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Politique - Décryptage

Dans un monde « entre deux ères », le Liban vit « entre deux crises »

Alors que le calme, certes précaire, semblait régner ces derniers jours dans le camp de Aïn el-Héloué, les États du Golfe, Arabie saoudite en tête, ont choisi de publier des communiqués pour demander à leurs ressortissants de quitter le Liban et pour rappeler l’interdiction de voyager à destination de ce pays. La nouvelle a eu l’effet d’un séisme pour les Libanais en pleine saison touristique qualifiée par toutes les parties concernées d’exceptionnelle.

Que s’est-il donc passé, ou bien que va-t-il se passer pour justifier un tel avertissement venu de tous les États du Golfe, sachant que l’interdiction qui avait été lancée il y a quelques années n’a pas encore été officiellement et totalement levée et que les ressortissants de ces pays actuellement au Liban se comptent par centaines ? La première réaction après la publication des communiqués des monarchies du Golfe a été de considérer qu’ils sont liés à la situation explosive dans le camp de Aïn el-Héloué, comme si ces États détenaient des informations sur une possibilité d’extension des combats à l’extérieur de ce camp ou comme si ces affrontements constituaient en quelque sorte le déclic pour une période de troubles sécuritaires. Mais les différents services de sécurité libanais ont rapidement démenti l’existence d’informations de ce genre, assurant que la situation globale du pays est sous contrôle et que les forces militaires et sécuritaires comptent empêcher toute extension des combats hors du camp de Aïn el-Héloué, ainsi que toute tentative de fermer la route côtière reliant la capitale au sud du pays.

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Ces précisions faites, les communiqués des États du Golfe paraissent donc démesurés par rapport aux risques sécuritaires que représente le Liban pour leurs ressortissants. Selon une source diplomatique arabe au Liban, ces communiqués sont liés à la situation politique régionale et internationale. Selon cette source, pour comprendre le Liban complexe, il est toujours préférable de regarder le grand tableau régional et international. Le monde est actuellement « entre deux ères » et cela rejaillit sur le Liban qui évolue « entre deux crises », dit-elle. Soit les États-Unis parviennent à maintenir leur suprématie sur le monde, soit ils seront contraints d’accepter l’émergence d’un monde multipolaire, estime la même source. Ainsi, après l’annonce de l’entente irano-saoudienne sous le parrainage de la Chine, les Américains ont voulu montrer qu’aucun conflit ne peut être réglé sans eux. C’est pourquoi, tous les dossiers conflictuels entre Téhéran et Riyad ont soudain connu un retour aux tensions, après une courte période de détente et de tentative de règlements. En même temps, la Russie qui est coincée par la guerre en Ukraine (qui semble appelée à se prolonger) souhaiterait provoquer de nouveaux problèmes aux États-Unis dans la région du Moyen-Orient, où elle a des alliés et même en Afrique, de concert avec la Chine laquelle tente de s’y implanter économiquement.

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Dans ce contexte, tous les dossiers de la région se sont ainsi brusquement compliqués, la guerre au Yémen que l’on croyait proche de la fin est prête à s’embraser de nouveau et aucun progrès politique n’a été accompli. En Irak, juste après la tournée arabe du Premier ministre, une grave crise économique avec une chute spectaculaire de la monnaie irakienne face au dollar a éclaté. En Égypte, une crise économique sans précédent secoue le pays. Même en Israël, la situation est floue alors qu’en Syrie, une nouvelle guerre au nord et à l’est du pays pointe à l’horizon. La reprise des relations entre Riyad et Damas annoncée en grande pompe dans le cadre du sommet arabe de Djeddah en mai dernier, a ainsi connu un coup de frein, alors que le régime syrien, qui avait promis de lutter contre le trafic de drogue à partir de son pays vers les États du Golfe, n’a rien fait de consistant en ce sens.

Selon la source diplomatique arabe à Beyrouth, toutes ces tensions doivent forcément se traduire par un conflit quelque part, lequel soit permettra l’ouverture d’un dialogue en profondeur soit aboutira à déterminer un vainqueur et des vaincus. C’est dans ce contexte, explique la source précitée, qu’il faut lire les derniers développements au Liban qui ne sont que le reflet ou la concrétisation des tensions régionales et internationales. Le recul de l’initiative française, qui préconisait au départ le choix d’un président et d’un Premier ministre qui puissent travailler de concert, et qui a ensuite évolué dans le sens de l’organisation d’une conférence générale de dialogue, avant de se réduire à des concertations dans le cadre d’une réunion de travail prévue en septembre, en est ainsi un indice. La vacance présidentielle et la crise économique sans précédent en sont d’autres. De même, les affrontements de Aïn el-Héloué ont constitué un facteur de déstabilisation. Ils auraient pu dégénérer et provoquer un embrasement plus général, ou en tout cas frapper la saison touristique. Certes, jusqu’à présent, on ne sait pas encore vraiment si la trêve conclue est appelée à durer, mais jusqu’à présent, la bombe de Aïn el-Héloué a été neutralisée.

Toujours selon la source précitée, chacun de ces dossiers aurait pu provoquer un embrasement, mais le fait que la situation sécuritaire reste acceptable montre que le Liban n’est pas destiné à être le nouveau champ de bataille régional. Cela est sans doute lié au fait que cela pourrait pousser le Hezbollah par exemple, ou certaines organisations palestiniennes, à chercher à embraser la frontière avec Israël. Toutefois, dans un contexte régional aussi confus, et avec les multiples influences que subit le Liban, ce pays peut difficilement espérer connaître des solutions. Au contraire, les institutions s’effondrent l’une après l’autre, la plupart des parties internes campent sur leurs positions et aucun déblocage, sur aucun dossier, n’est en vue.

Dans ce cas, si ce n’est pas au Liban, où va se situer le nouveau champ de bataille ? La source diplomatique arabe estime qu’il faut garder un œil sur la Syrie...

Alors que le calme, certes précaire, semblait régner ces derniers jours dans le camp de Aïn el-Héloué, les États du Golfe, Arabie saoudite en tête, ont choisi de publier des communiqués pour demander à leurs ressortissants de quitter le Liban et pour rappeler l’interdiction de voyager à destination de ce pays. La nouvelle a eu l’effet d’un séisme pour les Libanais en pleine...

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Quelle magouille…

Eleni Caridopoulou

00 h 33, le 08 août 2023

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Commentaires (1)

  • Quelle magouille…

    Eleni Caridopoulou

    00 h 33, le 08 août 2023

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