Le gouverneur de la Banque du Liban (BDL) Riad Salamé a annoncé dimanche que la plateforme Sayrafa, conçue par la banque centrale pour contrôler les opérations de change et stabiliser les fluctuations sur le marché parallèle, continue de fonctionner suivant les mêmes règles en vigueur depuis mars 2023.
Le taux de change dollar/livre de cette plateforme évolue généralement en-dessous de celui du marché. Le mécanisme de fixation du taux n’a jamais été clairement défini par la BDL. Il est employé pour certaines opération explicitement prévues par la Banque du Liban et ouverts pendant ces 4 dernières années marquées par la crise que traverse le pays. Une crise dont l’effondrement de la monnaie et l’imposition de restrictions illégales limitant l’accès des déposants à leurs fonds en dollars, sont deux des principales caractéristiques.
Dans un communiqué, M. Salamé a démenti les informations indiquant que certaines banques vont suspendre les opérations monétaires via la plateforme. "La BDL continue à suivre la même politique et à répondre aux demandes avancées par les banques tant qu'elles se conforment aux normes", a-t-il assuré.
Ce communiqué a été publié après que la chaîne locale MTV, citant des sources vendredi soir, affirmait que Salim Chahine, l’un des quatre vice-gouverneurs aurait lancé des négociations avec l’agence Bloomberg pour lancer une plateforme de change visant à remplacer celle de Sayrafa, et sur laquelle la Banque du Liban n’aurait aucune influence. Contacté par notre publication, M. Chahine n'était pas joignable dans l'immédiat.
Un cadre de banque souhaitant rester anonyme, avait indiqué à L'Orient-Le Jour que les fluctuations du taux de change livre/dollar survenues samedi pouvaient être expliquées par les rumeurs autour du sort de Sayrafa.
Samedi, la livre avait en effet brièvement dépassé les 98.000LL pour un dollar avant de se redresser en soirée. Dimanche après-midi, la monnaie nationale s'échangeait autour de 92.000 LL pour un dollar. Cette nouvelle dépréciation intervient alors que le mandat du gouverneur Salamé, visé par des mandats d'arrêt internationaux pour soupçons de corruption, s'achève à la fin du mois, sans que la question de sa succession ne soit tranchée, notamment en raison de la crise politique en cours et de l'absence d'un président de la République. Quant au gouvernement actuel, il est chargé d'expédier les affaires courantes.
Selon certains observateurs, le vice-gouverneur de la BDL Wassim Mansouri (chiite, proche du président du Parlement Nabih Berry), devrait succéder à Riad Salamé. Mais début juillet, les quatre vice-gouverneurs de l’institution en poste depuis 2020, Wassim Mansouri, Bachir Yakzan (druze gravitant entre le Parti socialiste progressiste et le Parti démocratique libanais), Salim Chahine (sunnite, appuyé par l’ancien Premier ministre Hassane Diab) et Alexandre Moradian (arménien-orthodoxe appuyé par le Tachnag), ont solennellement appelé la classe dirigeante à trouver un successeur à M. Salamé, et menacé de démissionner.
Une réunion du Conseil central de la BDL doit se tenir lundi selon la presse libanaise.
Le marché des changes s'est calmé juste après la déclaration de Salamé. Il semble que son ombre resterait bien après son départ.
21 h 35, le 16 juillet 2023