont profondément religieux. S’il leur arrive de torturer ou d’égorger, c’est uniquement en dehors des heures de prière. Ça ne boit jamais d’alcool, mais ça vous crève l’œil d’un mécréant en moins de temps qu’il n’en faut pour changer ses babouches. Ça lapide sa femme avec des blocs de parpaing, mais ne la cogne pas plus que les trois autres qu’il a claquemurées ailleurs.


Le tout sous le regard bovin de l’État libanais qui regarde passer les cessez-le-feu sans même avoir le temps de les savourer. Au rythme où ils sont signés, ces documents devraient être édités et reliés plein cuir. Pour sûr qu’ils feraient s’écrouler les étagères de la Bibliothèque nationale. Aux dernières nouvelles, une énième trêve a été conclue, jetant un calme précaire sur ces lieux folâtres.

Finalement, les véritables cocus de toute cette histoire restent ces femmes, ces enfants, ces vieillards… Chairs à canon hachées menu par les roquettes et les balles, et à qui l’on débite des âneries en tranches sur une cause juste, mais dévoyée depuis lurette dans les querelles de caniveau.


C’est ce qui s’appelle vendre du rêve au paradis du cauchemar.


gabynasr@lorientlejour.com

Indiscutablement, le camp palestinien de Aïn el-Héloué est à classer dans le patrimoine mondial de l’art de vivre. Plus de trois quarts de siècle que des dizaines de milliers de pauvres hères, estampillés « réfugiés », croupissent dans ce bidonville de non-droit où grenouillent à intervalles réguliers des patibulaires armés, qui s’allument les uns les autres entre les...
commentaires (13)

Situation tragique. Texte savoureux.

MALLAT Sabah

10 h 42, le 17 septembre 2023

Tous les commentaires

Commentaires (13)

  • Situation tragique. Texte savoureux.

    MALLAT Sabah

    10 h 42, le 17 septembre 2023

  • Quelle pédanterie!

    Sami NAJJAR

    07 h 02, le 16 septembre 2023

  • Inouïe de vérité...

    Wlek Sanferlou

    01 h 58, le 16 septembre 2023

  • Y a-t-il de nouveau dans tout ce bavardage? Toujours les mêmes rengaines et fanfaronnades levantines de crâneur, alors que rien ne bouge pour une solution ou une autre à ces fléaux démographiques et ces flots de réfugiés qui inondent le pays et finiront par l'asphyxier. On se gargarise de mots, de grands vocables pédantesques, pour impressionner la galerie, et on se retrouve toujours avec les mêmes problèmes, n'en deplaise aux écrivaillions qui sévissent dans ces parages.

    Jacques Saleh, PhD

    21 h 44, le 15 septembre 2023

  • Bon retour Mr. Nasr , Oui c est bon de vous lire. Et oui votre ´billet’ est bien plus explicite que certains articles .

    Kelotamam

    20 h 27, le 15 septembre 2023

  • Qu'ils nous foutent le "camp"... m'enfin...

    Jacques Saleh, PhD

    20 h 19, le 15 septembre 2023

  • Ce n'est pas l'Armée Libanaise , hélas , qui fera le ménage .En France nous avons aussi nos quartiers où les armes circulent , la drogue aussi et l'Etat Français ne donne pas l'ordre de nettoyer . C'est l'ONU qui vous a imposé cette situation , c'est l'ONU qui pourra vous en débarrasser !

    Yves Gautron

    18 h 10, le 15 septembre 2023

  • Superbement bien caricaturé mais réel. Bravo et merci pour votre présence M Gaby Nasr. Vous ( et certains autres de vos collègues journalistes ) , vous relevez le niveau de l'OLJ par votre plume.

    LE FRANCOPHONE

    11 h 19, le 15 septembre 2023

  • Une peinture au vitriol croquée par notre artiste unique dans son genre. Nous nous réjouissons de son retour apparemment très inspiré par les absurdités qui empoisonnent notre pays. Merci Gaby, vous nous avez beaucoup manqué. Vivement vendredi prochain.

    Sissi zayyat

    10 h 01, le 15 septembre 2023

  • Bon retour, cher Gaby Nasr !!! Vous nous avez manqué... et votre billet de ce matin est une petite merveille Irène Saïd

    Irene Said

    09 h 02, le 15 septembre 2023

  • Tragique peinture malheureusement exacte. Mais ou est l'armée Libanaise vis à vis c'est quantités d'armes? Ou est l'état ? D'où proviennent elles ? Qui finances ? Pourquoi ce passage libre ? Il Faut au moin confisqué toutes armes en passages, tout cet arsenal doit appartenir à l'armée Libanaise. Peut être les familles dans ces bidonvilles serrai moin malheureux.

    Sarkis Dina

    07 h 59, le 15 septembre 2023

  • magnifique comme d'habitude

    Naccache Georges

    07 h 58, le 15 septembre 2023

  • Magnifique. C'est du grand Gaby Nasr. Qu'on ne vous enlève jamais votre plume.

    Ca va mieux en le disant

    00 h 39, le 15 septembre 2023

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