Le corps du cheikh sunnite Ahmad Rifaï, porté disparu depuis lundi, a été retrouvé dimanche à l'aube près du fleuve de Nahr el-Bared, dans le Akkar (Liban-Nord), a confirmé à L'Orient-Le Jour un porte-parole des Forces de sécurité intérieure (FSI).
Menotté et ligoté
Dans un communiqué publié en soirée dimanche, les FSI ont indiqué que le corps sans vie du cheikh a été retrouvé dans la localité de Rihaniyé, près du lac el-Bared, dans espace utilisé comme une décharge. Selon la police, le corps a été "enterré dans une fosse de 3,5 mètres de profondeur et extrait à l'aide d'une tractopelle à l'aube, dimanche". "Après examen, il s'est avéré que le cheikh avait été menotté et ligoté et son corps atteint de plusieurs balles", poursuit le texte.
Les FSI ont ensuite affirmé avoir arrêté "toutes les personnes impliquées dans le crime", notant qu'il s'agit de "cinq membres de la famille Rifaï qui ont kidnappé, tué puis enterré le corps du cheikh conformément à un plan d'action élaboré il y a environ un mois par le président de la municipalité de Karkaf (Y. R.) et son fils (A. R.)". Ces derniers ont par la suite "eu recours à trois de leurs proches (A. R.), (Y. R.) et (A. R.) afin de kidnapper" le cheikh. Il s'est avéré que "le reste des personnes arrêtées, les Libanais M. M., Kh. R., M. R. (un autre fils du président de la municipalité) et W. B. ne sont pas liés au crime" et ont été relâchés, conclut le communiqué.
A la suite d'une fouille au domicile du président de la municipalité, les FSI ont annoncé avoir trouvé " de grandes quantités d'armes de calibre moyen, des roquettes, des munitions, des grenades et des explosifs de type TNT ainsi que des détonateurs". L'arsenal en question a été confisqué.
La dépouille du cheikh a été ramenée dans l'après-midi à son domicile, dans le village de Karkaf, où une grande foule s'est rassemblée pour l'accueillir, selon une photo envoyée par notre correspondant.
Éviter la sédition
Réagissant à cet incident, le mufti de la République, le cheikh Abdellatif Deriane, a appelé les "services sécuritaires et judiciaires à accélérer l'enquête, déterminer les circonstances du décès du cheikh, et infliger des sanctions justes à l'encontre de ceux qui ont commis ce crime". Il a dans le même temps remercié les services de sécurité qui ont "identifié rapidement les criminels, évité la sédition et mis un terme aux rumeurs qui ont accompagné cet incident".
Dispute familiale
La disparition du dignitaire réputé pour ses déclarations hostiles au Hezbollah et à l’axe pro-iranien au Liban, et dont le dernier prêche traitait, selon des médias, de trafic de drogue dans les régions sous influence du parti chiite, a fait craindre des tensions confessionnelles dans le pays. Une hypothèse rapidement écartée par un communiqué de la police publié samedi, qui affirmait que le cheikh a été enlevé et tué par des proches, suite à un différend familial. Les FSI ont en effet annoncé avoir arrêté quatre personnes vendredi soir, dont trois "cousins" d'Ahmad Rifaï. Deux de ces suspects ont confessé avoir enlevé et tué le cheikh dans le cadre d'une ancienne dispute familiale. La police avait retrouvé vendredi la voiture d'Ahmad Rifaï près de l'hôpital Haykal dans le Koura, sans ses plaques d'immatriculation.
Contacté par notre publication, Khaldoun Oraymet, juge désigné par Dar el-Fatwa pour suivre cette affaire, avait précédemment confirmé que les suspects sont originaires de Karkaf, tout comme le cheikh. Une façon d'écarter l'éventualité d'un crime lié à des motifs politiques.
L'enquête sur cette affaire est conduite sous la direction de Samaranda Nassar, première juge d'instruction du Liban-Nord. Après que des rumeurs ont fait état samedi de l'implication du Parti syrien national social (PSNS), dans cette affaire, la formation, proche des groupes pro-iraniens de la région, a publié une déclaration démentant l'arrestation de l'un de ses membres de haut rang. Le PSNS a condamné "les tentatives d'exploiter l'incident et de provoquer des divisions pour des raisons dérisoires".
commentaires (7)
Faudrait penser à juger avec autant de rapidité les commanditaires de l’explosion du 4 août qui ont tué +230 victimes et plusieurs milliers d’handicapés
Khoury-Haddad Viviane
09 h 11, le 27 février 2023