Le cabinet de conseil Alvarez & Marsal (A&M), chargé de l’audit juricomptable de la Banque du Liban, a transmis il y a quinze jours au ministre des Finances, Youssef Khalil, un rapport sur l’audit juricomptable des comptes de la BDL, mais le document, dont la teneur est inconnue, reste retenu auprès du ministre, a affirmé hier à L’Orient-Le Jour l’ancien ministre de la Justice Salim Jreissati. Une information confirmée officieusement à L’OLJ par une source gouvernementale.
L’enjeu de l’audit de la banque centrale est d’autant plus important qu’il constitue une des conditions demandées par la communauté internationale pour qu’elle accepte de fournir au Liban son aide financière dans le contexte inédit de crise économique que traverse le pays. Alvarez & Marsal avait signé une première fois, en septembre 2020, un contrat avec l’État libanais pour retracer le fil des transactions enregistrées dans les comptes de la BDL, mais l’entreprise avait jeté l’éponge en novembre de la même année en raison du refus de l’institution de lui fournir les informations demandées, sous couvert de secret bancaire. Après que le Parlement a adopté en décembre 2020 une loi levant, pour une période d’un an, le secret bancaire sur les comptes de la BDL et ceux des institutions publiques, la firme a conclu avec l’État un nouveau contrat en septembre 2021. Supposés paraître une année plus tard, les résultats de l’opération de contrôle l’ont donc été il y a seulement quinze jours, soit avec neuf mois de décalage. Contacté par L’Orient-Le Jour, Salim Jreissati, proche de l’ancien président Michel Aoun, estime que le retard est dû à « des entraves et obstacles similaires à ceux qui étaient dressés face à Michel Aoun, lorsqu’il occupait la fonction de président ».
L’OLJ a tenté sans succès d’entrer en contact avec Alvarez & Marsal. Un conseiller du chef du Parlement Nabih Berry, dont Youssef Khalil est un proche, a affirmé, quant à lui, ignorer si M. Berry a pris connaissance du document.
De son côté, Youssef Khalil, qui est un ancien cadre de la banque centrale, n’a pas répondu aux questions que L’OLJ lui a posées sur la parution des résultats d’Alvarez & Marsal, et sur les motifs qui l’auraient poussé à ne pas encore les dévoiler. Face à ce mutisme, notre journal a interrogé un responsable, qui suppute, sous le couvert de l’anonymat, que le ministre des Finances attend les remarques de la BDL, et plus particulièrement celles de son gouverneur Riad Salamé.
Un observateur politique se demande si, préalablement à la divulgation de la teneur de l’audit, il ne faudrait pas également confier les résultats de l’étude à la Cour des comptes ou à une autre autorité, judiciaire ou administrative, ou encore à une commission qui serait désignée par le gouvernement.
« Recel »
Salim Jreissati accuse d’ores et déjà le ministre des Finances de dissimuler le rapport d’A&M. Il évoque à cet égard « un recel qui viole la loi sur l’accès à l’information », en vertu de laquelle les citoyens ont un droit de regard sur les informations et documents relatifs aux dépenses publiques.
« J’ai constamment sollicité le ministre Khalil, en lui demandant à quel moment il pourrait révéler la teneur du rapport. Il m’a affirmé à chaque fois que celui-ci comporte plus de 300 pages, et qu’il était en train de l’étudier. Or la longueur du document n’explique pas que l’examen puisse autant perdurer », juge M. Jreissati. Selon lui, le document « devrait comporter des présomptions et preuves pavant la voie à des poursuites devant la justice compétente, et suggérer des mesures propres à empêcher de tels crimes à l’avenir ».
Moi j’attends les commentaires de Jreissati le jour où EDL sera audité… :-D
08 h 45, le 28 juin 2023