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Société - Double explosion au port

La société civile veut une commission internationale d’établissement des faits

Un sit-in a été organisé hier pour réclamer l’intervention du Conseil des droits de l’homme – relevant de l’ONU – dans l’enquête. L’Australie aurait préparé une pétition que des États membres de cet organisme pourraient signer.

La société civile veut une commission internationale d’établissement des faits

Le collectif Noun et des parents de victimes rassemblés hier devant le Palais de justice, en collaboration avec HRW. Photo João Sousa

Face aux énormes obstacles politico-judiciaires auxquels est confrontée l’enquête sur la double explosion au port de Beyrouth (4 août 2020), menée par le juge d’instruction près la Cour de justice Tarek Bitar, les proches des victimes et la société civile n’abandonnent pas leur volonté de faire la lumière sur les circonstances et les auteurs du crime. En coopération avec Human Rights Watch (HRW), le collectif Noun a organisé hier un sit-in devant le Palais de justice de Beyrouth, pour réclamer au Conseil des droits de l’homme (organe intergouvernemental relevant des Nations unies), consacré à la protection des droits humains dans le monde, de créer une commission internationale d’établissement des faits. Si elle est créée, cette commission serait chargée de collecter des preuves liées à l’affaire de la double explosion au port qui a fait plus de 220 tués et 6.500 blessés, afin de les mettre à la disposition de la justice libanaise et du secrétariat général de l’ONU.

S’exprimant au nom du collectif Noun, l’activiste Nawal Méouchy a déploré que « la classe au pouvoir veuille éviter la redevabilité », soulignant que « la justice libanaise est prise en otage par un groupe de politiques qui contrôlent le pays ».

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Pour sa part, la directrice du bureau de HRW au Moyen-Orient et en Afrique du nord (MENA), Lama Fakih, a appelé les quarante-sept États membres du Conseil des droits de l’homme à œuvrer pour la création d’une commission internationale d’établissement des faits. « Les parents des victimes ont le droit de savoir qui est responsable de la mort de leurs proches », a-t-elle martelé. « Depuis plus de deux ans, nous exhortons nombre d’ambassadeurs d’États membres du Conseil des droits de l’homme de l’ONU à se mobiliser pour pousser l’instance à se pencher sur la double explosion au port de Beyrouth et à la considérer comme une violation des droits de l’homme », indique Mme Fakih, dans un entretien avec L’Orient-Le Jour. « Plusieurs États jugent qu’il ne s’agit pas d’une question liée aux droits humains, mais d’un accident similaire à d’autres catastrophes qui n’ont pas été soumises au conseil », déplore-t-elle, se félicitant toutefois que la tendance semble désormais s’inverser.

À l’initiative de l’Australie

« L’Australie a préparé une pétition que de nombreux États membres pourraient signer lors de la session en cours du Conseil des droits de l’homme », croit savoir la directrice de HRW, estimant que « cette déclaration commune (joint statement) comporterait un message à l’État libanais pour lui faire part de la préoccupation du Conseil au sujet du dossier, et le pousser à faciliter le déblocage de l’enquête ». La plus jeune victime de l’explosion du 4 août est un bébé d’un an et demi, Isaac, de parents australiens.

Mme Fakih indique que « dans le document qui se prépare, ses signataires pousseraient les autres membres à voter pour la création de la commission internationale, afin de lever les entraves aux investigations ». « Une résolution serait alors adoptée en ce sens lors de la prochaine session (prévue en juin) », espère-t-elle.

Tracy Najjar, mère d’Alexandra, tuée à l’âge de 3 ans et demi lors de la double explosion, semble confiante. « Ça va dans le bon sens », indique-t-elle depuis Paris où elle a rencontré des responsables du ministère français des Affaires étrangères dans le cadre de cette affaire. « La France et les autres États de l’Union européenne paraissent vouloir approuver la désignation de la commission », déclare-t-elle à L’OLJ. « Il nous faut renforcer le lobbying auprès des États-Unis, des pays d’Amérique latine et d’Afrique », poursuit-elle, regrettant que « les pays du Moyen-Orient ne soient pas favorables à une telle décision ».

Contrairement à une enquête internationale qui serait menée par le Conseil de sécurité de l’ONU, la création de la commission revendiquée par la société civile ne nécessite pas une demande de l’État libanais. On sait que celui-ci est réticent à l’internationalisation des investigations, depuis que l’ancien chef d’État Michel Aoun avait affirmé, au lendemain de la catastrophe, qu’une enquête internationale « diluerait la vérité ».

Visibilité à l’international

Dans les milieux proches du juge d’instruction près la Cour de justice Tarek Bitar, on croit savoir que celui-ci accueillerait favorablement une commission d’établissement des faits. Tout élément visant à assister la justice libanaise en vue de faire avancer l’enquête est le bienvenu, d’autant qu’il manque environ 20 % à l’enquête pour qu’elle soit complétée, assure-t-on. Une telle mesure contribuerait en outre à donner une visibilité au dossier, suspendu par une quarantaine de recours abusifs contre Tarek Bitar.

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Mais comment la commission pourrait-elle assister une justice locale paralysée ? Une source judiciaire informée affirme que, depuis sa jurisprudence publiée en janvier dernier, Tarek Bitar considère que tous les recours portés contre lui sont illégaux. Partant de cela, il attend seulement d’être interrogé par un magistrat que le président du Conseil supérieur de la magistrature (CSM) Souheil Abboud devrait désigner à la suite de la plainte portée contre lui par le procureur général près la Cour de cassation, pour « usurpation de pouvoir ». Dans le cas où le magistrat désigné considérerait le juge Bitar compétent, ce dernier pourrait poursuivre son enquête en dépit de tous les recours en cours et à venir, et son travail serait facilité par une telle commission.

Face aux énormes obstacles politico-judiciaires auxquels est confrontée l’enquête sur la double explosion au port de Beyrouth (4 août 2020), menée par le juge d’instruction près la Cour de justice Tarek Bitar, les proches des victimes et la société civile n’abandonnent pas leur volonté de faire la lumière sur les circonstances et les auteurs du crime. En coopération avec Human...

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Décidément, Jad Maalouf va finir par être la seule et unique raison pour laquelle je ne vais pas renouveler mon abonnement à l'OLJ!

Georges MELKI

15 h 51, le 07 mars 2023

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Commentaires (1)

  • Décidément, Jad Maalouf va finir par être la seule et unique raison pour laquelle je ne vais pas renouveler mon abonnement à l'OLJ!

    Georges MELKI

    15 h 51, le 07 mars 2023

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