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Nos Lecteurs ont la Parole

En se souvenant du grand Georges Naccache

La chanson, c’est Hier encore de Charles Aznavour que j’écoute plusieurs fois de suite. L’ambiance est mélancolique.

Devant moi, les lucarnes colorées de ma chambre de séjour, par lesquelles les rayons du soleil pénètrent, le rendant plus chaud durant cette saison d’hiver.

Sûrement c’est une belle chanson.

La beauté de cette chanson ne réside pas seulement dans la musique douce et la voix timbrée du grand Charles, mais surtout les paroles et le thème de la chanson. Comme tout autre personne écoutant cette chanson, pour un long moment je me suis trouvé submergé dans le passé.

Le chanteur disait ; « Hier encore, j’avais vingt ans, je caressais le temps et jouais de la vie »… À vingt ans, j’étais à Beyrouth dans ma maison familiale, mon quartier, mon pays que je n’ai jamais envisagé de laisser un jour et d’émigrer. C’était les années 80. Mais le destin en a voulu autrement.

Sûrement je ne suis ni le premier ni le dernier à avoir subi ce destin, avec tout le chagrin et la tourmente compris. Mais la question cruciale est de savoir si on peut faire en sorte que cela ne devienne plus un « problème national », ou bien un « problème identitaire » qui atteint la majorité des jeunes Libanais.

Beaucoup disent que l’énigme émanerait de la structure même du pays, qui est basée sur le pacte national de 1943, et je m’incline avec respect devant le symbole qu’il représente.

Ce fameux pacte de novembre qui dit « Ni Occident ni arabisation » est selon le grand Georges Naccache un double refus sur lequel les chrétiens et les musulmans ont formulé leur alliance. C’est le pacte fondamental de l’indépendance nationale, qui est en elle une source de contradictions, toujours selon Georges Naccache.

Beaucoup d’érudits en politique ce sont vivement exprimés sur « cet arrangement » ambigu et ambivalent. Un correspondant avait écrit à L’Orient en 1949 cette fameuse phrase : « à force de ne vouloir ni l’Ouest ni l’Est, nos dirigeants ont fini par nous faire perdre le Nord. »

Depuis son indépendance, le Liban a parcouru une série d’expériences déchues de cohabitation, qui ont terni la grande image idyllique de ce pays. Sûrement c’est à cause des ingérences étrangères, commençant par les événements de 1958, et puis la guerre civile, suivie de frictions intercommunautaires, un déraillement socio-économique majeur, une structure gouvernementale pluriconfessionnelle qui induit à un blocage, bref une convivialité intercommunautaire pas toujours exemplaire.

Il y aura peut-être des solutions sous d’autres formules. Il faut savoir identifier les problèmes, avoir le courage de les dénoncer, et par la suite d’avoir la bravoure de proposer des solutions. C’est est un devoir national.

Si le système ne fonctionne plus, il faut modifier ce système. Blâmer toujours autrui, que ce soit les voisins proches ou lointains, n’est pas la solution.

La position géographique du Liban ainsi que celle de ses voisins ne vont jamais changer. Cela est une vérité absolue. Donc de suite, dans ce contexte géopolitique, les ingérences et les influences externes ne vont jamais cesser. De longues années d’histoire écrites avec du sang nous ont appris cette déplorable vérité. La réfuter, c’est être aveugle.

Les Libanais n’ont pas de problèmes intercommunautaires existentiels si ces derniers ne sont pas incités et exhortés par des forces externes. Donc il faut essayer de trouver une formule en prenant en considération ces points. Que faire ?

Après tant d’années de cassure, et hélas de faillite morale et sûrement nationale, la réponse est claire dans nos esprits : une nouvelle formule.

Dernièrement, beaucoup s’expriment pour l’adoption d’un système fédéral. C’est-à-dire un seul pays mais divisé en fédérations, comme une multitude de pays, où chacun aura sa liberté interne, mais toujours dans le cadre du respect des autres fédérations et sans des ingérences indésirables. C’est une idée intéressante. Mais quid alors de la politique commune externe ? Comment la gérer sans contraindre les désirs d’une fédération ou bien de l’autre ? Donc voilà déjà un problème épineux et capital qu’on ne pourra pas surmonter en sachant les inclinaisons divergentes de certaines communautés.

Pour les partisans de la partition totale, je dirais peut-être que cela est utopique, car partager et diviser le Liban est une idée totalement ludique. Comment et sur quel fondement se baser ? Sur quelle loi s’appuyer ? D’où l’impossibilité d’exécuter aussi cette idée.

La seule façon de survie ne consiste pas dans la partition partielle ou totale comme certains le proposent, mais elle réside dans l’introduction imminente de réformes dans les domaines administratif, législatif, exécutif et judiciaire, associées à une redéfinition des responsabilités de l’État et de ses missions essentielles. Tout cela doit aller de pair avec l’instauration inévitable d’un système d’éducation civique.

Même si on adopte n’importe quelle autre formule de coexistence et on introduit de maintes réformes sans l’instauration de l’éducation civique fondamentale, on ne pourra jamais surmonter et éviter la réapparition d’une classe politique néfaste et préjudiciable qui nous amène ultérieurement vers la même situation pitoyable.

Je reprends une belle réflexion de Natacha Aminata Kc qui dit : « Le piédestal d’une nation repose sur son éducation civique et morale. »

En se souvenant du grand Georges Naccache qui avait dit le 10 mars 1949 dans sa très fameuse publication « Deux négations ne font pas une nation », je dirais que, hélas, deux négations doivent faire une nation, et cela avec beaucoup de réformes et de bonne volonté, car d’autres solutions n’existent tout simplement pas.

Dr Vartkès ARZOUMANIAN

Abou Dhabi

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La chanson, c’est Hier encore de Charles Aznavour que j’écoute plusieurs fois de suite. L’ambiance est mélancolique.Devant moi, les lucarnes colorées de ma chambre de séjour, par lesquelles les rayons du soleil pénètrent, le rendant plus chaud durant cette saison d’hiver.Sûrement c’est une belle chanson. La beauté de cette chanson ne réside pas seulement dans la musique douce...

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