Le clin d'œil Le clin d'œil de Nada Nassar-Chaoul

Notre printemps à nous

Notre printemps à nous

D.R.

Dans les pays « civilisés » normaux, l’image d’Épinal du printemps se décline en beaux jours, promenades dans la nature, floraison de fleurs, bourgeons qui bourgeonnent, fillettes en robes légères courant dans les champs emplis de marguerites, papillons qui volètent et tutti quanti…

Nos « bonnes écoles francophones », pour leur part, nous abreuvaient de littérature printanière – épurée, il va sans dire, de l’éveil des sens qui l’accompagne souvent – de Victor Hugo dans Premier mai, au Grand Meaulnes d’Alain-Fournier, en passant par l’épicurienne Colette et par Jean Giono, le chantre de la nature, sans oublier le printemps proustien et même celui de ce vieux réaliste de Balzac dans Le Lys dans la vallée. Étrange, à y penser, cette fixation scolaire sur la description des saisons. Est-ce parce que la nature est un lieu supposé neutre, à l’écart des passions et des vices humains ? Quoi qu’il en soit, nous en avons écrit des rédactions à l’école sur le thème ultra éculé du printemps, en français et en arabe d’ailleurs, avec un talent, pour le moins, discutable…

Dans les pays de la région, au contraire, cette saison – avant même de devenir « le printemps arabe » avec les résultats que l’on sait – est une période de l’année explosive durant laquelle s’éveillent les revendications, les contestations et même les guerres. Souvent sanglants et meurtriers, ces printemps-là n’ont rien de doux, avec une fâcheuse tendance à tourner court et à finir en queue de poisson, lorsque pointe l’hiver et ses premiers frimas…

Dans notre doux Liban, le printemps s’annonce toujours beaucoup trop tôt, dès le mois de mars. C’est la fierté de notre climat méditerranéen tempéré, une sorte de revanche par rapport aux déserts arides de la région. Exclusivement gourmand, il commence par les premières nèfles. Encore petites et légèrement striées de vert, elles nous sont timidement proposées par les marchands de quatre-saisons qui nous assurent cependant, contre toute vraisemblance, que « si, si, elles sont sucrées comme du miel ». L’ambiance printanière s’accentue lorsqu’apparaissent les premiers « janerek », des reines-claudes locales acides qu’on mange avec du sel et dont raffolent les gosses.

Mais c’est lorsque les étals se remplissent d’amandes vertes, de petits pois frais et de fèves à décortiquer sur la balançoire du balcon, à côté du gardénia fleuri dont le parfum embaume les soirées magiques de mon pays, que le printemps est vraiment là.

Pas pour longtemps, hélas !

Dans les pays « civilisés » normaux, l’image d’Épinal du printemps se décline en beaux jours, promenades dans la nature, floraison de fleurs, bourgeons qui bourgeonnent, fillettes en robes légères courant dans les champs emplis de marguerites, papillons qui volètent et tutti quanti…Nos « bonnes écoles francophones », pour leur part, nous abreuvaient de littérature...

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