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Économie - Finances publiques au Liban

Le Conseil constitutionnel ne censure que certains articles du budget de 2022

Deux juges sur dix se sont prononcés pour une annulation de la loi de finances dans son ensemble. 

Le Conseil constitutionnel ne censure que certains articles du budget de 2022

Le siège du Conseil constitutionnel. Photo ANI

Saisi suite à un recours en inconstitutionnalité formé fin novembre dernier par un groupe de 11 députés, dont principalement des élus issus de la société civile, le Conseil constitutionnel a finalement validé le budget de l’État de 2022, voté en septembre et entré en vigueur le 15 novembre dernier, soit avec dix mois et demi de retard sur sa période d’application.

Sur les 10 juges composant le collège de la juridiction suprême présidée par Tannous Mechleb, seuls deux – Élie Mecherkani et Mireille Najm – se sont prononcés en faveur d’une annulation de cette loi de finances très controversée qui inclut plusieurs mesures alourdissant la fiscalité, dont certaines applicables rétroactivement. Les deux magistrats avaient notamment fait valoir que le budget de 2022 ne pouvait pas être légalement adopté sans que les comptes de l’année précédente (soit 2021) n’aient été approuvés par le Parlement, comme l’impose l’article 87 de la Constitution.

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Ils avaient également fait valoir à raison que le budget avait été voté hors des délais constitutionnels. Des arguments qui n’ont pas suffi à rallier les autres juges. Lors d’une conférence de presse organisée à l’issue du délibéré, Tannous Mechleb a mis en avant les circonstances exceptionnelles que traverse le pays et qui empêchaient, selon lui, « le gouvernement ou le Parlement » de clôturer les comptes de 2021 dans les règles. Il a également considéré qu’il était préférable que le Liban se dote d’un budget adopté en retard pour éviter « une sorte de chaos ». Deux arguments discutables dans la mesure où le Liban a passé de nombreuses années sans budget et n’a plus respecté l’article 87 de la Constitution depuis 1993.

Les mesures censurées

Le texte reste donc applicable, à l’exception des dispositions suivantes qui ont été totalement annulées :

• L’article 16, qui prolongeait pour trois ans certains effets de la loi n° 194 du 16/10/2020 relative à la protection des régions endommagées et sinistrées et à leur reconstruction suite à l’explosion du port de Beyrouth.

• L’article 21, qui instaurait une amnistie égale à 50 % des montants dus non payés à titre de l’impôt sur le revenu et la TVA pour les précédentes années jusqu’à 2020 et pour lesquels il y avait une objection devant une commission sans que celle-ci ait rendu son verdict au 31 mars 2022.

• L’article 32, qui réinscrivait dans la loi une exonération d’impôt sur le revenu au bénéfice des retraités.

• L’article 89 qui modifie certaines modalités concernant les timbres fiscaux des moukhtars.

• Et enfin l’article 119 qui porte certains amendements sur le nouveau code des marchés publics entré en vigueur le 29 juillet dernier.

Le Conseil constitutionnel a également censuré l’expression « les catégories qui sont exonérées » des articles 53 et 54, portant respectivement sur les frais de sortie et d’entrée à la frontière terrestre libanaise.

Selon le compte rendu de la décision relayé par l’Agence nationale d’information, le Conseil constitutionnel ne semble pas avoir jugé nécessaire d’invalider les dispositions imposant des mesures fiscales rétroactives, à l’image de l’article 33 qui a rehaussé les 7 tranches progressives pour les impôts sur les traitements, salaires et pensions de retraite, mais sans changer les taux d’imposition applicables, soit successivement 2, 4, 7, 11, 15, 20 et 25 % pour des montants de salaires mensuels.

Il ne semble pas non plus être intervenu sur la question de la mise en application de l’article 35 qui a introduit la notion de « taux (de change) effectif », en lieu et place de l’ancienne parité officielle, pour désigner le montant en livres de l’impôt sur les traitements et salaires retenu à la source par l’employeur et qui est dû par les employés à l’administration fiscale. Cette question devrait en principe être tranchée par le Conseil d’État, la plus haute juridiction administrative, qui a été saisi avant les fêtes de fin d’années par un collectif d’entreprises s’estimant lésées par certaines dispositions du budget, avec le soutien de parlementaires. Le ministre sortant des Finances, Youssef Khalil, a décidé d’attendre les décisions des deux cours pour définir les modalités d’application de plusieurs dispositions, dont celles relatives à l’impôt sur le revenu, comme il a été habilité à le faire par le budget. Ces mesures, qui alourdissent brutalement la charge fiscale des salariés et des entreprises, ont été contestées avec vigueur par le patronat et de nombreux syndicats. Youssef Khalil est ainsi revenu sur les modalités qu’il avait adoptées courant novembre et aurait d’ores et déjà décidé de les amender pour alléger leur impact.

Réclamé par le Fonds monétaire international auprès de qui le Liban sollicite une aide financière de 3 milliards de dollars depuis 2020, le budget de l’État pour 2022 a officiellement enterré l’ancienne parité officielle de 1 507,5 livres pour un dollar, a triplé les salaires des fonctionnaires et prévoit de financer le déficit en émettant des bons du Trésor. Or le Liban fait face à une crise depuis plus de trois ans au cours de laquelle son PIB a été divisé par deux, sa monnaie a perdu 95 % de sa valeur et son gouvernement a fait défaut sur sa dette en devises.

Saisi suite à un recours en inconstitutionnalité formé fin novembre dernier par un groupe de 11 députés, dont principalement des élus issus de la société civile, le Conseil constitutionnel a finalement validé le budget de l’État de 2022, voté en septembre et entré en vigueur le 15 novembre dernier, soit avec dix mois et demi de retard sur sa période d’application.
Sur les 10...

commentaires (1)

Le Conseil Constitutionnel confirme encore une fois la politique des "compromissions" dont le but ultime est de pouvoir depouiller les salaries et les epargnants pour proteger les voleurs et les corrompus.

Michel Trad

22 h 36, le 05 janvier 2023

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Commentaires (1)

  • Le Conseil Constitutionnel confirme encore une fois la politique des "compromissions" dont le but ultime est de pouvoir depouiller les salaries et les epargnants pour proteger les voleurs et les corrompus.

    Michel Trad

    22 h 36, le 05 janvier 2023

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