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Moyen-Orient - Focus

Quand l’Iran s’infiltre dans les fractures politiques israéliennes

Des Iraniens s’immisceraient dans des groupes sur les réseaux sociaux pour tenter d’influencer et de manipuler des manifestants israéliens. 

Quand l’Iran s’infiltre dans les fractures politiques israéliennes

Des manifestants se rassemblent pour protester contre le projet de loi de réforme judiciaire du gouvernement israélien, à Tel-Aviv, le 6 mai 2023. Photo AFP

Des affiches « No Democracy, No Voice » flottant des balcons d’appartements israéliens, des banderoles « On a eu assez du roi Bibi (Benjamin Netanyahu, NDLR) » ou leur pendant, « Bibi est mon roi », prêtes à être brandies dans les rues israéliennes les jours de manifestation. Jusque-là, rien d’étonnant dans un pays polarisé autour de la réforme contestée de la justice souhaitée par le gouvernement le plus à droite de l’histoire d’Israël, où les rassemblements massifs contre ce projet ont ponctué l’année 2023. Mais plusieurs Israéliens auraient en fait installé et préparé ces banderoles après en avoir reçu la demande expresse sur les réseaux sociaux, rapporte le quotidien israélien Haaretz. Des requêtes qui auraient été émises à travers des groupes suspectés aujourd’hui d’être infiltrés par des éléments étrangers, voire d’être des créations alimentées depuis l’étranger, notamment depuis l’Iran.

La technique consisterait à s’immiscer dans des groupes Facebook, Telegram ou encore WhatsApp composés de manifestants israéliens, à y collecter des informations sur les protestataires pour tenter ensuite de manipuler les membres du groupe en leur indiquant des actions à réaliser. Avec un objectif : alimenter et exacerber les fractures existantes dans la société israélienne et encourager l’extrémisme.

Une enquête ouverte

Car le moment est propice. Israël vit « une période de turbulences », décrypte Nitsan Yasur, analyste des campagnes d’influence sur les réseaux sociaux, pour Haaretz. « Des entités extérieures identifient les clivages et tentent de les exacerber par le biais de réseaux d’influence. Les entités étrangères tentent d’influencer (...) et d’inciter les citoyens à l’action et à la violence par des messages adaptés à chaque groupe et communauté. »

Cette conclusion est partagée par plusieurs organisations israéliennes spécialisées dans l’investigation telles que Fake Reporter ou Active Info, qui ont lancé leur enquête, indique le journal proche de la gauche israélienne. Parmi les indices ayant permis de détecter les infiltrés : des fautes d’orthographe en hébreu, un nom des administrateurs suspects – « Avraham » – ou encore des profils au numéro israélien vendu en ligne mais n’utilisant pas des fournisseurs de téléphonie mobile du pays.

Épinglé dans l’enquête de Fake Reporter, le groupe No Voice s’est montré particulièrement actif dans le camp des manifestants opposés à la réforme de la justice. En mars 2023, plusieurs utilisateurs de Twitter publient ainsi « No Voice est la voix de la démocratie en Israël. Nous sommes la tribune des personnes sans voix. Soyez en contact avec nous ». Après les révélations d’ingérence étrangère qui l’entouraient, le compte No Voice a été suspendu du réseau social.

De l’autre côté du spectre, l’enquête pointe du doigt un autre groupe, dénommé The Hunters, dont le site est toujours actif, qui a lui promu la réforme et les manifestations en soutien du gouvernement Netanyahu, appelant dans des conversations WhatsApp à « chasser ceux qui ont trahi les juifs ». Pour se fondre dans la masse, les administrateurs du groupe auraient utilisé des photos volées et dénoncé des personnalités opposées au projet du gouvernement. Notamment Orly Barlev, activiste et journaliste indépendante désignée comme une « traîtresse », dont les coordonnées ont été divulguées sur le réseau social. Contactée par les investigateurs de l’enquête, l’activiste a regretté que « le gouvernement ne prête pas assez attention à cette menace et ne ferme pas la brèche qui permet aux “agents du chaos” d'essayer de désintégrer Israël ».

Où est la « nation cyber » ?

Tout porte à croire, selon Fake Reporter, que ces deux principaux réseaux feraient en fait partie de la même opération d’influence, ciblant les deux blocs qui se confrontent en Israël autour de la réforme de la justice. Des opérations qui porteraient la signature de la République islamique, soutient l’organisation qui a enquêté. Prévenu de cette activité, le service israélien de la sécurité intérieure, le Shin Bet, a confirmé l’existence de groupes opérant depuis l’extérieur du pays, annonçant coopérer avec les forces de l’ordre pour déjouer et contrecarrer ces tentatives d’infiltration. Tout en précisant que l’influence iranienne en Israël est minime, le Shin Bet a toutefois demandé aux Israéliens de ne pas fournir d’informations personnelles à des groupes inconnus sur les réseaux sociaux. « Israël a l’obligation de protéger ses citoyens sur les réseaux sociaux, et il échoue à cela », regrette pour sa part le PDG de l’organisation Fake reporter, Achiya Schatz. Étonnant pour un État qui aime à se présenter comme « la nation cyber ».

D’autant que ce n’est pas la première fois que des groupes d’influence tentent d’infiltrer des conversations israéliennes. Avec des techniques similaires, le groupe « Trial of Traitors » avait même réussi à piéger le ministre israélien de la Sécurité nationale Itamar Ben Gvir au début du mois. Le politicien d’extrême droite avait alors partagé sur son compte Twitter en les dénonçant des captures d’écran de messages Telegram où l’on pouvait apercevoir des échanges d’informations personnelles sur des officiers de police ainsi qu’un appel à l’action contre eux. Si la police avait affirmé quelques heures après que la chaîne Telegram en question opérait depuis un pays étranger, le ministre avait maintenu son tweet accusant des manifestants contre la réforme judiciaire. Un geste intentionnel dans le but d’instrumentaliser l’opinion publique, selon le journal Haaretz.

Des affiches « No Democracy, No Voice » flottant des balcons d’appartements israéliens, des banderoles « On a eu assez du roi Bibi (Benjamin Netanyahu, NDLR) » ou leur pendant, « Bibi est mon roi », prêtes à être brandies dans les rues israéliennes les jours de manifestation. Jusque-là, rien d’étonnant dans un pays polarisé autour de la réforme contestée de la justice...
commentaires (1)

Bien Fait ! Bravo ! Pour une fois les iraniens rendent la pareille aux immixions israéliennes dans tous les pays du Moyen-Orient ! Les espions pro-israéliens pullulent chez nous par exemple !

Chucri Abboud

14 h 43, le 20 juin 2023

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Commentaires (1)

  • Bien Fait ! Bravo ! Pour une fois les iraniens rendent la pareille aux immixions israéliennes dans tous les pays du Moyen-Orient ! Les espions pro-israéliens pullulent chez nous par exemple !

    Chucri Abboud

    14 h 43, le 20 juin 2023

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